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Le fils de l’ombre et de l’oiseau – Alex Cousseau

filsdelombreetdeloiseau

Bob et Jean-Michel ne vous ont pas encore parlé d’Alex Cousseau… Pourtant, ils adorent tous ses livres ! Alors autant vous dire que, lorsque nous avons repéré la parution de son tout nouveau roman, nous avons sauté dessus et nous n’avons pas regretté le voyage…

En guise d’introduction, les deux frères Elie et Elias attendent le moment opportun pour assouvir leur vengeance envers Butch Cassidy, un bandit. Mais avant tout acte, ils souhaitent nous raconter comment ils en sont arrivés là…ainsi, une plongée dans l’histoire familiale est narrée…Et quels ancêtres !

Jean-Michel, fils des berges et du castor

★★★★★

Parce que c’est un roman océan où il faut suivre et ne pas se laisser distraire lors de la lecture, on vous donne en exclusivité (et aussi parce que nous sommes fort sympathiques) l’arbre généalogique abrégé de cette famille hors du commun.

Mahina

Poki – Peter Schlemihl

Pawel – Wari
↓ ↓
Elie – Elias

De rien.
Vous devez savoir avant de vous plonger dans cette aventure stupéfiante que grâce à Alex Cousseau, la notion de rêve est presque palpable. Vous côtoierez des paysages et des lieux enchanteurs : des déserts, des océans d’un bleu intense, des montagnes arides, des mines sombres, toucherez du sable chaud, un ciel glacé, percerez le mystère d’une forêt et sentirez l’humidité d’un fleuve d’argent. De l’action ? Vous en aurez. Vous assisterez à des cavales, des parcours qui n’en finissent plus et des points de non-retour. Soyez curieux et laissez-vous emporter par l’épopée douce d’un brillant rêveur : Monsieur Cousseau.

« La vie est un cheval entendit Pawel dans une conversation…
un cheval furieux, un cheval espiègle, ou un cheval docile.
A chacun d’en décider, mais pour avancer il faut l’enfourcher »
Bob, fils de la glace et de l’éléphant

★★★★★

Il n’y a bien qu’Alex Cousseau pour nous conter une épopée familiale, s’étalant sur deux siècles, deux mondes, avec autant de rêve et de beauté. On se laisse bercer par son écriture, sa façon de raconter, qui nous porte au gré des vents, des coups du sort, de la vie et de la mort. J’aime son univers, exotique et foisonnant ; ses personnages, vivants et surprenants ; son sens de l’aventure et du destin ; son incroyable travail mêlant fiction et éléments historiques, techniques, technologiques et scientifiques. Il faudra attendre la dernière partie du roman pour comprendre comment Elie et Elias se retrouvent devant Butch Cassidy mais ce voyage magique en vaut assurément la peine.

Le fils de l’ombre et de l’oiseau,Alex Cousseau(Rouergue)
collection DoAdo
disponible depuis le 6 janvier 2016
9782812609862 – 15,90€
à partir de 14 ans
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Bouche cousue – Marion Muller-Colard

Marion Muller-Collard, c’est la grande découverte de Jean-Michel de ce début d’année…

Dans ce court roman, elle donne la parole à la cadette d’une famille italienne respectueuse des traditions. Propriétaires d’un lavomatique, ses parents sont peu à l’écoute de leurs filles Mado et Amandana. En revanche, l’image et la vertue de la famille doivent être aussi propres que le linge qui ressort de leur entreprise.

★★★★★

bouchecousueLors d’un déjeuner dominical chez Mado, son époux Thierry, leurs enfants Tom (15 ans), Eva-Paola (11 ans), Amandana trouve l’ambiance lourde – plus que d’habitude et ses parents ajoutent leur pierre à l’édifice de la mauvaise humeur. Célibataire et sans enfants, elle est montrée du doigt par le reste de sa famille, y compris Eva-Paola. Excepté par Tom, avec lequel elle entretient une relation complice. Rapidement, on apprend au cours du repas que Tom a embrassé un autre garçon et le déjeuner prend une tournure dramatique où Amandana ressent les stigmates de son passé chatouiller la redondance de la situation, qu’elle a vécu des années plus tôt.

