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Les histoires ça ne devrait jamais finir – Esmé Planchon

Zora tient un blog consacré à l’univers de la saga littéraire des Mondes Invisibles de Maria Zumaï. Zora est une des autrices de fanfictions les plus lues des forums de fans, c’est une référence dans la communauté. Mais dans la vraie vie, en dehors d’Internet, Zora s’appelle Lucien, c’est un adolescent de 16 ans, timide et renfermé. Il aime se promener seul dans ses pensées autour d’un lac, lire et re-re-re-re lire les romans. Sa vie ne tourne qu’autour de ces livres. Jusqu’au jour où une annonce va bouleverser les lecteurs des Mondes Invisibles, un tremblement de terre. La série va rester inachevée, le quatrième tome tant attendu ne verra jamais le jour ! Lucien décide, en compagnie de deux fans, de mener l’enquête pour découvrir l’identité de Maria Zumaï afin de la supplier d’offrir aux fans la suite.

Imaginez si J.K Rowling avait arrêté Harry Potter au sixième tome ? Ou une autre de vos sagas préférées ? De quoi donner des sueurs froides aux lectrices et lecteurs que nous sommes ! Depuis ses dix ans, la vie de Lucien tourne autour de ces romans. »S’il y avait eu des biscuits Maria Zumaï, je me serais sûrement nourri exclusivement de ça. » dit-il. Lucien préfère la fiction à la réalité. Sa vision du monde est douce, mélancolique et douloureuse. Si Lucien est toujours plongé dans cette saga c’est en mémoire de son meilleur ami Max. Max avec lequel il a découvert cette saga et qui est décédé à l’âge de 12 ans. Cette année là, les yeux de Lucien, d’un bleu lumineux, ont foncé vers un bleu plus sombre.

Ce roman c’est de la poésie brute, c’est de l’amour pour les livres mais aussi pour la vie. Ce sont des personnages complexes, si loin des préjugés, toutes en nuances de couleurs. C’est un hommage à tous les livres lus sous la couette, à tous les livres relus, à toutes les conversations autour de la lecture avec une boisson chaude, à toutes les histoires qui nous aident à nous construire et à nous déconstruire, à tous les lecteurs.

La prose de l’autrice Esmé Planchon est douce, onirique, d’une justesse touchante. Elle est une magicienne des couleurs. C’est admirable, poétique tout en gardant les pieds sur terre et la tête dans les nuages. Les pensées de Lucien vagabondent telles la plume de l’autrice. Etre témoin de sa transformation douce et profonde est un pur bonheur. On resort de ce livre avec l’envie de sourire à sa bibliothèque, pleine de gratitude.

J’aimerais vous inviter à plonger dans ce roman comme l’on plonge dans un lac, un beau jour d’été, en sachant que cela nous fera du bien. Outre l’écriture sublime, le monde de la littérature, les personnages attachants, l’enquête fascinante pour retrouver la trace de l’autrice anonyme, on trouve aussi une romance distillée dans les chapitres. Une histoire d’amour maladroite, irrésistible, qui fera fondre les petits coeurs. Cette idylle permettra à Lucien de faire éclore son identité queer et de concilier ses personnalités avec sensibilité. Vous l’aurez compris, ce roman est un coup de coeur 💙.

Les histoires, ça ne devrait jamais finir, Esmé Planchon (Bayard)
disponible depuis le 9 mars 2022
9791036335846 – 13,90€
à partir de 12 ans
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Thomas – Martine Arpin et Claude K. Dubois

La maman de Thomas vient de mourir. Un trou a été creusé dans la terre pour elle. Un trou a aussi été creusé dans son coeur d’enfant. Un gros trou noir. Vide. Si sa maman avait été là, il lui aurait demandé comment remplir ce trou. Elle aurait su. Elle savait toujours. Mais elle n’est plus là. Comment réparer son coeur ?

