4

Embardée – Christophe Léon

embardeeGeorge et Phil habitent à Paris, ce sont des plasticiens reconnus, d’excellents artistes. Ils sont également mariés et heureux papas de Gabrielle, qui a maintenant 13 ans. Leur bonheur est sans équivoque. L’histoire devient moins douce lorsque Christophe Léon nous entraîne dans un futur sombre où les bouleversements les plus cauchemardesques transforment la vie paisible d’une famille homoparentale en quotidien violent où l’intolérance est maîtresse de la rue. Cette histoire ne vous rappelle rien ? Un passé pas si lointain…la discrimination, les interdictions, les losanges roses à porter sur son torse.

★★★★★

Un énorme coup de cœur pour ce roman

Tout commence par un accident : la voiture a fait une « embardée ». Personne ne porte secours aux deux pères ; « la loi interdisant de porter secours à ces gens-là ». Le losange rose cousu sur leurs poitrines rappelant aux témoins qu’ils sont « différents ». Condamnés à vivre dans un ghetto avec les autres losanges roses, ils sont bannis et fichés. Leurs droits ont été proscrits : plus d’union en mairie, plus le droit d’adopter d’enfants, plus de défilés mais en dépit de cette société à vomir George et Phil s’aiment plus que tout et inculque à leur fille le mode de survie. Les injustices répétées dans ce roman m’ont rapidement fait mal au cœur. Nous apprenons à un passage que Gabrielle est somalienne et elle se fait traiter de « négresse » dans la cour de l’école. Une scène étrange pour la fillette car son environnement familial était jusque là dépourvu de tout racisme. Mais George et Phil arrivent à tout arranger à chaque agression ce qui nous rend le sourire. Ce roman pousse à la réflexion : et si tout cela arrivait ? L’alternative que propose Christophe Léon n’est pas impossible, le roman est d’ailleurs très crédible. Le schéma de la famille traditionnelle n’est pas remis en cause : un papa + une maman = enfant épanoui. Pourquoi pas. Mais l’auteur nous montre que deux papas peuvent rendre également un enfant heureux. Par ailleurs Gabrielle est traumatisée par toutes les violences extérieures dont elle est le témoin et parfois la victime et non pas par le fait d’être élevée par deux hommes. D’ailleurs l’amour qu’ils se portent est exemplaire et rend leur foyer chaleureux. N’importe quel enfant rêverait de grandir dans une famille comme la leur.

Il y a un élément dans le roman que je n’arrive pas à me sortir de la tête : Christophe Léon fait mention d’un groupe que je qualifierai de terrifiant. La LVF : Ligue pour les Valeurs Familiales qui milite pour l’internement psychiatrique des losanges roses. Actuellement, il existe des gens persuadés que l’homosexualité est une maladie.

Ce roman est brillant, il ouvre l’esprit.

Embardée, Christophe Léon (La Joie de lire)
collection Encrage
en librairie depuis le 19 mars 2015
9782889082667 – 13€
à partir de 12 ans

Son
2

La fille qui avait deux ombres – Sigrid Baffert

9782211217385,0-2552598

En ce moment, Bob lit beaucoup de romans pour les grands et, jusqu’à présent, il n’a pas été déçu ! La fille qui avait deux ombres en fait partie et c’est avec beaucoup de plaisir et d’enthousiasme qu’il vous parle de ce superbe roman. 🙂 C’est parti !

Chaque matin, au réveil, Élisa s’attend à retrouver la maison à l’envers, les meubles déplacés, les placards chahutés ou encore la baignoire remplie à ras bord, comme c’est arrivé la nuit dernière. Pour Élisa, c’est sa grand-mère Rose qui est responsable de ce grand bazar. Car Rose fait des choses absurdes depuis quelque temps, comme ce rendez-vous pris chez un chirurgien esthétique pour changer de tête. À son âge ! Est-ce qu’elle ne serait pas plutôt en train de la perdre ? Obsédée par cette idée, Élisa se met à faire des rêves étranges, à ressentir des sensations bizarres. Elle est hantée par une ombre. Une ombre de trop. Alors, qui est la plus perturbée dans cette histoire, Rose ou Élisa ?

