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Partis sans laisser d’adresse – Susin Nielsen

On vous le dit et redit tous les deux ans : IL FAUT LIRE SUSIN NIELSEN. ❤ Comment faites-vous pour (sur)vivre sans ses livres dans vos vies, hein ? Alors que nous, on se languit de ses personnages, de son univers canadien, de son ton pince-sans-rire et de ses histoires truculentes… chaque nouvelle lecture d’un roman de Susin est une petite bulle en dehors du temps, un moment unique !
Chronique garantie sans objectivité aucune !!!

Félix Knutsson, bientôt 13 ans, se retrouve au commissariat. Pour expliquer ce qu’il y fait en ce 27 novembre, veille d’un événement capital, le garçon revient au moment où sa mère, Astrid, a perdu travail, petit copain et appartement, et où ils se sont retrouvés tous les deux à vivre dans un vieux Combi Volkswagen « emprunté ». La situation était pourtant censée être temporaire…

★★★★★

Après l’amour que je portais déjà très très fort à Ambrose et à Henry, je ne pensais pas trouver un personnage aussi fort, et pourtant ! Félix est un garçon profondément attachant, avec ses petites bizarreries qui font toujours le sel des ados et préados imaginés par Susin Nielsen, et qui rappelle un petit peu les fameux Ambrose et Henry. (D’ailleurs, je suis plus que ravie et profondément émue de retrouver Henry dans ce nouveau roman). ❤ Avec Partis sans laisser d’adresse, Susin Nielsen évoque la question de la précarité et, toujours, la relation familiale, ici celle d’une mère célibataire et de son fils. Astrid est une femme orgueilleuse qui n’est pas capable de garder un travail et d’accepter de se faire aider quand elle en a besoin. Par peur d’être séparée de son fils, elle demande à Félix de ne rien dire à son nouveau collège, l’idée étant de retrouver vite un travail et un logement décent. Mais tout ne se passe pas toujours aussi facilement et les semaines, les mois, passent et vivre dans un mini-van n’est plus si cool… Mais Félix a peut-être la solution : il a été sélectionné pour participer à l’émission junior de Qui, Que, Quoi, Quand ?, un jeu télévisé dans lequel il peut remporter jusqu’à 25 000$ !

On le dit tout le temps aussi, mais le talent de Susin Nielsen, c’est véritablement de savoir doser à la perfection la mesure d’humour qu’il faut à une histoire somme toute pas si marrante. On rit. On éclate de rire, même. (Mais bon, je suis bon public quand il s’agit de prouts). Et puis on chiale à moitié, aussi. De tristesse ou de compassion. Mais de bonheur aussi. Parce que c’est ça aussi, les romans de Susin Nielsen. Une émotion pas possible, qui te fait passer du rire aux larmes en quelques phrases bien troussées. Une incarnation sensible et sincère des personnages – même chez Astrid, qu’on pourrait détester à plus d’un titre et qui déborde pourtant d’amour – et une histoire qui sait mêler l’extraordinaire à la dure réalité sans nier les difficultés, la gêne ou la souffrance, tout en choisissant de nous rappeler la force de l’amitié et de l’entraide. Un roman d’une formidable richesse, qui nous laisse le cœur gonflé de joie : d’avoir rencontré Félix, d’avoir passé un moment de plus dans l’imagination de Susin Nielsen, et de savoir qu’il y a toujours de l’espoir. ❤

Partis sans laisser d’adresse, Susin Nielsen, traduit par Valérie Le Plouhinec (hélium)
disponible depuis le 3 avril 2019
9782330120566 – 14,90€
à partir de 12 ans
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Maman, tu fais quoi ? Mélanie Grisvard & Vincent Bourgeau

mamantufaisquoiOnomatopées en vue ! La journée d’une maman décryptée à travers les sons qui nous entourent au quotidien lorsqu’on habite en ville. Maman, tu fais quoi ? c’est un peu Où est Charlie revisité niveau bébé : une souris est à chercher dans toutes les pages. Personnellement j’ai géré cet exercice comme une reine. Vous ne serez pas au bout de vos surprises…La lecture de cet album est riche et passionnante car l’effort de retranscription des bruits demande un certaine habileté : savez-vous représenter oralement les bruits d’un moteur, un ronflement, une bouilloire, le roucoulement d’un pigeon, un marteau-piqueur, un aspirateur, un accordéon, un gargouillement, un bâillement, le bruit d’une sauterelle… ? Et bien vous apprendrez rapidement car c’est l’occasion de développer vos talents de conteur ! Peu d’albums mettent en avant des sons qui représentent aussi bien le quotidien urbain.

