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Les jours pairs : 179 histoires à lire avec qui on veut – Vincent Cuvellier & Thomas Baas

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Enfant, Bob n’avait pas beaucoup de livres mais il en avait un qui s’appelait quelque chose comme « 365 histoires pour toute l’année ». Un recueil avec une histoire pour chaque soir. C’était sans doute sur un thème, peut-être des contes. En tous cas, il n’en lisait pas qu’une seule par soir… 😉

★★★★★

Les jours pairs, 179 histoires à lire avec qui on veut, reprend le principe pour mieux le détourner. Vincent Cuvellier explique en effet que l’idée du livre vient du fait que beaucoup d’enfants ont des parents séparés et qu’il n’est pas toujours possible d’avoir une histoire de maman ou de papa chaque soir de la semaine ! (Bon, il paraît que c’est aussi parce qu’il était un peu flemmard et que 365 histoires, quand même, ça fait un paquet !) Du coup, ça donne une histoire pour chaque jour pair de l’année ! Et en plus, on est même pas obligé de les lire dans le bon jour ou dans le bon ordre ! La preuve, je vous en parle un jour IMPAIR, et j’en ai lu plein d’affilés (Bob le rebelle) !

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C’est donc avec un plaisir nostalgique non dissimulé que l’on découvre toutes les courtes histoires inventées par Vincent Cuvellier, qui est vraiment très très fort sur ce format ! On peut ainsi lire tous les deux jours : des histoires de la vie de tous les jours, des histoires du monde entier, des histoires d’extraterrestres, des histoires avec Jojo et son papa, des histoires avec des gens inconnus, des histoires en trois chapitres, et plein d’autres encore, mais aussi d’autres types de textes, comme des lettres (au lapin de Pâques ou à Saint-Valentin), des recettes de cuisine (à tester impérativement !) ou encore des règlements intérieur (de la piscine ou du jardin public) et des traités de zoologie (pour savoir comment c’est fait, les animaux). Le tout avec évidemment beaucoup – très beaucoup – d’humour, de naïveté, d’absurdité et d’innocence enfantine. Vincent Cuvellier a le don de faire des petits moments de la vie une aventure extraordinaire, dans une langue à hauteur d’enfant, pleine d’inventions rigolotes et de légèreté, pour une réelle complicité parent/enfant.

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Un aussi gros pavé d’histoires de près de 300 pages ne pouvait pas se contenter que de mots, et c’est Thomas Baas qui vient ajouter son univers graphique tout en tendresse et en humour. Des illustrations réalisées à la plume sur chaque page, avec des touches de couleurs légères, qui complètent à merveille les mots de Vincent Cuvellier et qui représentent d’ailleurs l’auteur dans son rôle de papa et de raconteur d’histoires.

Un album exceptionnel, à offrir à tous les enfants et à tous les parents, pour que se prenne l’habitude de l’histoire du soir. Et si vous n’êtes toujours pas convaincus, les éditions hélium vous proposent de découvrir une quinzaine de pages juste ici ! Profitez-en ! 🙂

Les jours pairs : 179 histoires à lire avec qui on veut, Vincent Cuvellier, illustré par Thomas Baas (hélium)
disponible depuis le 6 septembre 2017
9782330065379 – 19,90€
à partir de 5 ans
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Ma dernière chance s’appelle Billy D. – Erin Lange

9782211231848,0-4211083

Dane n’est pas capable de s’exprimer autrement qu’avec les poings. Malgré de bons résultats au lycée, il suffit d’une bagarre de plus et il sera exclu définitivement. Sa dernière chance, c’est Billy D., un garçon trisomique qui vient de s’installer à côté de chez lui. Leur marché : Dane devient son « ambassadeur » au lycée et Billy le soutiendra devant le proviseur. Mais Billy a une autre mission à confier à Dane : l’aider à retrouver son père avec, pour seul indice, un atlas du pays rempli d’énigmes.

★★★★★

Essayez de regarder Dane de travers et c’est toutes vos dents qui sautent ! Dane est un garçon violent, incapable de maîtriser une colère sourde. Une colère dont il n’a aucune idée de la provenance. Il vit seul avec sa mère qui l’a eu adolescente et qui collectionne les tickets à gratter gagnant qu’elle encadre sans encaisser les sommes… Alors qu’il battait un mec juste parce qu’il avait une caisse et se pavanait avec, Dane croise le regard de son nouveau voisin, Billy D. Billy D. est trisomique et Dane frappe pas les handicapés, ni les filles. Pourtant, il en a parfois envie, de lui faire la tête au carré à ce Billy. Pour éviter l’exclusion, Dane va accepter de s’occuper de Billy pour son arrivée au lycée, de lui montrer les lieux, etc. Mais pour Billy, se rapprocher de Dane c’était surtout s’assurer un garde du corps – le garçon étant harcelé par d’autres lycéens – et apprendre à se battre. Mais autre chose les rapproche : tous deux sont en manque de père. Dane n’a jamais connu le sien et Billy a été arraché au sien par sa mère. Et pour Billy, retrouver son père est la chose la plus importante, d’autant que ce dernier lui a laissé des indices, glissés sur les pages d’un atlas des États-Unis…