★★★★★

Je vous ai mis le résumé de l’École des loisirs car je trouve qu’il reflète très bien l’espèce d’étrangeté qui se dégage au début du roman. En effet, on découvre Élisa et sa grand-mère qui agit bizarrement, les rêves de la jeune fille qui nous semblent fantastiques… Mais point d’extraordinaire dans ce roman, car nous sommes bien dans la vie réelle et La fille qui avait deux ombres s’attache à la relation entre une grand-mère et sa petite-fille et aux secrets de famille. Car Rose est une immigrée sicilienne qui, depuis qu’elle est installée en France, n’a jamais parlé de son passé. Personne ne le connaît, pas même Maud, la mère d’Élisa, qui entretient depuis toujours une relation conflictuelle avec Rose. Et les choses ne se sont pas arrangées quand la famille d’Élisa est venue s’installer à la ferme des grands-parents. Si la jeune fille ne vit pas encore trop mal cette situation, quand Rose décide de changer de tête, tout est chamboulé !
Les secrets de famille et la construction identitaire n’ont rien d’originaux dans la littérature, mais Sigrid Baffert parvient à nous happer dans son histoire dès les premières pages. J’ai adoré son écriture, délicate mais aussi pleine d’humour et de légèreté. Élisa est une héroïne attachante, à la fois adolescente bouillonnante et jeune fille hypersensible. J’ai aussi beaucoup aimé sa famille, dont les membres sont tous plus originaux les uns que les autres (avec un gros coup de cœur pour Jules) et le lieu, un brin enchanteur, dans lequel vit tout ce beau monde. La brasserie familiale, la Ruche (la chambre d’Élisa au grenier où s’entassent nombre d’objets hétéroclites et où elle passe des heures à rêver à l’aide de son théâtre de marionnettes), la Sicile, tant de lieux qui apportent cette touche de fantaisie, parfois de magie, à cette magnifique et passionnante histoire de famille, et plus particulièrement de femmes. Un superbe roman, et encore un nouveau coup de cœur pour Bob et Jean-Michel ! 😀

La fille qui avait deux ombres, Sigrid Baffert (École des Loisirs)
collection Médium
en librairie depuis le 11 mars 2015
9782211217385 – 15,80 €
à partir de 13 ans

0

Le bonheur de A à Z – Barry Jonsberg

Nous vous présentons Candice Phee : 12 ans, hilarante, honnête et légèrement bizarre. Elle a les meilleures intentions du monde, un grand cœur et une détermination sans faille pour s’assurer tout le monde soit heureux. Cela représente tout de même une sacrée tâche vu la population existante alors pour commencer elle va essayer de réparer tous les problèmes de toutes les personnes et les animaux qu’elle aime dans sa vie.

★★★★☆

bonheuraàzCe livre est un concentré de bonne humeur ! Tout est focalisé sur les bonnes choses, clairement le but de l’auteur est de nous faire ressentir un peu de chaleur. Après la mort de sa petite sœur, la dépression de sa maman, son père qui ne se présente à table que si le dîner est prêt et son meilleur ami Douglas qui croit qu’il vient littéralement d’une autre planète après un accident : Candice apparaît comme une petite créature conçue pour rendre ces gens plus heureux. Elle est inadaptée, douce et drôle et m’a fait rire à plusieurs reprises au cours de ma lecture. Candice sait qu’elle est différente mais accepte et apprécie son individualité et celle de sa famille et amis. Le spectre de l’autisme plane autour d’elle mais clairement sa vision du monde est ce qu’il y a de plus honnête et rafraîchissante. Un conte délicieux sur l’importance de son propre entourage, de la guérison et du soutien, sur l’acceptation de soi et de l’exemple à donner aux autres. Un roman qui regorge de personnages uniques ! Tout adolescent mérite d’avoir une BFF comme Candice : elle rend une journée ordinaire mémorable. Ce roman est d’un optimisme inoubliable.