★★★★☆

Cet album cartonné est l’occasion de rappeler le rôle de l’onomatopée. Vous rendez-vous compte que l’on peut en créer un nombre illimité ? 🙂

Onomatopée illustrer des actions non parlées, un mot créé qui rappelle une sonorité acoustique faite par des personnes, animaux ou objets.

La création d’onomatopée est un art à part entière. Grâce à elles, les noms et les verbes se forment : c’est une forme d’art utile pour les plus jeunes. Ici, l’ambiance sonore chargée nous montre que le quotidien d’une maman est bien rempli. L’excellent travail d’équipe des auteurs est à noter : l’ensemble texte/image est interprété avec talent. La mise en dessin de Vincent Bourgeau est parfaite : pour la représentation du marteau-piqueur ou d’un aspirateur, la taille des caractères est plus grande et la multiplication des syllabes nous informe du niveau sonore des objets, d’où BABABABABAM Un exercice difficile (si, si : essayez pour voir, n’est pas « onomatopiste » qui veut !) que Vincent maîtrise brillamment. J’espère qu’il bombe le torse de fierté.

Et à la réponse du titre Maman, tu fais quoi ?, nous sommes ravies qu’elle ne fasse pas la vaisselle et qu’elle représente avec confiance la Working mom d’aujourd’hui, mère célibataire qui plus est puisqu’aucun papa n’a été présenté dans l’album. Il est important de souligner qu’elle a toujours le sourire au fil des pages, cette maman rayonne de bonheur…comme quoi une famille monoparentale peut être équilibrée et vue comme une normalité.
mamantufaisquoiplanche

Maman, tu fais quoi ? Mélanie Grisvard & Vincent Bourgeau
(Les Fourmis Rouges)
en librairie depuis le 21 mai 2015
9782369020394 – 13.00€
à partir de 1 ans

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Un éléphant pour le thé – Linda Groeneveld

éléphantthé A l’aube, la petite princesse se leva avant tout le monde : elle a faim, elle veut jouer avec ses cubes, ses poupées, à cache-cache mais elle s’ennuie fermement car aucun adulte n’est réveillé. Elle a bien un papa, il est fort – il peut soulever 3 chevaux – mais en tant que Roi il a beaucoup de travail et reste irrémédiablement fatigué. Que faire lorsqu’un papa est trop occupé à régner sur un royaume et que l’on veut jouer ? Parce que ni les poupées, ni les laquais ne participent aux jeux de la princesse. Elle n’a qu’une idée en tête depuis que son quotidien est devenu ennuyeux : avoir un chien. Le roi lui a promis mais l’acquisition du canin a bien du retard…Une baronne arrive bientôt au palais et le Roi est bien préoccupé pour penser au chien tant attendu. La princesse n’en a cure de cette femme. A son arrivée, la petite ne serra pas la main que lui avait tendue la baronne, ce qui la vexa promptement et prit aussitôt la fillette en grippe.

« Une baronne ?! Est-ce qu’elle avait du flair ? Est-ce qu’elle levait la patte quand elle faisait pipi ? Est-ce qu’elle enterrait les os ? Non, bien sûr que non ! Les baronnes font beaucoup trop de chichis. »

★★★★☆

Comme le veut la coutume dans les contes : le Roi est séduit par cette femme qui se révélera vénale, égocentrique, autoritaire mais d’une grand beauté qui n’apprécie guère les animaux, les enfants et le bazar qu’ils propagent. La baronne s’enticha du Roi et très vite la rumeur du mariage s’étend et les cadeaux commencent à affluer. Soudain, un présent plus gros que jamais attire tous les regards : un éléphant ?! La princesse en fit bien vite son animal de compagnie : pourquoi se gênerait-elle ? Pour embêter une baronne au sale caractère, mieux vaut être deux…Mais le mystère du pachyderme en guise de cadeau reste entier et la fin de ce conte malicieux est bien étonnante.

Une histoire tendre parsemée de touches d’humour qui fait sourire. Une parodie que l’on pourrait adapter à notre époque : un père célibataire qui travaille d’arrache-pied et qui culpabilise de ne pas passer assez de temps avec sa fille. Moralité : ce n’est pas parce qu’un papa travaille trop que cela fait de lui un mauvais parent – la preuve : il est toujours présent pour lui raconter une histoire avant de la border.
Un vrai souffle d’air frais ce livre…avec des paillettes, du thé et une touche du vandalisme : ouvrez-le, vous saurez 🙂

Un éléphant pour le thé, Linda Groeneveld (Magnard Jeunesse)
Collection Romans Perles
en librairie depuis le 9 mars 2015
9782210961012 – 12.90€
à partir de 8 ans