Ce texte est une grande lettre adressée à Tom, le récit d’une femme qui revient sur un passage complexe et douloureux de son adolescence. Elle propose une oreille attentive à son neveu en somme, entre pudicité et mise à nu.

Entre un père traditionaliste, catholique, une mère absente sentimentalement survolant tout problème et une grande sœur qui refuse de jouer un rôle dans la vie de sa cadette : Amandana trouve refuge dans le lavomatique. A la recherche permanente de vêtements oubliés dans les tambours des machines – trésors bienveillants – elle joue, se déguise. La culpabilité la gagne et décide de remettre ses artefacts à ses propriétaires. C’est ainsi que Jérôme et Marc, couple extraordinairement gentil, beau où tous deux sont uniques, vont devenir l’oreille attentive de la jeune fille à chaque étape douloureuse de son entrée dans le monde de l’adolescence (premières règles, premier amour…). J’avoue ne pas m’être lassée de ce trio : chacune de leur scène étaient drôle, ou sensible ou spirituelle. Amandana parlera avec naturel de son attirance envers Marie-Line, son amie.

Un texte d’une puissance magistrale, belle et surprenante. Marion Muller-Colard analyse ses personnages avec précision d’une plume aiguisée mais toujours juste elle dévoile au grand jour leurs travers, leurs blessures intimes. Vous ne trouverez pas texte aussi parfait en ce début d’année. Une grande ouverture d’esprit, Marion en fait la preuve, avec 100 pages.

« Le linge se refaisait une virginité dans le tambour des machines à laver, il ressortait comme neuf et ma mère, dans la salle d’à côté, l’engourdissait de vapeur, l’aplatissait, le plait, et c’est comme si personne ne l’avait jamais touché. »
Bouche cousue, Marion Muller-Colard (Gallimard Jeunesse)
collection Scripto
disponible depuis le 14 janvier 2016
9782070573295 – 7€
à partir de 14 ans
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La reine et moi – Giles Andreae & Tony Ross

Flora, 7 ans, confie à son journal intime une histoire extraordinaire qui lui est arrivée : il n’y a pas si longtemps, la reine d’Angleterre lui a écrit en personne. Chaque année, un écolier britannique est tiré au sort au hasard et est invité à prendre le thé avec la Reine…

★★★★★

lareineetmoi

Face à la Reine, la fillette envisage un courageux « Salut, votre majestuosité » tout en essayant de faire la révérence. Mauvaise idée puisqu’elle tombe la tête la première dans les genoux de la vieille dame, qui s’étale sur son derrière ! Confidence n°1 la Reine porte de ravissantes culottes avec des chiens dessus le vendredi. Arrivée dans les quartiers privés de sa majesté à Buckingham Palace, Flora déambule parmi les piles de slips à repasser avant de s’installer pour une collation digne de ce nom : haricots sur toasts et thé dans dans mugs géants ! Décidément, la Reine a tout pour plaire grâce à sa simplicité. Confidence n°2 il faut tremper le sachet de thé exactement 27 fois pour le réussir par-fai-te-ment.

Petit texte facétieux, bourré d’humour et de légèreté comme on aime, on apprend que la reine apprécie un bon combat de catch, qu’elle fait des cupcakes – de ceux où on se retrouve bien repu après, qu’elle enfile parfois son jogging pour se déhancher devant les clips à la télévision et que lorsqu’elle mange trop de haricots…:)

Ce charmant roman de Giles Andreae désacralise une Grande Dame et la place au même rang du commun des mortels. Après tout, pourquoi serait-elle plus différente que votre grand-mère ? Elle mange comme tout le monde, repasse ses dessous elle-même, ses quartiers ressemblent à n’importe quel appartement d’une personne posée bien dans ses chaussons et elle salue chaleureusement les gens qu’elle reconnait dans la rue. Comme à l’accoutumée, Tony Ross illustre avec l’insolence et l’impertinence qu’on lui connait ce petit tête-à-tête qui ravira les jeunes amoureux de la lecture.

