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De lune et de sang – Erin Beaty

Jeune orpheline au service du maître architecte du Sanctum, une immense cathédrale à la gloire de la Lumière, Catrin, grâce à sa dextérité et sa maîtrise de l’escalade, est chargée d’en inspecter les échafaudages et les éléments de construction, à la recherche de la moindre faille. Mais lors d’une nuit d’inspection, elle est victime d’une chute et d’étranges visions. Au même moment, une jeune femme est assassinée à quelques rues de là. Lorsqu’elle découvre ce meurtre sanglant, Catrin va être entraînée dans l’enquête, aux côtés de Simon, un étranger chargé de mener l’investigation.

Entre Jack l’Eventreur et les Piliers de la Terre, Erin Beaty nous propose un roman oscillant entre fantasy et thriller. Crimes, magie, maladie mentale et amour sont au programme de ce très dense pavé à la couverture envoûtante. Malgré quelques écueils habituels du roman young adult (les longueurs – ils doivent être obligés de ne jamais faire moins de 600 pages aux Etats-Unis !! – l’héroïne parfois agaçante et la romance un peu rapide), Erin Beaty parvient à mélanger toutes ses inspirations et ses thèmes dans une histoire qui tient plutôt bien la route. En premier lieu son univers de fantasy médiévale, qui n’est pas tant décrit que ça, et qui n’en a pas tellement besoin tant les images viennent tout de suite à l’esprit grâce à une écriture très visuelle. On prend également énormément de plaisir à découvrir progressivement la magie dont Cat semble être la détentrice, une magie liée aux effets de la Lune, astre honni par la population pour ce qu’il personnifie. Mais c’est surtout l’enquête policière qui va prendre le pas dans la vie de Catrin et dans notre intérêt de lecteur.rice, surtout quand les suspects se révèlent proches d’elle. Attention cependant à quelques scènes décrites de manière presque chirurgicale, et à la nature des meurtres, qui sont terrifiantes ! (On le réservera donc aux grands ados)

Mais au-delà de l’enquête, de la romance ou de la magie, De Lune et de sang interroge surtout notre relation à la maladie mentale. Plusieurs personnages y sont confrontés d’une manière ou d’une autre et l’autrice parle d’ailleurs à la fin du roman d’une ville belge, Geel, qui lui a inspiré une ville de son propre univers, celle dont l’enquêteur Simon est originaire, un refuge pour les malades.

Il s’agit du premier tome d’une duologie, mais l’enquête étant résolue à la fin, il peut tout à fait se suffire à lui-même.

De lune et de sang, t.1, Erin Beaty, traduit par Marie Kempf (Lumen)
disponible depuis le 19 janvier 2023
9782371023864 – 17€
à partir de 15 ans
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Magic Charly, t.3 – Justice soit faite ! – Audrey Alwett

Chers lecteurs,

Voici le final envoûtant de la série Magic Charly. Vous aviez lu mon enthousiasme lors de ma lecture du tome 1. Et bien, ce dernier tome est aussi EXTRAORDINAIRE que les deux précédents. C’est le cœur serré que j’ai fermé la dernière page de cette incroyable trilogie. Cette chronique est garantie sans aucun spoiler – c’est à peine si je vous raconte l’histoire en réalité, tellement j’ai aimé me replonger dans l’univers et l’inventivité de l’autrice, sans aucune attente.

Petit retour en arrière sur la fin du tome 2 et quelques mots sur le tome 3.

Dans le deuxième tome, Audrey Alwett nous laissait en plein cliffhanger. Nous terminions l’histoire avec le sinistre juge Dendelion devenant une allégorie de la Justice, l’Allégorie de la mort qui serait le frère de Sapotille et notre jeune Charly était passé dans un autre monde… De quoi ouvrir ce nouveau tome avec beaucoup d’attentes et de questions.