Quand Le bizarre incident du chien dans la nuit rencontre Little Miss Sunshine cela donne Le bonheur de A à Z.

Le bonheur de A à Z, Barry Jonsberg (Flammarion)
collection Tribal
en librairie depuis le 25 mars 2015
9782081308640 – 12.50€
à partir de 12 ans

Son
0

Tornade – Jennifer Brown

9782226315380,0-2581018

Après vous avoir emmené sous le soleil mexicain, Bob vous fait cette fois découvrir le Missouri et ses tornades ! Et là, inutile d’emporter votre crème solaire car elle ne vous sauvera pas la vie… (Avouez qu’avec cette optimiste introduction, ça vous donne envie de lire la suite !)

Aujourd’hui est un jour comme les autres pour Jersey. Sa mère et sa petite sœur fantasque partent pour le cours de danse et Jersey doit s’occuper de corvées diverses. Mais le temps est exécrable et, dans le Missouri, on y est plutôt habitué. Sauf qu’en peu de temps, tout bascule et une tornade d’une violence exceptionnelle dévaste tout sur son passage. Réfugiée dans son sous-sol, Jersey en ressort presque indemne. Mais dehors, c’est une vision de cauchemar qui l’attend…et sa famille n’est pas là…

★★★★★

Quel roman ! Je me suis laissée transporter dans cette histoire et ce Missouri en proie aux phénomènes météorologiques en seulement quelques pages et je gage que ce sera la même chose pour vous ! 😛 Il faut dire que l’histoire commence directement avec la tornade et les dégâts terribles qu’elle cause. Mais le véritable intérêt va résider dans la façon dont Jersey va gérer cette situation et son futur. Car, on s’en doute assez rapidement, il va être très dur pour Jersey de retrouver sa famille et de continuer à vivre dans sa maison désormais détruite. Mais, en fait, je n’ai pas tellement envie de vous en dire plus sur ce qui se passe, car ce serait réellement gâcher l’angoisse que l’on ressent au fur et à mesure de la lecture… (Ahah, Bob n’est pas très sympa !)
Ce que je peux vous dire sans dévoiler l’intrigue (quand même !), c’est que nous allons suivre Jersey dans sa difficile reconstruction, sa découverte également de sa famille (on apprend très vite que sa mère a quitté son père quand elle était toute petite et qu’elle a également coupé les ponts avec ses propres parents). Et cette dernière partie est vraiment très intéressante car il y a en réalité beaucoup de secrets et de non-dits dans cette famille, ce qui va compliquer considérablement les choses pour la jeune fille, qui va se sentir très seule…
Tornade est tout simplement un roman prenant ! Le personnage de Jersey et l’écriture de Jennifer Brown sont d’une grande justesse : la description des sentiments, les moyens que trouve Jersey pour faire son deuil, ses croyances ou ses espérances qui s’effondrent. Il y a des scènes émotionnelles très fortes qui ne tombent pourtant jamais dans le larmoyant ou dans l’horreur. Tout est délicat et authentique. C’est le genre d’histoire qui vous reste à l’esprit un certain temps et que l’on quitte avec regret mais aussi avec un bel espoir, comme la fin le laisse présager. 🙂
Un très beau roman et un nouveau coup de cœur pour Bob et Jean-Michel !