Thomas va chercher à travers la ville, quelqu’un qui saurait réparer les coeurs brisés. Il va aller voir les commerçants dont sa maman lui parlait : la couturière aux doigts de fée, le médecin qui guérit tout… Comme un conte en randonnée, Thomas va d’adulte en adulte pour demander une solution, mais il n’existe pas de médicament pour le chagrin, ni de rapiéçage. La tristesse reste là, un vide, une absence qui l’entoure jusque dans les illustrations où la tristesse envahit le dessin. Thomas erre, il est seul dans cette ville inhabitée. Avec beaucoup de délicatesse et de pudeur, Thomas raconte la tristesse qui nous entoure lorsque l’on perd un être cher. Une texte aussi délicat que les illustrations de Claude K.Dubois, dont on reconnaît immédiatement le crayonnée et ses teintes pastels beige, ocre, jaune.

A force de marcher dans la ville, Thomas va revenir chez lui, retrouver son père entouré de photos de sa maman. Et si la réponse pouvait venir de là ? Et si on pouvait remplir son coeur de souvenir ? Martine Arpin nous offre une douce fin avec un florilège de souvenirs poignants qui va apporter à Thomas de l’apaisement quand il comprendra que, pour remplir le trou qui s’est creusé dans son cœur, il peut y glisser « de petits morceaux de sa maman » , des souvenirs.

Un album émouvant, sensible pour aborder ce thème délicat et mettre des mots sur la mort et sur notre plus belle façon d’affronter la perte : la force des souvenirs. Un texte triste et beau, doux et fin, comme les illustrations. Thomas fait autant pleurer d’émotions que de beauté, il devient un de mes livres indispensables.

Thomas, Martine Arpin, illustré par Claude K.Dubois (Editions D’eux)
disponible depuis le 4 mars 2021
9782924645536 – 13,50€
à partir de 5 ans
Son
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Pour la beauté du geste !

Nos deux héroïnes du jour ont en commun la réalisation d’exploits sportifs remarquables. Traverser les Etats-Unis d’ouest en est en courant, grimper sur le plus haut sommet du monde : ça vous en bouche un coin, hein ? Heureusement, ces incroyables efforts qui nous font déjà suer sont littéraires et, s’ils vous laisseront peut-être pantelants après votre lecture, vous en ressortirez en revanche sans courbatures et avec deux modèles d’une jeunesse engagée ! Prêts ? Partez !

A en perdre haleine – Deb Caletti

Un soir, après être allée chercher un burger, Annabelle décide de tout laisser en plan, et se met à courir. Elle ne s’arrêtera pas avant d’avoir atteint Washington, la capitale, soit l’exact opposé de sa position sur la carte. Accompagnée par son grand-père qui la suit en camping-car, Annabelle court car elle a quelque chose à dire, un combat à mener.

Et ce combat, on le découvrira au fur et à mesure des révélations qu’Annabelle nous confiera. On le devine en filigrane, une tragédie a frappé la vie de l’adolescente et la course devient sa façon de réagir, de se sortir de ce statut de victime qu’on lui attribue depuis lors, de faire passer un message, d’accepter, peut-être, ce qui lui est arrivé, et de trouver une forme d’apaisement. Le roman nous tient en haleine, de la même manière qu’Annabelle travaille son souffle pour tenir un marathon de près de cinq mois. La façon de toucher du doigt le cœur du sujet, avant qu’Annabelle ne le repousse, est parfois un peu agaçant pour le lecteur, mais participe à l’attachement pour cette héroïne qui n’a pas conscience d’inspirer, que son message peut aller au-delà de sa propre expérience. De jolies rencontres émaillent l’aventure d’Annabelle, mettent en perspective son histoire et montrent l’intérêt grandissant du grand public pour son combat. Deb Caletti nous offre un roman sensible, aux réflexions sociétales fortes, même si parfois un peu trop appuyées (les attentes de la société sur la façon dont « doivent être » les filles, par exemple, sont clairement indispensables, mais ce n’est pas toujours amené très subtilement). Engagé et inspirant !