Un roman dense, passionnant, où Erin Lange fait se rencontrer deux garçons que tout oppose, dans la construction d’une amitié compliquée, énervante, bruyante, étonnante et émouvante. Entre jeu de piste et chronique sociale, Erin Lange se fait la voix de ces deux jeunes aux tempéraments explosifs, dont l’absence de père les embarque jusque dans un road trip hasardeux. Des personnages très forts, tant dans leurs caractères (Dane violent et brutal, Billy malin et manipulateur) que dans leur faiblesses, les rendant parfaitement humains et attachants. C’est bien là la grande force de ce roman, entre violence et émotion, qui nous emmène bien loin de ce à quoi l’on peut s’attendre. Une histoire qui prend aux tripes, une amitié incroyable et puissante, un roman vraiment superbe à découvrir !

Ma dernière chance s’appelle Billy D., Erin Lange, traduit par Valérie Dayre (École des loisirs)
disponible depuis le 7 juin 2017
9782211231848 – 19€
à partir de 14 ans
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Les fragiles – Cécile Roumiguière

Si nous avons l’habitude de découvrir des auteurs dans la collection Exprim’ à travers des premiers romans, c’est cette fois une « déjà grande » qui rejoint le casting de Sarbacane avec un roman tragique, dont la très belle couverture tout en relief laisse planer une aura de mystère…

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Drew a 9 ans quand, au retour d’un match de handball, il assiste impuissant au racisme de son père. Choqué et incapable d’en parler, d’oublier, le garçon grandit dans la haine de ce père qui semble tout aussi incapable de l’aimer. Une haine qui le ronge, le consume, jusqu’à cette rencontre avec Sky, une fille incroyable qui cache aussi des fêlures, fragile comme lui…

Bob

★★★☆☆

Dans un incessant va et vient entre le passé et ce « jour J » aux accents terribles, Cécile Roumiguière explore la relation entre un père et un fils. Un jeune garçon qui voudrait plaire à son père, un homme qui ne semble pas avoir envie de l’aimer et dont la violence, le racisme, vont d’un seul coup transformer le désir d’affection en haine brûlante. Drew grandit, son père finit par s’éloigner, et il fait la rencontre de Sky lors de vacances à la mer. Une rencontre qui va donner un nouveau goût à sa vie, et ce malgré le passé qui refait surface régulièrement. La construction du récit et l’écriture de Cécile Roumiguière, aussi poétique que brutale, nous transporte dans ce roman bouleversant, où la fragilité de ses personnages nous prend aux tripes. Je regrette seulement la fin, qui, après toutes ces émotions intenses, enfonce encore plus le clou et nous laisse avec un goût amer, terrible. Dur !

Jean-Michel

★★★☆☆

On a du mal à croire à certains événements lors de la lecture tant ils sont violents. Certes, l’écriture parnassienne de Cécile Roumiguière adoucit l’animosité de ces scènes, mais l’impact de ce roman a été trop fort pour moi. Mes hormones d’ornithorynque ont peut-être joué mais mes pleurs découlant de cette lecture m’ont fait l’effet d’un coup de poing : cet Exprim sera difficile à conseiller. Pas accessible à tous les adolescents, mais nécessaire : pour ces images fortes du racisme, pour la violence d’un père sur sa famille, sur la difficulté de la construction de soi qui en découle. Dès le début, on sait que Drew a tué son père et tout au long du roman nous assistons à un tête-à-tête entre un fils révolté qui a commis l’irréparable et un père blotti dans son repos éternel tout confort alors qu’il mériterait d’entendre les paroles pleines de véracité de son enfant et pire encore. Pour moi, justice n’a pas été rendue et c’est ce qui m’a le plus scandalisé. Drew a tout de même sombré dans la démence la plus totale. Ce qui rend cette lecture psychotique. Un soupçon d’ambiance Shining flotte dans les pages : ce roman m’a effrayé. De qualité, mais ça retourne sacrément la tête !

Les fragiles, Cécile Roumiguière (Sarbacane)
collection Exprim’
disponible depuis le 6 avril 2016
9782848658629 – 15,50€
à partir de 14 ans
Discussion
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Mauvais fils – Raphaële Frier

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Ghislain est fils unique. Depuis toujours, ses parents se disputent. Dans ce climat, il ne parvient pas à leur dire qu’il est gay et il n’est même pas certain qu’ils apprécieraient cette révélation. Quand ses notes chutent, il se laisse entraîner par son père pour devenir électricien, un vrai métier d’homme. Mais bientôt, le secret de Ghislain est éventé et son père le met à la porte.