Tornade, Jennifer Brown (Albin Michel Jeunesse)
collection Wiz
en librairie le 1er avril 2015
9782226315380 – 14,90 €
à partir de 13 ans

Son
4

Le trésor américain – Chris Donner

9782211217019,0-2552601

Aujourd’hui, il fait un soleil digne du Mexique (Bob trouve, en tous cas) et ça tombe bien car c’est là-bas qu’on vous emmène ! 😀 En 1997 paraissait Le trésor de Moctezuma, de Chris Donner et, cette année, le texte retrouve une deuxième vie dans Le trésor américain que vous présente Bob aujourd’hui. Par contre, je n’ai pas réussi à savoir dans quelle mesure il s’agit d’une simple réédition ou d’une réécriture du texte (je n’avais pas lu le premier donc si c’est votre cas, n’hésitez pas à intervenir). Mais peu importe, finalement, car c’est un très chouette livre ! 😉

Le célèbre archéologue Octavio Palissander arrive dans un petit village du sud du Mexique, à la recherche d’un parchemin malmèque, qui apporterait la preuve de l’existence d’une antique civilisation précolombienne. Mais il n’est pas le premier à être passé là et, avec l’aide de Moctezuma, jeune garçon intrépide, il va affronter mille dangers pour élucider ce mystère…

★★★★☆

Comme Bob, vous êtes fan d’Indiana Jones et de Lara Croft ? Vous vous êtes rêvés aventuriers et explorateurs ? Eh bien ce livre est fait pour vous ! Ou presque, car Octavio Palissander ne manie pas aussi bien le fouet qu’Indiana et s’appuie plutôt sur une canne ayant apparemment appartenu à Champollion. Mais qu’importe que notre aventurier ait 77 ans et les genoux qui craquent car l’aventure est bel et bien au rendez-vous dans ce petit roman qui fait également la part belle à l’humour. Car notre professeur semble également avoir une passion pour la déformation de la réalité, ce qui ne gêne pas trop le jeune Moctezuma, trop heureux de se lancer dans une expédition. De toute manière, Moctezuma est lui aussi un personnage à part, il conduit des jeeps du haut de son mètre cinquante, et sait comment mener son monde par la bout du nez. Bref, deux personnages hauts en couleur lancés sur un trésor, de quoi donner envie, non ?
En tous cas, Chris Donner réussit à nous parler de plein de choses : des difficultés de la recherche scientifique, de la politique étrangère du Mexique (eh ouais !), de catastrophes naturelles, de la découverte de l’Amérique, de conspirations…avec beaucoup de talent ! Le trésor américain est tout bonnement passionnant ! Lu d’une traite, avec pas mal de sourires en coin et des étoiles dans les yeux, je me suis dit que, quand même, je regrette bien de ne pas avoir fait archéologue quand je suis devenue grande. A mettre dans les mains de tous les aventuriers en herbe ! 🙂

Le trésor américain, Chris Donner (Ecole des loisirs)
collection Neuf
en librairie le 25 mars 2015
9782211217019 – 8,50 €
à partir de 9 ans

Discussion
4

And the winners are…

Vous avez été très nombreux à participer au concours de Dolorès Wilson et nous avons été agréablement surprises par vos commentaires aussi drôles qu’adorables ! Vous manipulez le « KIPU » avec autant de grâce que Bob à un cours de danse classique. Que de créativité ! 🙂

bandedolores

La bande de Dolorès, c’est comme la bande à Gabin

Il y avait tellement de participants qu’on s’est dit qu’il serait dommage de ne pas vous faire gagner plus. Donc avec la gentillesse de Brune des Fourmis Rouges, nous avons ajouté 2 gagnants.

LES PETITS CHANCEUX SONT…
Lili 1er prix – les 5 tomes de la série
Boniface 2e prix – le tome 5
Sweet 3e prix – le tome 5
Pauline 4e prix – une pochette surprise
Joanie 5e prix – une pochette surprise

Un petit florilège de commentaires parce que tout de même, on a bien ri :

Je suis la princesse aux prouts KIPU, n’est-ce pas mon amoureux ?
Mon amoureux ?
Oups…
Signé : La princesse KIPUlvérise les princes. Sweet

Le HusKIPU du pôpole. Minos

Qui se fait piquer par le cupidon KIPU pars dare-dare se parfumer l’écoeur aveuglé. Gonzalez

Merci à tous les participants, ce fût une joie de faire ce concours. Un tas de bisous aux filles des Fourmis Rouges.