A en perdre haleine, Deb Caletti, traduit par Maud Desurvire (PKJ)
disponible le 3 septembre 2020
9782266292962 – 18,50€
à partir de 14 ans

8848 mètres – Silène Edgar

Mallory a quinze ans et est la plus jeune alpiniste à tenter l’ascension de l’Everest. Avec son père, ils s’entraînent depuis toujours et, cette fois, ils se lancent dans cette incroyable aventure. Avec leur équipe, ils se préparent, évaluent les risques et découvrent ce parcours d’ascension qui ne ressemble à rien de ce qu’ils avaient fait jusqu’à présent…

Et Mallory va découvrir bien plus que le « simple » exploit sportif de gravir le sommet de l’Everest du haut de son adolescence. Car l’Everest, ce n’est pas n’importe quelle montagne. Alors que la jeune fille doit composer entre l’attention portée à sa santé, son oxygène et le froid capable de la tuer, elle est aussi malgré elle une curiosité qui pousse les médias à s’intéresser à son périple, lui demandant l’effort supplémentaire de réaliser des interviews. Silène Edgar nous invite ainsi à découvrir la manière dont se prépare une telle ascension, entre passages très descriptifs du trajet, de la façon dont tout cela s’organise, et des moments plus introspectifs qui nous emmènent aux côtés de Mallory et de la révélation que va être l’Everest pour elle. Car si, au départ, il s’agissait surtout de réaliser cet exploit avec son père, gravir l’Everest c’est aussi découvrir tout ce que cela recouvre : la pollution importante à quelques mètres du sommet et les effets du réchauffement climatique, la mort inéluctable au moindre faux pas, et la philosophie bouddhiste autour de la montagne. Un parcours initiatique qui va ainsi bien au-delà de l’exploit sportif pour se découvrir soi et le monde qui nous entoure. Un roman tout aussi engagé que le précédent, sur la préservation de la nature, avec une héroïne toute aussi attachante et déterminée.

8848 mètres, Silène Edgar (Casterman)
collection Ici/maintenant
disponible depuis le 10 juin 2020
9782203064317 – 16€
à partir de 12 ans
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Taxonomie de l’amour – Rachael Allen

Il faut savoir deux choses sur Spencer : il a le syndrome de la Tourette et il est tombé fou amoureux de sa voisine Hope, qui vient d’emménager à côté de chez lui. Spencer sent tout de suite qu’elle est spéciale : Hope aime escalader les arbres, adore les anecdotes bizarres sur des sujets inutiles, et surtout, elle ne se moque pas de lui et de ses tics moteurs et vocaux. À ses côtés, il a l’impression de faire enfin partie du monde qui l’entoure. Les deux adolescents vont grandir l’un à côté de l’autre, oscillant entre amour et amitié. Malheureusement pour Spencer, la vie n’est pas aussi simple que les taxonomies qu’ils s’amusent à créer…

Si vous imaginez suivre les aventures d’un garçon qui crie des injures à cause de ce syndrome, passez votre chemin ! Spencer a des gestes involontaires, des tics nerveux (reniflements, haussements d’épaule) et des tics sonores (parfois il répète le dernier mot d’une phrase). Passé ce syndrome, c’est un adolescent curieux, passionné par les insectes, qui essaye de prendre sa place dans le monde. Il va y réussir, petit à petit, notamment grâce à son amitié avec Hope et un surprenant talent pour la lutte. Talent qui apparaît à force de se faire maltraiter par d’autres garçons et par son frère Dean, le beau grand frère à qui tout réussit.

Au début du roman, les personnages paraissent stéréotypés, comme une série télévisée (le beau garçon, le sportif…) mais au fil du roman, on va se rendre compte qu’ils ont tous des failles, des histoires dysfonctionnelles. On prend plaisir à suivre l’évolution d’Hope et de Spencer à travers le temps, car le roman les suit de 13 à 19 ans. Un temps de l’adolescence fort en émotions.