Dans ce troisième tome… Les pannes de magie se multiplient à Thadam. Sapotille et Césaria essayent de rallier les troupes pour préparer une attaque contre le juge. Pendant ce temps, Charly a retrouvé sa grand-mère et apprend à développer sa magie intuitive tout en cherchant un moyen de retourner dans son monde.

Mettez votre plus beau sapeur, prenez une pâtisserie de Dame Mélisse pour terminer cette trilogie en beauté ! Le merveilleux y est partout : magie, émotions, amour, amitié, concours de magie, humour, le tout avec les mêmes personnages truculents (à quand un livre sur Dame Carasse ?) qui évoluent pour notre plus grand plaisir. Vous ne pouvez pas rester indifférent à cette lecture, cette série mettra des étincelles dans votre coeur.

La magie ici est politique, au coeur d’une lutte de pouvoir, elle ne sauve personne. Elle n’empêche pas les larmes, les indignations et son lot de surprises ! Vous l’aurez compris, ce troisième tome est à la hauteur de toute la série. C’est un très beau voyage, une histoire humaine, bouleversante, qui invite à la réflexion (sur le pouvoir, le consentement..) tout en offrant des puissants moments d’émotions.

Vous aimez la magie ? Lisez cette série. Vous aimez Harry Potter ? Lisez cette série. Vous aimez Terry Pratchett ? Lisez cette série. Vous aimez lire ? Lisez cette série.

Magic Charly, t.3 – Justice soit faite !, Audrey Alwett,(Gallimard jeunesse)
disponible depuis le 3 novembre
9782075138383 – 17.50€
à partir de 12 ans
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Deux romances jeunesse pour l’été

❤ Votre romance, vous la voulez plutôt sanglante ou dansante ?

Anatomy : love story – Dana Schwartz

Bienvenue au 19ème siècle à Edimbourg. Hazel est une jeune aristocrate à l’avenir tout tracé. Promise à son cousin, son rôle est de se préparer à devenir une épouse dévouée. Mais du haut de ses 16 ans Hazel est plus intéressée par la médecine que par le mariage. Aspirante chirurgienne, elle décide de braver les interdits liés à son sexe et à sa classe sociale pour suivre en secret des cours d’anatomie. La ville entière d’Édimbourg est menacée par une maladie mortelle appelée la fièvre romaine et tout le monde la craint. Un autre fléau sévit : les voleurs de cadavres. Ils pillent les tombes pour vendre aux apprentis médecins et à l’université des dépouilles afin que les étudiants s’exercent.

Malheureusement, le subterfuge d’Hazel est rapidement mis à jour, son déguisement d’homme n’a pas trompé son entourage longtemps. Elle passe alors un marché avec le grand Dr Beecham : si elle réussie l’examen pour être médecin, l’université ouvrira ses portes aux femmes. Sauf qu’étant interdite de travaux pratiques, Hazel va vite se rendre compte qu’étudier les livres ne suffit pas – elle va avoir besoin de cadavres à disséquer.

La couverture est magnifique mais Lisette préfère vous avertir, ce n’est pas un roman d’amour. Cette fiction historique construite avec un soupçon de fantastique et d’amour reste chaste (malgré quelques baisers torrides dans un cimetière !)

Lisette vous mets en garde, en effet, la fin peut paraître un peu abrupte et change le ton du roman. Ce roman gothique est non seulement insolite mais aussi écrit dans un style intelligent, il dérange les codes. C’est une belle lecture dans laquelle on accompagne une héroïne téméraire et forte. Cette lecture est surprenante pourtant votre humble chroniqueuse est rarement surprise. 😉

Anatomy : love story,Dana Schwartz, traduit par Julie Lopez (Albin Michel)
disponible depuis le 1 juillet 2022
9782226472984 – 18,90€
à partir de 13 ans

Instructions for dancing

Evie ne croit plus en l’amour. Cette lycéenne, adepte des romances, a vu son monde s’écrouler le jour où elle a découvert que son père avait eu une liaison avant de quitter sa mère. Alors qu’elle va se débarrasser de sa bibliothèque de romans d’amour, elle rencontre une vieille dame qui lui offre un livre de danse. Quelque temps plus tard, Evie découvre qu’elle peut voir la vie amoureuses des couples qui s’embrassent… du premier baiser à la rupture.