Son
0

Comment nous sommes allés sur la Lune – Pénélope Jossen

9782211223102,0-2552988

Il paraît qu’en ce moment, il y a une éclipse partielle de Soleil. Depuis sa Normandie, Bob n’a rien remarqué si ce n’est qu’il fait très gris… Mais bon, à la place, Bob vous propose de découvrir un album qui se trouve dans le sujet… ou presque, et a décidé de vous embarquer pour un voyage sur la Lune. C’est encore mieux, non ? 😀

En 1969, trois astronautes américains parcourent en fusée la distance qui sépare la Terre de la Lune et posent le pied sur cette dernière. Une première pour l’humanité !

★★★★☆

Cet album de Pénélope Jossen (dont j’avais adoré La panthère noire) nous raconte ainsi le périple de Neil Armtrong, Buzz Aldrin et Michael Collins, les trois astronautes de la mission Apollo XI. Et elle le fait avec une très belle simplicité, étape par étape, depuis le moment où les astronautes montent dans la fusée à celui où ils reviennent sur Terre. On découvre ainsi tous les moments qui ont permis aux astronautes de se poser sur la Lune, le rôle de chacun, comment la mission s’est déroulée, etc. En plus de raconter une histoire, Pénélope Jossen donne à son album une vertu documentaire en nous racontant aussi l’Histoire, pour le plus grand plaisir de ceux qui n’étaient pas encore nés pour y assister.

Schermata 2015-03-13 alle 18.37.46

J’ai beaucoup aimé cet album, tout simple et en même temps très complet. Les illustrations de Pénélope Jossen sont magnifiques, elle ne s’embarrasse pas de descriptions techniques très précises et privilégie plutôt le rêve et la « magie » de ce moment historique pour l’homme. Du moins est-ce ainsi que je l’ai ressenti, et je pense que les petits amoureux de l’espace seront tout aussi conquis par ce très bel album. 🙂

Comment nous sommes allés sur la Lune, Pénélope Jossen (Ecole des loisirs)
en librairie depuis le 18 mars 2015
9782211223102 – 12,70 €
à partir de 5 ans

Son
1

Le choix de Bérénice – Fabien Clavel

9782700246544,0-2506046

Hier, Rageot a lancé une nouvelle collection : In love. Destinée aux adolescents, elle propose des romans d’amour librement adaptés de classiques de la littérature. Et là, exit les romances mêlées de fantastique ou de créatures étranges, ce sont des romans d’amour « à l’ancienne », si j’ose dire. Le choix de Bérénice, écrit par Fabien Clavel (que je connais surtout par ses romans de fantasy), fait partie des trois premiers titres de la collection. Le pari est-il réussi ?

Arslan rencontre Bérénice lors des vacances d’été et tombe instantanément amoureux d’elle. Mais celle-ci est sous le charme de Titus, futur héritier du plus grand empire financier au monde. Lorsque Titus demande à Bérénice de l’accompagner aux États-Unis, elle ne peut se résoudre à partir sans Arslan, devenu ami du couple. Comment se dernier parviendra-t-il à dissimuler son amour pour Bérénice ?