Taxonomie de l’amour est une excellente lecture, qui sous son air de romance, en réalité nous parle de différence, des liens familiaux et de deuil. La passion du protagoniste pour la taxonomie, un système de classification des êtres vivants, l’invite à en créer lui-même concernant les personnes qui l’entourent. On pourra ainsi découvrir par exemple une « Taxonomie des filles qui m’empêchent de me concentrer sur mes devoirs de maths », très drôle. Ces schémas apportent de la légèreté dans des situations parfois émouvantes.

Un roman parfait pour les adolescents qui souhaitent une histoire d’amour hors des cases et qui prouve que les relations humaines ne se résument pas à une classification scientifique !

Taxonomie de l’amour, Rachael Allen (Bayard)
disponible le 8 juillet 2020
9782747095051 – 14,90€
à partir de 14 ans
Son
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Tracer – Guillaume Nail

Emjie a perdu ses parents dans un accident de voiture et vit désormais avec son oncle. Malgré l’amitié un peu folle de sa meilleure amie Nitsa et l’histoire d’amour naissante avec le nouveau, Walter, la jeune fille est incapable de faire son deuil, la tristesse prenant toute la place. Et puis, après avoir vu une émission de télé relatant le pèlerinage vers Saint-Jacques-de-Compostelle, Emjie décide de partir et de tracer, seule, sa route…

Seule ? Pas tout à fait. Car cette randonnée de l’Alsace vers l’Aubrac ne se passe pas vraiment comme prévu… D’abord, il y a Nitsa qui s’incruste, avec son babillage incessant, ses chansons de Madonna et sa folle dinguerie. L’envie de solitude en prend un coup ! Et ça, c’est sans compter les imprévus et les rencontres qui foutent en l’air un itinéraire savamment préparé, les disputes et les soirées où on oublie tout…bref, la vie ! Car le cheminement d’Emjie sur la route de Compostelle n’a absolument rien de religieux ou de spirituel mais est bien celui de la reconstruction de soi, de la résilience. Et lorsque la jeune fille se retrouve enfin seule sur les chemins du GR, c’est enfin l’occasion de se confronter à elle-même, d’apprivoiser sa peine, d’accepter la perte.

En dépit de la gravité du sujet, le roman n’a rien de plombant, et ne tombe jamais dans le pathos ! Tracer est au contraire un roman lumineux, porté par une héroïne certes aux prises avec des émotions difficiles et compliquées, mais démontrant surtout une force et une volonté qui vont la porter jusqu’au bout de son projet, et de sa recherche d’un peu de bonheur perdu. Le ton est donné : simple, direct, à fleur de peau. Si Guillaume Nail réussit à évoquer la douleur de la perte avec autant de sensibilité que de rudesse, il parvient également à nous offrir des scènes très drôles autant que de jolis instants de grâce à travers des rencontres humaines que l’on n’oublie pas. Le chemin d’Emjie est parfois semé d’embûches, mais il est toujours porté par l’espoir, par l’objectif qu’elle s’est fixé, et par la volonté de parvenir à se sentir à nouveau vivante.

Tracer, Guillaume Nail (Le Rouergue)
collection DoAdo
disponible depuis le 5 février 2020
9782812619212 – 13,50€
à partir de 13 ans
Son
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Les raisons de la colère

On ne vous parle pas de Steinbeck aujourd’hui, mais bien de ce qui nous motive parfois à nous mettre en colère. C’est pas toujours jojo comme sentiment, mais nos deux albums du jour parviennent à en parler avec beaucoup de justesse, et surtout, à l’évoquer à travers des images aux styles diamétralement opposés mais tout autant puissants.