En voulant comprendre d’où viennent ces visions, les pas d’Evie vont la conduire dans un studio de danse. Elle fera la rencontre d’X, qui deviendra son séduisant partenaire pour un concours. Oui, au bout d’une leçon, elle se retrouve à participer à un concours de danse- tout va très vite dans ce livre !

La danse et la musique sont des jolies couleurs de fond qui accompagnent Evie dans sa vie de lycéenne. Cependant, le roman se concentre principalement sur son quotidien avec son groupe d’amis, sa vie de famille, ses interrogations et sa dualité entre les sentiments qu’elle éprouve pour X, pour cet amour naissant et le remariage de son père.

Il faudrait aussi mentionner l’humour, les dialogues qui se dégustent comme des bonbons qui piquent, les personnages attachants… Evie et X : un duo qui va faire roucouler de nombreuses lectrices !

Ce livre est une romance qui se joue des romance ! Au programme : de la danse, un brin de fantasy et surtout beaucoup d’amour : amour familial, amical et amoureux. Ce livre est une comédie dramatique, ici on aime les histoires qui finissent mal, et qu’il est agréable d’être submergée par des émotions contradictoires.💃

Instructions for dancing, Nicola Yoon, traduit par Laurence Bouvard (Bayard)
disponible depuis le 8 juin 2022
9791036332746 – 17,90€
à partir de 12 ans
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Scarlett et Browne, t1 : Récits de leurs incroyables exploits et crimes – Jonathan Stroud

Scarlett sait que le secret d’une hors-la-loi, c’est sa rapidité. Voyager léger, n’avoir ni attache, ni allégeance. Elle pille une ville, passe à la suivante. Dans cette Angleterre post-apocalyptique tout a été anéanti par des catastrophes naturelles. La nature est peuplée de monstres mais les villes ne sont pas des endroits sécurisées pour autant. La rencontre avec l’étrange Albert Browne va changer le cours de l’existence de Scarlett… et la transformer en véritable course-poursuite.

Western sanglant, univers hostile, aventures prenantes, mystères, pouvoirs surnaturels… ce roman ne laisse absolument aucun répit ! Attention aux coeurs sensibles, certaines scènes (de manière très sporadique) sont dignes de scènes d’horreurs. Véritable page-turner ce roman de Jonathan Stroud, l’auteur de la Trilogie de Bartiméus et de Lockwood & Co, nous offre un premier tome très percutant ! Il s’agit d’une immense course poursuite, un concentré d’action, de combat, de vol à mains armée. Cependant, ce shot d’adrénaline interroge également sur la liberté, la sécurité et par dessus-tout la tolérance.

L’univers de ce roman se découvre petit à petit, au fil de l’avancé des personnages. L’auteur nous dévoilera les dangers, les lois qui peuplent ce nouveau monde, les religions qui s’y développent. Albert est à l’image de la découverte de ce royaume, il n’est pas aussi inoffensif qu’il n’y paraît au premier regard. Scarlett va vite découvrir que ce garçon naïf cache de sombres secrets qui mettent leurs vies en danger !

Ce duo improbable fonctionne très bien, et de nombreux mystères sur leurs passés et sur leurs personnalités restent à découvrir. On imagine Scarlett comme une jeune Calamity Jane, sans foi ni loi qui refuse de se plier aux règles d’une société arbitraire. Albert serait un mélange de Sheldon (Big Bang Theory) et de Eleven de Stranger things (mais j’en dis déjà trop…). J’espère que la suite des aventures sera centrée sur le développement des personnages plus que sur l’univers hostile.