★★★☆☆

Pour cette histoire, Fabien Clavel s’inspire de la tragédie de Racine, sobrement intitulée Bérénice. L’auteur explique qu’il a choisi cette histoire car elle l’a beaucoup touché et parce qu’il s’agissait d’une des rares tragédies où il n’y a pas de mort… On passe donc ainsi de la pièce de théâtre au roman, ce qui se ressent beaucoup dans l’écriture et plus particulièrement dans les dialogues. C’est étonnant, mais pas déplaisant. Je ne sais pas si vous avez vu le film Beaucoup de bruit pour rien, de Joss Whedon (adaptation modernisée de la pièce de Shakespeare, où tout se déroule aux États-Unis, à notre époque, mais en gardant le texte original), car j’ai trouvé que le procédé était très similaire et donnait la même impression. A la place de la Rome antique, Fabien Clavel a transposé son action aux États-Unis, dans la ville de Rome (Géorgie), où le campus remplace le palais. Et au lieu d’être rois et princesses, les personnages principaux sont tous héritiers de multinationales diverses. Mais pour ceux qui connaissent la pièce de Racine, l’intrigue est la même, et vous n’aurez pas de surprise. Pour les autres, cette lecture vous donnera probablement envie de découvrir l’œuvre originale (cela a été mon cas, je ne connaissais pas cette tragédie-là de Racine). 🙂 Mais ne vous inquiétez pas, les thématiques soulevées sont très contemporaines et se prêtent très bien à une adaptation à notre époque : les différences de classes sociales, la réussite, les traditions, le triangle amoureux… Et l’amour, bien sûr. Le roman fonctionne bien, et puis ça change de lire des histoires d’amour qui n’impliquent pas des créatures surnaturelles ou des humains surpuissants, ou dans un contexte post-apocalyptique terrible. Ou à l’hôpital. 😛
Maintenant, je serais curieuse de connaître le ressenti des lecteurs ciblés par cette nouvelle collection. Je ne sais pas comment sont traités les autres romans, mais j’ai tout de même un doute sur l’appréciation de ce texte par les ados de 14 ans et plus (tranche d’âge ciblée). L’écriture n’est pas très difficile, elle est efficace, et le texte, court et très romantique, sera sûrement plus recherché et apprécié de lecteurs un poil plus jeunes. J’attends vos retour là-dessus !

A noter : le travail de Rageot sur la maquette, qui est très aérée et qui propose un rabat vers l’intérieur, servant aussi bien de marque-page que donnant l’impression d’ouvrir un livre rempli de quelques secrets… De quoi donner envie de lire à l’intérieur, non ? 🙂

Le choix de Bérénice, Fabien Clavel (Rageot)
collection In Love
en librairie depuis le 18 mars 2015
9782700246544 – 10,50 €
à partir de 12 ans

2

Plus de morts que de vivants – Guillaume Guéraud

plusmortsvivantsPour commencer cet article je ne peux que vous encourager à lire en guise d’amuse-bouche livresque l’extraordinaire Je mourrai pas gibier, vous ne serez plus jamais la même personne après sa lecture. Lire Guillaume Guéraud c’est comme se livrer à une expérience hors du commun : c’est le Bear Grylls de l’écriture, le Robert Rodriguez du verbe, le Jude Law des auteurs. Plus de morts que de vivants se lit d’une traite : efficace et terrifiant c’est un vortex de l’angoisse et on en réclamerait bien encore quelques pages si les doses d’adrénaline et de stupéfaction n’étaient pas déjà à leur maximum.

★★★★★

Par un matin glacial de février, quelques collégiens se retrouvent devant leur établissement scolaire, attendant le début des cours. Une grippe circule en ce moment, la plupart sont cloués au lit avant les vacances de février mais d’autres n’auront pas cette chance…Soudain les incidents se succèdent dans l’établissement : un élève saigne du nez plus que la normale, une autre a les lèvres bien bleues, une touffe de cheveux tombe à terre, des boutons apparaissent et puis tout va très vite : virus de la mort ? Qui sera le prochain a être touché ? Qui s’en sortira vivant ? Qui est l’incubateur ?

Curieusement je m’attendais à lire une histoire de morts-vivants mais tout fut plus réaliste et terre-à-terre que je ne le pensais. Comme je l’ai dit au guide du Musée de la Torture à Amsterdam à la fin de la visite : « c’était délicieusement atroce ». Ce roman est tout aussi captivant qu’un bon film d’horreur. Guillaume Guéraud possède ce talent : celui de ne pas rentrer dans des descriptions trop alambiquées et donc à être concis en nous laissant avec LE détail qui va nous perturber et faire travailler notre imagination. Nos peurs sont travaillées au corps : la peur de mourir, celle de perdre l’être aimé, sentir l’odeur des morts, se rendre compte que l’instinct de survie ne suffit plus pour rester vivant. Ce virus provoque des morts auxquelles on s’attend le moins et l’effet de surprise agrippe à la gorge : il devient difficile de déglutir lorsqu’on a la vision d’un cou qui s’ouvre en deux, d’un ventre qui explose littéralement, de dents qui se déchaussent ou de débris d’os qui se mêlent au sang.