Le jardin d’Evan

Evan, un fermier faisant pousser des citrouilles, passe ses journées avec son chien. Ils font tout à deux : déblayer la neige du chemin l’hiver, jouer, aller voir les copains d’Evan et, surtout, s’occuper du magnifique jardin ! Jusqu’au jour où le chien s’endort pour ne plus jamais se réveiller. A ce moment-là, la peine d’Evan est si grande qu’elle en devient colère. Tout lui est insupportable et Evan commet l’irréparable : il détruit de rage son précieux jardin, qui devient le vivier des mauvaises herbes, des plantes qui piquent, qui empoisonnent… Un jardin qui correspond parfaitement à l’état de son propriétaire. Jusqu’à ce qu’une racine de citrouille trouve son chemin sous la clôture du jardin…

Après le très bel album Plus, qu’il illustrait chez Minedition, Brian Lies revient avec un album sublime et d’une grande force émotionnelle. Rien que cette couverture, très forte visuellement, en dit beaucoup, et ne laisse pas indifférent. Sur un thème éculé, Brian Lies nous propose cette fois de parler du deuil dans tout ce qu’il peut avoir de rageant, de la colère qui se mêle à la tristesse et qui veut nous faire tout détruire de ce qui nous fait penser à l’être perdu. Des émotions extrêmement fortes que l’on retrouve dans ses peintures hyper réalistes, avec un magnifique travail de lumières et de couleurs automnales, et où un renard n’aura jamais été mieux incarné que dans cette histoire. Un album bouleversant sur la résilience.

Le jardin d’Evan, Brian Lies, traduit par Françoise de Guibert (Albin Michel Jeunesse)
disponible depuis le 27 mars 2019
9782226441232 – 13,90€
à partir de 5 ans
La ligne

Alors qu’un petit garçon lit tranquillement sur le banc de la cour de l’immeuble, une petite fille s’amuse avec son ballon, joue en faisant du bruit. C’est chiant, ça, quand on veut lire dans le calme, non ? Alors le garçon trace une ligne dans la cour. Facile : tu restes de ton côté, moi du mien. Mais la petite fille n’est pas d’accord et, bien vite, les choses s’enveniment…

Là aussi, un album aussi fort visuellement qu’émotionnellement, où la colère est le point de départ d’une situation terrible où la liberté et l’acceptation de l’autre sont mises à mal. Plutôt que de parler, le petit garçon choisit de délimiter une ligne à ne pas franchir, un mur symbolique. L’escalade de violence suit, jusqu’à ce que les deux enfants se rendent compte de ce qui est en train de se passer… Ce qui peut parfois ne pas être le cas chez des adultes, par exemple… ll ne faut que quelques mots à Frédéric Maupomé, qui apparaissent sur une place quasi blanche avant chaque image, pour rendre toute la puissance poétique de son propos, qu’il soit doux ou violent. Des mots qui font mouche et des illustrations de Stéphane Sénégas qui, elles aussi, nous interpellent. Un trait noir et vif, qui s’assombrit et se gribouille de colère à mesure que le conflit évolue, et qui rend parfaitement toute l’émotion de cette histoire. Un album percutant sur le vivre ensemble.

La ligne, Frédéric Maupomé, illustré par Stéphane Sénégas (Frimousse)
disponible depuis le 15 novembre 2018
9782352413806 – 15€
à partir de 5 ans
Son
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Danse ta vie !

La rentrée littéraire est particulièrement dense et regorge de jolis textes ! Difficile cependant d’écrire sur ces livres, par manque de temps, aussi Bob & Jean-Michel vous proposent un « nouveau » format de chroniques, un peu plus resserrées (même si on gardera aussi le format habituel), pour parler d’un peu plus de livres et vous brosser un panorama plus large des livres qu’on a lu ! Par thématiques, par genres, on essayera de vous proposer des choses variées. 😀 Aujourd’hui, nous sommes d’humeur à danser !

Dancers

Anaïs, Adrien et Sanjeewa partagent le même cours de danse au lycée. La première est une ancienne gymnaste à la carrière brutalement stoppée, le deuxième est dans une colère rentrée, et le dernier est un immigré sri-lankais. Ils vont portant être rassemblés par une passion commune, la danse…puis par le sentiment amoureux.