Pour conclure, ce roman est une aventure explosive dans un monde combinant Far West et une Angleterre post-apocalyptique inondée. Une aventure palpitante dans un nouveau monde inventif qui s’adressera à des très bons lecteurs.

Scarlett et Browne, Tome 1 : récit de leurs incroyables exploits et crimes , Jonathan Stroud, traduit par Laetitia Devaux (Gallimard jeunesse)
disponible depuis le 1 avril 2022
9782075158992 – 17,50 €
à partir de 16 ans
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Grim, fils du marais – Gaël Aymon

Grim est un garçon muet qui a toujours vécu dans la dangereuse Forêt Mouvante. Après un terrible événement, il est contraint de fuir et découvre enfin le monde qui ne se limite pas à sa forêt. Il y découvre un système de castes, où chacun à son utilité – Nourrice, Construisant, Combattant ou encore Guérissant, Dame et Sieur, etc. Mais il se retrouve aussi bientôt mêlé à un vaste complot qui vise à renverser la Reine, leur mère à tous, et se lance avec de nombreux compagnons dans un périple pour la prévenir du danger qui la menace.

Quel univers ! Quel souffle et quel style ! Dès les premières pages de ce roman d’aventure singulier, oscillant entre fantasy et dystopie, on est complètement happé par le récit. Dans la peau et l’esprit de Grim, on découvre en même temps que lui ce monde étrange, construit autour d’une Reine toute-puissante qui a créé chaque être et leur a assigné des tâches précises et utiles au bon fonctionnement de leur civilisation et à la survie de l’humanité. Si l’univers présenté ressemble à ce que vous connaissez des sociétés de fourmis ou d’abeilles, ce n’est pas un hasard et l’analogie se dévoile tout le long du roman. Malgré le handicap de Grim, qui se trouve être bien gênant quand on veut comprendre, se faire comprendre et que l’on est détenteur de secrets, le garçon va s’attirer la protection et la sympathie de plusieurs personnages qui vont l’accompagner dans une quête aussi dangereuse qu’essentielle à la survie de tous ! Et, surtout, son regard neuf, voire naïf, sur le monde qu’il découvre sera le point de départ d’une réflexion juste et fascinante sur la notion de singularité et de collectif.

Car au-delà de l’aventure passionnante et haletante, le roman de Gaël Aymon est avant tout une magnifique réflexion sur la force de l’amitié. Qu’importe l’étrangeté de l’un, la différence de l’autre, l’important réside dans le respect et l’amitié que l’on porte à l’autre, l’acceptant dans son entier, avec ses qualités et ses défauts. Une notion simple et universelle qu’il n’est jamais inutile de rappeler… La singularité et la réussite de ce roman tient aussi au style, une écriture très visuelle qui éveille tout de suite notre imaginaire pour une immersion immédiate dans cet univers marécageux, et une voix curieuse qui se démarque, rappelant ce qu’a pu faire Patrick Ness dans Le chaos en marche. Elle est aussi dans la description de cet univers et de ces castes à la création et l’utilité aussi terribles que fascinantes, qui offre quelques bons moments de frissons et une certaine exigence qui provoque la réflexion. Enfin, les illustrations de Violaine Leroy qui accompagnent le récit. Toujours trop rares en littérature ado, elles apportent ici une vision de l’univers et son style au crayon et à l’encre adoucit l’âpreté du monde de Grim. Un roman palpitant et profond comme on les aime. Ne passez pas à côté ! ❤

Grim, fils du marais, Gaël Aymon, illustré par Violaine Leroy (Nathan)
disponible depuis le 9 septembre 2021
9782092492079 – 16,95€
à partir de 13 ans
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La vie invisible d’Addie Larue – V. E. Schwab