Dans les pensées de Bob

★★★☆☆

Un texte court et, comme toujours dans la collection Ego, percutant sur l’homosexualité. Ou, plutôt, sur la non-acceptation de l’orientation sexuelle d’un adolescent par ses parents. Et sur tous les clichés véhiculés par notre société sur ce qu’il est bien de faire pour un garçon (bidouiller l’électricité, c’est viril, une fille pourrait pas le faire) ou pour une fille (la cuisine, classique !). A ce sujet, les réflexions de Ghislain sont rapides mais très intéressantes.
Dans sa famille, il est clair que Ghislain ne trouve aucun soutien lorsque son secret éclate, ni même avant cela d’ailleurs. Une situation qui lui fait jusqu’à sentir que son homosexualité est honteuse, qu’il est dégoûtant. Des sentiments qui ne vont qu’envenimer la situation avec ses parents : son père qui va le virer sèchement de chez lui et sa mère qui pense que ce n’est qu’une passade, une sorte de maladie qui guérira avec le temps. Et malgré ses rencontres dans des bars gays, il se rend bien compte que ce n’est même pas l’acceptation de ce qu’il est qu’il recherche, mais tout bêtement l’amour. Grâce à son ami Mounir et sa rencontre avec Cédric, Ghislain va tout de même réussir à reprendre sa vie en main, même sans le soutien de ses parents. Pourtant, il ne peut s’empêcher de penser à eux…
Il y a beaucoup de rage dans ce roman, une colère qui habite Ghislain, et l’impasse qu’il trouve avec ses parents, notamment son père, est le cœur du livre. Le sujet est très bien abordé et vraiment intéressant. Je regrette simplement la fin très dure, abrupte, définitive. On se sent bien trop triste une fois la dernière page tournée…

Avec les mots de Jean-Michel

★★★☆☆

J’ai effectivement trouvé cette fin sombre 🙁 Peu d’espoir sur une réconciliation père/fils. Le père de Ghislain, en plus d’être phallocrate, est homophobe et « lopette » semble être son maître mot : les hommes sont au bricolage ce que les femmes sont aux casseroles. Il est vrai qu’avec une telle mentalité il est difficile d’imaginer une haute tolérance face à l’orientation sexuelle de son fils…mais tout de même : son fils unique ! On se dit à la lecture que la raison tôt ou tard prendra le pas sur la fierté, mais il n’en est rien. J’aime à penser que le temps pourrait faire son office et que ces deux hommes rétabliront le dialogue un jour. Malheureusement, la réalité est tout autre – même en 2015 – et c’est ce que Raphaële Frier nous montre. Elle nous raconte la vie tout simplement et quelque part c’est appréciable. Si elle nous avait ajouté une licorne sous la litanie « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants » nous aurions fait des bonds. Après avoir révélé son homosexualité à ses parents : cela peut se passer d’une manière aussi brutale. Mais malgré tout, Ghislain avance sans ses parents sans exclure la possibilité qu’un jour, son père puisse accepter qu’une « lopette » soit virile et que sa mère soit capable de prendre position et d’apprécier son bonheur.

Mauvais fils, Raphaële Frier (Talents Hauts)
collection Ego
disponible le 27 août 2015
9782362661310 – 7€
à partir de 14 ans

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Belle gueule de bois – Pierre Deschavannes

Pierre vit seul avec son père dans une maison perdue dans la forêt. Son père, alcoolique, fait peur et, parfois, lui fait honte. Pierre rêve de quitter cette vie et de découvrir le monde, mais l’amour qu’il porte pour son père est bien trop fort pour l’abandonner.

★★★☆☆

Un premier roman très personnel, qui explore une relation père-fils complexe, et un désir de liberté très fort. Le texte est poétique et les illustrations de l’auteur, brutes, voire brouillonnes, ajoutent une dimension contemplative, sensible, au récit.

Un texte qui ne devrait pas laisser indifférent, même s’il est difficile, tant l’histoire semble personnelle ou autobiographique, de vous dire clairement si j’ai aimé ou non. En tous cas, on ressort quelque peu chamboulé de cette lecture, de cet amour si fort entre un père et son fils, malgré les difficultés, l’alcoolisme du père et l’envie si forte du fils de ne pas s’enfermer dans sa vie actuelle… A découvrir !


Belle gueule de bois, Pierre Deschavannes
Editions du Rouergue, collection DoAdo
en librairie le 20 août
9782812606823 – 8€30
à partir de 15 ans