★★★★☆

C’est avec beaucoup de finesse que Jean-Philippe Blondel évoque le triangle amoureux, bien loin des romances parfois un peu mièvres où s’affrontent le good guy et le bad boy dans le cœur de la belle. Ici, l’amour arrive par la danse et par les moments passés à exprimer un sentiment à travers une chorégraphie, un duo. L’histoire d’Anaïs et Adrien commence bien avant que n’arrive Sanjeewa et celle-ci est marquée par un drame qui les sépare et qui va permettre à Sanjeewa de se rapprocher de la jeune fille. Toute la difficulté de l’amour partagé, l’imprécision des sentiments ou l’impression d’aimer, le rapport à la confiance, des idées qui sont très subtilement amenées et nous offrent un très beau moment de lecture et d’attachement à ces personnages fort bien construits. Même s’il y a un petit goût de trop peu, notamment dans la relation d’Adrien à ses parents, j’ai aussi beaucoup aimé cette vision de la danse pas seulement vue comme un art mais aussi comme une performance, un dépassement de soi, qui apporte ainsi une véritable énergie à ce très beau roman.

Dancers, Jean-Philippe Blondel (Actes Sud junior)
collection Ado
disponible depuis le 22 août 2018
9782330108496 – 13,90€
à partir de 13 ans
La vie dure trois minutes

Il y a un an, Automne et sa famille ont accueilli Chloé tandis que ses parents sont partis à l’étranger pour leur travail. Grâce à cette dernière, Automne s’est épanouie et s’est trouvée une passion pour le tango. Mais peu avant les vacances d’été, Chloé décède dans un brutal accident de la route.

★★★☆☆

Le deuil et la lente reconstruction attendent ainsi Automne, qui a du mal à émerger de son lit, de sa chambre, alors que la rentrée arrive. Pourtant, si elle a partagé une amitié très forte avec Chloé, ce n’est pas seulement la perte qui étreint Automne mais aussi la colère, la rage, après la découverte du secret qu’elle cachait. Pour exprimer tout cela et laisser le passé derrière elle, Automne va se mettre à écrire dans un carnet et elle nous raconte alors son histoire, depuis le tout début.
Là encore, une très belle évocation de la danse, et notamment du tango, grande originalité du roman qui, si elle est d’abord la cause du malheur, devient aussi la résolution du chagrin d’Automne. Si les thèmes de l’amitié, du secret et du deuil sont très classiques, on se laisse néanmoins emporter dans cette touchante histoire de reconstruction.

La vie dure trois minutes, Agnès Laroche (Rageot)
disponible depuis le 12 septembre 2018
9782700256369 – 14,90€
à partir de 12 ans
Son
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Lectures d’été #2

Deuxième et dernière partie des lectures d’été de Bob…eh oui, ça sent déjà la rentrée littéraire ! Mais vous verrez, il est encore question de pas mal de voyages et ceux qui aiment se faire du mal y trouveront aussi leur compte. 😛

Catégorie #vacances de la loose

Un mois à l’ouest

A l’époque où Internet, les SMS et Google Maps n’existaient pas encore (quand vos ados n’étaient même pas nés), Fred tombe amoureux d’une canadienne et décide d’aller la rejoindre. Sauf qu’en fait, la miss partageait pas franchement les sentiments, et notre pauvre garçon se retrouve tout seul à errer sur un continent bien loin de chez lui. Commence alors un road-trip entre Canada et États-Unis, où les quelques dollars en poche fondent comme neige au soleil et où gros ratages et belles rencontres se succèdent. Comme toujours, le style de Claudine Desmarteau est vif, incisif, rythmé et nous offre ici de belles tranches d’oralité québécoise. On se régale des tribulations de ce frenchie un poil loser, qui cache malgré tout une véritable profondeur. Des photos en noir et blanc, comme des petites respirations apaisantes dans la galère, parsèment ce road-trip qui sent le vécu !