Née en France à la fin du XVIIe siècle, Adeline Larue doit épouser un homme qu’elle n’aime pas. Elle sait qu’elle ne connaîtra aucune liberté. Juste un lit conjugal, puis un lit de mort, peut-être un lit de bébé entre les deux. Tétanisée à l’idée de mourir sans avoir vécue, elle prie les anciens dieux, une énième fois pour la sauver et lui permettre d’être libre. Sauf qu’elle n’a pas suivie le conseil de son amie qu’il l’avait averti : il ne faut jamais prier les dieux à la nuit tombée ! Le jour de son mariage, Adeline va formuler le voeu d’obtenir davantage de temps et de liberté en scellant un pacte. Mais si elle obtient le droit de vivre éternellement, de garder sa jeunesse, personne ne pourra plus jamais se souvenir d’elle. La voilà condamnée à traverser les âges, comme un fantôme.

Be careful what you wish for disent les anglais, que l’on pourrait traduire par Méfiez-vous de vos rêves, ils pourraient se réaliser ! Bien mal en a pris à Adeline qui se retrouve certes libre mais oubliée de tous ! Dès que son interlocuteur disparaît de sa vue, il l’oublie, elle ne peut ni écrire, ni raconter son histoire – de toute façon qui la croirait ? Cette malédiction lui interdit d’avoir un travail ou même un lieu à elle. Malgré cela, Addie va survivre, traverser les siècles, l’Histoire, aller de rencontres en rencontres, toujours éphémères à travers le monde entier. Jusqu’au jour où, après trois cents ans de vie sur Terre, un libraire de New-York va lui dire cinq mots qui vont faire basculer sa vie : Je me souviens de toi.

La vie invisible d’Addie Larue est un roman captivant, extraordinaire qui se dévore ! L’autrice, des séries à succès Cassidy Blake et Shades of Magic, nous offre un roman plus personnel et touchant. Véritable tour de force narratif, les chapitres oscillent entre le passé d’Addie et sa vie à New-York. Même si certains rebondissement se devinent facilement, il y a de très beaux retournements…notamment la fin, que j’ai trouvé digne du talent de l’autrice.

Addie est un personnage féminin fort et fascinant qui va au fil des années créer une relation avec le démon, ce dernier étant fasciné par sa proie. Suivre cette relation en pointillé est un pur plaisir. Le ténébreux est un personnage dangereusement irrésistible qui ne désire qu’une chose : qu’Addie capitule et lui donne son âme, fatiguée de cette longue vie solitaire. Tous les personnages, même très secondaires, laissent une empreinte sur l’héroïne mais aussi sur nous. L’objet livre rend justice au texte, puisque la couverture représentant Addie est recouverte d’une jaquette en calque la laissant apparaître en transparence. Une très belle mise en abime de la fatalité d’Addie à disparaître…

Au-delà de la référence au pacte faustien, ce roman nous partage une très beau récit sur la mémoire, la transmission et la création. Est-ce que notre vie a de la valeur si nous ne laissons pas de trace sur Terre ? Est-ce que l’Art n’est pas la trace ultime de l’immortalité ?

La vie invisible d’Addie Larue,V.E. Schwab(Lumen)
disponible le 3 juin 2021
9782371023048 – 17€
à partir de 16 ans
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L’Infinuit, t.1 – Ross MacKenzie

Dans le Royaume d’Argent, les Sorciers sont détestés et traqués par Mme Hester, grande mage du pays. Pour les vaincre définitivement, elle a besoin du Dernier Sort qui lui permettra de contrôler l’Infinuit, une malédiction terrible capable de mettre fin à la vie entière. Mais ce sort est introuvable et l’impatience de Mme Hester grandit, quitte à mettre en péril tout le royaume… Dans la capitale, Larabelle, orpheline et glaneuse dans les égouts, pourrait bien se retrouver au cœur de cette guerre entre les Sorciers et Mme Hester…

Dans ce premier tome d’une nouvelle trilogie de fantasy sombre et passionnante, découvrez : une jeune orpheline débrouillarde et attachante au destin inattendu ; un djinn terrifiant ; une grande mage avide de pouvoir ; un petit glaneur plein de ressources et de bonté ; un jeune Mage Blanc privé de son âme et prisonnier d’une servitude qui se met à rêver de liberté ; et une Infinuit prête à prendre possession du monde entier si personne ne l’affronte… Et tout cela sans compter des alliés qui se révèleront ennemis ou inversement, des innocents contraints de rejoindre les rangs de la nuit et un combat pour l’égalité et l’acceptation de tous.