Remarquablement écrit, j’ai trouvé que l’association de la neige et du sang était d’une esthétique sublime qui marque très bien la différence entre le concept de vie et celui de mort. Il est particulièrement appréciable au début du roman, de savoir qu’une fois le portail fermé après le début des cours : l’horreur va commencer (hinhin). Ces adolescents sont pris au piège, ils ne le savent pas encore alors que le lecteur lui, réalise tout de suite. La fin m’a déconcertée – c’est que j’ai un soupçon d’optimisme alors que Guillaume Guéraud ne nous en laisse AUCUN en réalité. Qui plus est il nous prévient avec le titre Plus de morts que de vivants. : c’est une affirmation et non pas une question 🙂 N’ayez pas peur vous serez délicatement surpris.
Maintenant que je suis à court de qualificatifs, je vous laisse découvrir l’improbable Guillaume Guéraud.

Plus de morts que de vivants, Guillaume Guéraud (Rouergue) – collection Doado
en librairie depuis le 4 mars 2015
9782812608612 – 13.70€
à partir de 13 ans

mourraipasgibierJe mourrai pas gibier (Rouergue) – collection Doado
en librairie depuis janvier 2006
9782841567171 – 7.10€
à partir de 14 ans
★★★★★

Son
0

Monsieur Moisange – Fred Bernard et Gwendal Le Bec

9782226257918,0-2539918

Monsieur Moisange est un drôle d’oiseau, si l’on en croit les gens. En dehors de ses collègues au bureau, il ne côtoie guère que sa mère, oiselière sur les quais du Louvre. Pierre Moisange vit seul, il appelle tout le monde « coco » et malgré son allure séduisante, est un homme célibataire. « Ah si je pouvais voler… » se disait-il…ce qu’il fait dans ses rêves en compagnie d’une belle inconnue. Jusqu’au jour où son vœu s’exauce, et deux ailes lui poussent au bout des bras…

★★★★☆

Que va-t-il alors arriver à Monsieur Moisange ? C’est une toute nouvelle vie qui l’attend, entre célébrité et voyages autour du monde. Mais Pierre n’a réellement qu’un objectif : celui de retrouver la jeune femme qu’il voit en rêve, car elle existe et elle aussi rêve de lui. Pourtant, avant de la retrouver, il lui faudra tenir la promesse faite à sa mère, celle de ramener les oiseaux de sa boutique dans leurs pays à sa mort. Et c’est ainsi que notre drôle de bonhomme voyage à travers le monde, la beauté des paysages se disputant aux dangers de la nature…ou de l’homme. Sa mission terminée, il se rend alors en Inde, où semble vivre l’amour de ses rêves.
Mr-MOISANGE-r3
Monsieur Moisange est un petit roman illustré, presque un conte, qui célèbre le rêve, l’amour et la liberté. Le texte de Fred Bernard est très poétique, parfois teinté d’humour, et est merveilleusement mis en image par Gwendal Le Bec et ses illustrations douces et colorées. Le livre m’a pas mal fait penser à Mon père est un homme-oiseau, de David Almond et Polly Dunbar, que j’aime beaucoup. Le propos n’est pas tout à fait le même, mais je trouve quand même qu’il y a d’agréables similarités. En tous cas, Monsieur Moisange est un bel ouvrage, qui n’aurait pas démérité un format un peu plus grand pour en apprécier encore plus les illustrations. A conseiller à tous les enfants amoureux de l’imaginaire et du rêve. 😉

Monsieur Moisange, Fred Bernard et Gwendal Le Bec (Albin Michel-Jeunesse)
en librairie depuis le 4 mars 2015
9782226257918 – 11,90 €
à partir de 8 ans