Un mois à l’ouest, Claudine Desmarteau (Thierry Magnier)
disponible depuis le 18 avril 2018
9791035201470 – 14,50€
à partir de 15 ans
Y aller

On continue avec un autre loser du voyage : Solal, complètement accro aux jeux vidéo, et notamment à Zelda, qui décide un jour de tout arrêter, de se débrancher, et se lance dans un périple un peu fou : rejoindre le centre de la France, à Bruère-Allichamp. Équipé d’un sac à dos plus lourd que lui et de toute sa motivation, le garçon se lance, il y va ! Hervé Giraud nous offre un road-trip totalement décalé qui fonctionne à merveille : on rit de ce retour à la nature de ce geek un peu halluciné qui n’a que le monde de Zelda pour repère (et qui obtient d’ailleurs des « objets magiques » au fur et à mesure des rencontres de son périple) et on s’attendrit de sa naïveté et de son exaltation en toute situation. Une aventure initiatique jubilatoire !

Y aller, Hervé Giraud (Thierry Magnier)
disponible depuis le 16 mai 2018
9791035201777 – 12,90€
à partir de 13 ans

Catégorie #ouille, ça pique !

Les collisions

Quand deux lycéens de terminale L s’ennuient et décident de jouer les Merteuil et Valmont de leur classe, attendez-vous à un remake des Liaisons dangereuses où les lettres deviennent textos mais où la manipulation et la perversité sont exactement les mêmes ! Gabriel et Laëtitia n’ont absolument rien à envier à leurs aînés de fiction, et Joanne Richoux nous brosse un portrait à l’acide de cette jeunesse qui s’ennuie et qui n’a – presque – que faire des conséquences, nous montrant par là-même à quel point la transposition de la cour du XVIIIe siècle à cette classe de lycée est d’une étonnante modernité. Un roman terriblement dérangeant, mais tellement juste, porté par un style acéré, intransigeant, qui nous place dans la position non moins honteuse d’un voyeur impuissant qui se délecte des drames à venir. Une vraie claque !

Les collisions, Joanne Richoux (Sarbacane)
collection Exprim’
disponible depuis le 4 avril 2018
9782377310739 – 15,50€
à partir de 14 ans
Son
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L’espoir sous nos semelles – Aurore Gomez

Après on long silence radio dont nous sommes bien désolées, Bob & Jean-Michel reprend du service et…été oblige, on vous invite à cliquer sur le petit visuel à droite pour découvrir notre sélection d’ouvrages à emporter avec vous en vacances ! 😀

***

Pour sauver sa famille de la pauvreté, Juno s’inscrit au « trek du Pownal », une course en montagne de 1000 kilomètres, suivie par les internautes, où s’affrontent 30 concurrents. Au bout de cette course : une rondelette somme d’argent pour le vainqueur.

★★★★☆

Après la mort de sa mère et de sa grande sœur, prodige de l’alpinisme, le père de Juno est tombé dans la dépression, délaissant travail et famille. La jeune fille a du abandonner ses études pour subvenir aux besoins de ses frère et sœur, et travaille à la conserverie locale. Lorsqu’elle découvre une publicité pour le fameux trek de Pownal, il ne lui faut pas longtemps pour décider de tenter sa chance. Commence alors pour elle une aventure tant sportive qu’humaine.