Si l’on retrouve tous les ingrédients d’un bon roman de fantasy classique, Ross MacKenzie nous propose ici une histoire bien plus sombre qu’habituellement pour le public visé. La violence du monde où vivent les personnages ne nous est pas épargnée, depuis les conditions de vie déplorables d’orphelins qui doivent survivre en glanant des objets perdus dans les égouts ou celle des Mages Blancs assujettis à la terrible Mme Hester à ce qui attend la population entière quand l’Infinuit est libérée de son sommeil millénaire. La magie du Royaume d’Argent, avec son petit côté steampunk où les sorts sont dans des fioles chargées dans le barillet d’une baguette-pistolet, peut être aussi magnifique qu’effrayante. Ainsi les personnages en seront-ils d’autant plus intéressants et profonds qu’ils seront soumis à des choix moraux tout au long de leur périple.

Ce premier tome de l’histoire de Larabelle est en tous cas un vrai page-turner, l’aventure et le danger nous attendant à toutes les pages et, chose assez rare, il peut se suffire à lui-même puisque l’intrigue principale trouve une conclusion tout à fait satisfaisante. Ou presque… Une série prometteuse, notre curiosité pour ce qui attend notre héroïne est piquée !

L’Infinuit, t.1, Ross MacKenzie, traduit par Marie Leymarie (Auzou)
disponible depuis le 21 janvier 2021
9782733885932 – 14,95€
à partir de 11 ans
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Les âmes croisées – Pierre Bottero

Nawel vit dans le royaume des douze cités. Elle est une riche héritière issue de la caste des Perles, noble et dominante. Dans cette société inégalitaire, comme ses amis Philla et Ergaïl, elle va devoir décider de la caste correspondant à ses aspirations profondes et ce choix déterminera la fonction qu’elle occupera jusqu’à la fin de ses jours. Pourtant quelques jours avant cette cérémonie, elle va provoquer une tragédie… Est-elle un monstre ? Jusqu’où la société la forge-t-elle ? Nawel va se rendre compte que toute sa vie est planifiée et va s’interroger sur la voie qu’elle doit suivre…

Dès le début du livre, le tempérament suffisant de Nawel est très antipathique. Elle a un caractère strict, prétentieux et froid. Tellement assurée de sa posture de Perle que lorsqu’une Cendre, une moins que rien dans cette société, la bouscule, Nawel demande à ce qu’elle soit fouettée, ce qui provoquera sa mort… Suite à cet accident, Nawel va découvrir la vérité sur le fonctionnement de sa famille, ce que sont capables de faire ses proches et à quel point elle a été manipulée, comme ses amis, pour choisir sa caste. Son statut de puissante Perle va être mis à l’épreuve… puisque Nawel va décider d’aller à l’encontre de son choix initial et familial et va demander d’intégrer une caste très particulière…celle des Armures.

Outre le monde incroyable dans lequel l’auteur nous plonge – dont je parlerai d’ici quelques lignes – le plus intéressant à mes yeux dans ce roman est l’évolution du personnage de Nawel, très complexe. En même temps qu’elle se découvre elle-même, en cherchant le sens qu’elle veut donner à sa vie, son caractère change. Et la magie opère, on se prend d’amitié pour elle, on s’attache. Ces deux amis Philla et Ergaïl sont des personnages très secondaires à mes yeux qui ne sont présents que pour mettre en avant les réflexions profondes de Nawel sur le destin et la responsabilité, l’ambition et la sincérité.

Mais attention, ne croyez pas qu’il s’agit d’un livre avec beaucoup d’introspection. Les batailles, les retournements, les dangers se glissent dans les chapitres très courts qui rythment le roman. (Vous savez le genre de chapitre où on se dit « plus qu’un »… et on termine le livre finalement). L’univers est très riche et original avec son système de société, ses peuples et son bestiaire. L’auteur nous offre un univers foisonnant, que l’on prend plaisir à parcourir. Cette construction du monde fantastique est remarquable, comme on peut s’y attendre quand on connaît les merveilleuses séries de l’auteur. Note pour les fans : ce livre est également lié aux autres trilogies notamment à L’Autre. Malheureusement, beaucoup de questions restent en suspension dans cette aventure, puisqu’il s’agit d’un premier tome d’une trilogie qui ne sera jamais finie puisque Pierre Bottero est décédé avant.

Les âmes croisées, dont on ne découvrira le sens du titre que tardivement dans le roman, a été réédité cette année par les éditions Rageot en version poche afin de permettre à un jeune lectorat de le redécouvrir. C’est un réel plaisir de retrouver la plume très poétique de Pierre Bottero, qui est aussi acérée et tranchante quand il le faut : « Vivre, c’est se mettre en danger, réalisa-t-elle de la même façon qu’apprendre à marcher, c’est d’abord accepter l’idée de tomber. » La qualité du papier et la magnifique couverture, réalisée par Noëmie Chevalier, est à la hauteur de cette quête, pleine de rebondissements et de la plume de son auteur, immortelle.

Les âmes croisées, Pierre Bottero (Rageot)
disponible depuis le 10 février 2021
9782700274295 – 8,20€
à partir de 12 ans
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La ville sans vent – Éléonore Devillepoix

A Hyperborée, Lastyanax vient de terminer sa formation de mage. S’il a des ambitions, il ne s’attendait pas à devenir Ministre du Nivellement à 19 ans seulement, suite à la mort mystérieuse de son mentor… Alors qu’il prend ses fonctions, son chemin croise celui d’Arka, une gamine débarquée de loin qui a tendance à provoquer des situations malencontreuses dans sa recherche d’un père qu’elle n’a jamais connu. Tous deux vont devoir apprendre à s’apprivoiser pour déjouer les nombreux complots qui menacent la ville.

Car à Hyperborée, cité construite sur plusieurs niveaux et protégée d’un dôme magique – d’où son surnom de « ville sans vent » – la politique est un art qui se joue habilement et sournoisement. Si l’essentiel de l’action se déroule dans la ville, il est également question des autres cités de ce monde aux inspirations diverses, entre mythologie grecque et fantasy médiévale. Et Hyperborée est d’ailleurs un personnage clé, tout autant que Lastyanax ou Arka. Sa construction complexe et étonnante, basée bien évidemment sur ceux qui ont le pouvoir et ceux qui ne l’ont pas, en fait le terrain de jeu parfait pour des intrigues tantôt mystérieuses et retorses, tantôt drôles et improbables. C’est d’ailleurs toute la force de ce premier roman d’Eléonore Devillepoix de proposer un roman de fantasy qui mêle habilement une intrigue politique passionnante à des personnages et des situations bourrés d’humour. Certains éléments m’ont d’ailleurs fait penser au fameux Disque-Monde de Terry Pratchett (les mages, même s’ils sont tout de même moins bras-cassés, les tortues qui ont un usage pas si éloigné de la Grande A’Tuin…). Bref, un univers riche, que l’on découvre au fur et à mesure des conflits qui se jouent, ou du passé d’Arka qui se révèle, et qui sera sans aucun doute exploré dans le deuxième tome de ce diptyque.