Roman d’aventure psychologique, on pense forcément à Hunger Games pour le côté 30 ados en liberté dans une course contre la montre. Pourtant, la comparaison s’arrête là : point de meurtres ou de dangers vicieux. Seule la nature et les autres concurrents sont susceptibles de mettre des bâtons dans les roues de Juno. Car, si elle n’a jamais montré de facultés particulières pour la marche en montagne, sa détermination est forte et la porte vers l’avant. C’est d’ailleurs le grand point fort de ce roman que ce personnage, cette jeune fille qui chemine vers une vie meilleure. On s’attache instantanément à elle, à ses blessures, à son courage et à sa profonde humanité. On se laisse embringuer dans cette marche de l’espoir, où Juno se retrouve face à elle-même, se lie avec d’autres concurrents, s’attire l’animosité de certains ou doit composer avec la stratégie de ceux qui veulent gagner coûte que coûte.
Et là où Aurore Gomez réussit à nous transporter encore plus, c’est dans le récit de ce trek, sur cette île fictive en pleine nature, où tout est savamment dosé. Randonner dans des espaces sauvages ou balisés n’est pas facile, et l’autrice parvient à amener le danger là où il faut et quand il faut, et tient son suspense jusqu’à la fin de la course. Mais celle-ci n’est pas une fin en soi, et c’est toute la finesse des relations tissées au fil de l’épreuve qui vont apporter de toutes nouvelles perspectives à l’endurante et battante Juno. Un excellent premier roman !

L’espoir sous nos semelles, Aurore Gomez (Magnard)
disponible depuis le 10 avril 2018
9782210965263 – 15,90€
à partir de 12 ans
Son
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Le veilleur des brumes, t.1 – Robert Kondo et Dice Tsutsumi

9782745994998,0-4784490

Dans un monde où les Brumes ont tout envahi, tout tué, le petit village de Val-de-l’Aube est le dernier bastion de la vie, protégé par le Barrage, qui repousse les brumes toutes les douze heures. Pierre est le responsable de ce barrage, il est le Veilleur de Brumes, une responsabilité bien grande pour un enfant seul.

★★★★★

OH LA VACHE ! Quelle sublime bande dessinée ! Adapté d’un court-métrage d’animation réalisé par les deux auteurs, et très justement récompensé (dont un Oscar, quand même), ce petit album est tout simplement bouleversant de beauté. Petite bande-annonce du court-métrage pour commencer :

Dans ce petit village protégé de la terrible menace des Brumes grâce au barrage construit par son père, Pierre est un élément indispensable de la communauté. Et pourtant, tout le monde semble avoir oublié : aussi bien l’instabilité de leur situation que le travail inestimable du petit garçon. Car voilà un moment qu’il veille seul au bon fonctionnement du moulin et du barrage. Son père a disparu, avalé par les Brumes. La mort de sa femme, la mère de Pierre, lui a été difficile à accepter et c’est sans doute sans toute sa tête qu’il a laissé Pierre tout seul. Le garçon fait depuis son travail aussi bien qu’il le peut, alternant entre l’école, où tout le monde semble l’ignorer sauf la pétillante Roxane, et le moulin, où il doit remonter le mécanisme toutes les douze heures. Mais voilà que bientôt, Pierre remarque une chose étonnante : les Brumes agissent désormais comme des vagues, elles se retirent peu à peu pour venir se fracasser brutalement contre le barrage. Jusqu’au jour où la vague est beaucoup plus forte que ce que Pierre pensait…

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Je vous le redis pour être sûre que vous le compreniez bien : cette BD est absolument SUBLIME ! Tant par son traitement graphique, avec une profonde douceur dans le trait, un très beau jeu sur le clair-obscur et le noir, que par son scénario où les émotions côtoient la quête initiatique qui attend notre jeune héros. Pour être honnête, le début est très sombre, l’histoire de Pierre nous prend littéralement aux tripes et titille nos glandes lacrymales. Un petit garçon qui a grandi bien plus vite que prévu, qui ne se doute certainement pas de son incroyable courage et qui nous touche au plus profond. Ce premier tome d’une saga oscillant entre fantastique et science-fiction est à ne pas manquer ! Un véritable bijou de beauté, de magie, de poésie, d’émotion. ❤

Le veilleur des brumes, t.1, Robert Kondo et Dice Tsutsumi, traduit par Aude Sécheret (Milan)
collection Grafiteen
disponible depuis le 7 mars 2018
9782745994998 – 16,50€
à partir de 10 ans