Mais le cœur de ce roman, ce sont aussi ses personnages. La ville, bien sûr, mais également Lastyanax et Arka. Si l’on ne se passionne pas tout de suite pour le mage, plutôt antipathique au début, on soutient tout de suite la quête d’Arka, son caractère aventureux et déterminé, son passé tout en mystères. La relation entre les deux va se mettre en place avec méfiance mais promet un très chouette développement qui change des codes du genre. Les dialogues sont savoureux, à l’image de ce duo que tout semble opposer. Comme dans toute bonne fantasy, nos héros ne sont pas seuls et un grand nombre de personnages gravitent autour d’eux. Si certains sont un peu trop en retrait (coup de cœur pour Pyrrha qu’on aimerait bien découvrir plus), d’autres apparaissent volontairement très peu de fois pour des ressorts comiques plutôt bien vus ! Mais tous apportent une densité à l’univers et à l’attachement que l’on porte à nos deux héros.

Bref, le plaisir de lecture est clairement là, on est dans une fantasy de qualité, un univers, des personnages et une intrigue qui nous embarquent dès les premières pages. Et que dire de cette magnifique couverture toute en dorures ! J’ai en tous cas bien hâte de découvrir la suite et fin de cette histoire captivante !

La ville sans vent, Éléonore Devillepoix (Hachette)
disponible depuis le 3 juin 2020
9782017108443 – 18€
à partir de 13 ans
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La fille qui pouvait voler – Victoria Forester

Les McNimbus sont une famille très traditionnelle. Betty est une fervente croyante qui pense que si les choses arrivent c’est de la faute à la Providence et son mari Joe est un mari discret, qui s’occupe beaucoup de la ferme dans laquelle ils vivent. Toutes les années pour ce couple se ressemblent jusqu’à l’arrivée très tardive d’un bébé : Piper. Elle arrive après 25 années de mariage. Imaginez ! Avec une arrivée aussi inattendue, comment cet enfant pourrait-elle être autrement que bizarre ?
Dès son berceau, Piper flotte dans les airs… et en grandissant (malgré les prières enfiévrées de sa mère pour que sa fille soit normale) va développer son don jusqu’à voler littéralement dans le ciel. Terrifiés de voir la nouvelle de cette anomalie se répandre, les parents essayent de dissimuler ses talents aux yeux du monde… sauf que ce pouvoir ne passe pas inaperçu. Du jour au lendemain, Piper qui n’a jamais été à l’école, n’a jamais eu d’amis, va se retrouver dans une école top secrète réservée aux enfants dotés de capacités hors du commun. Malheureusement l’école ne sera pas de tout repos pour Piper qui va devoir gagner sa place !

Piper est une héroïne terriblement attachante. Lumineuse, curieuse, naïve elle n’est pas sans rappeler l’héroïne Pollyanna de Eleanor H. Porter, un modèle d’optimisme. Les jeunes lecteurs prendront beaucoup de plaisir à découvrir l’école à travers son regard naïf, ses observations, son envie irrésistible de se lier d’amitié. Nous sommes très loin d’Harry Potter ou d’X-men ici. Les personnages secondaires, à savoir les élèves sont originaux, nous avons par exemple Conrad, un génie qui terrorise les plus jeunes, Bella Bonheur (la préférée de Lisette) qui a un don avec les couleurs, des jumeaux qui peuvent contrôler la météo ou encore Violette qui peut rapetisser à volonté.

L’intrigue est assez évidente mais comprend des trouvailles très originales. Je trouve cependant que parfois le rythme pourrait être plus effréné encore, il y a des longueurs au début notamment. L’autrice a eu le volonté première d’écrire cette histoire sous forme de scénario pour le grand écran et ensuite l’a adapté en roman (les petits incohérences de rythmes viennent peut-être de là). Même si ce roman se présente comme une saga (avec une suite donc?), je trouve que ce premier tome ne nous laisse pas sur notre faim et se suffit à lui-même. Un chouette roman pour les enfants qui parfois rêvent d’aller toucher les nuages !

La fille qui pouvait voler, Victoria Forester (Lumen)
disponible depuis le 19 mars 2020
9782371022683 – 16€
à partir de 10 ans