La Reine et moi, Giles Andreae, illustré par Tony Ross (ABC Melody)
collection Melokids
disponible depuis le 5 mars 2015
978236860620 – 6.50€
à partir de 7 ans

methequeenandchristopher

Une édition bilingue est également disponible si vous souhaitez ressentir le british feeling jusqu’au bout des doigts ♔

Me, the Queen and Christopher (bilingue), Giles Andreae, illustré par Tony Ross (ABC Melody)
collection Melokids
disponible depuis le 23 juin 2015
9782368360750 – 8€
à partir de 7 ans
Chez ABC Melody, ils ne font pas les choses à moitié, c’est du sérieux voyez-vous : vous trouverez ici des fiches d’activités autour du roman à télécharger gratuitement – en français et en anglais.

Allez, have a nice day.

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Fake Fake Fake – Zoë Beck

fakefakefakeAllemagne, de nos jours.
Un adolescent va vous faire rire.

Edvard est un adolescent qui n’a pas un quotidien très simple ni à la maison, ni au collège : il est amoureux de Constance, qui ne le voit même pas/le toise/l’ignore. En revanche, il est très prisé par un de ces camarades : Henk, qui le harcèle dès qu’il en a l’occasion et ne manque pas d’en faire profiter les autres élèves. Mouvementée, la vie d’Edvard l’est : surprises à la clé vous aurez.
L’humour pétillant de Zoë Beck va vous ravager la journée.

★★★★★

Edvard nous fait partager ses « autres » problèmes : comprenez ses soucis avec la puberté. Menu, encore une voix de jeune jouvencelle au baromètre et pas un poil sur le torse. Pour couronner le tout, il marche régulièrement dans les crottes de Caniche, le caniche de M. Tannenbaum, le vieux voisin. En vacances avec ses parents dans une ferme bio dotée de toilettes sèches et sans jambon, Edvard en profite pour alimenter le compte facebook qu’il a créé de toutes pièces afin de pouvoir vivre une histoire amicale/amoureuse avec Constance, sa « dulcinée » un brin superficielle. Dans sa double vie facebook d’adolescent il s’appelle James, il est allemand, beau gosse, en vacances en Californie. Les choses ne se déroulent pas comme prévues et simplement, Edvard décide de « tuer » Jason par une intoxication alimentaire puis par une grave allergie. Une vague va déferler sur internet : scandale à l’erreur médicale, une page mémorial va recueillir plus de 400 00 fans et tous réclament justice…

Zoë Beck traite tous les sujets avec aisance. D’autres informations en vrac qui ont leur importance :
M. Tannenbaum paie une nouvelle paire de sneakers à Edvard en réparation des anciennes couvertes d’excréments de son chien et ces deux-là développent une belle amitié cruciale pour la suite.
Notre ado, ses copains Anselme et Arthur vont accueillir une fille dans leur groupe Karli, hors du commun.
M. Tannenbaum risque de se faire expulser de sa maison : c’est l’anarchie, tout le monde va y mettre du sien pour aider ce super professeur de physique.

Alors ?

Ca décoiffe. L’humour de Zoé Beck surprend : on rit au moment où on s’y attend le moins. Un des personnages est rutilant : la maman d’Edvard. Elle est assez punk, pense que son fils est gay, a une conduite très sportive, fait des doigts d’honneur, tient une galerie d’art, écoute Rage against the machine et a autrefois squatté des maisons inoccupées. Vous allez l’adorer. Comme tous les autres personnages d’ailleurs qui forment une galerie folklorique et plus qu’attachante. On se demande comment l’auteur va rebondir avec cette histoire facebook qui prend de l’ampleur au fil des pages et elle s’en sort brillamment : la chute est parfaite.

Qu’il est bon de terminer un roman entièrement satisfaite par son contenu ainsi que sa forme ! Un très grand coup de cœur pour ces 200 pages inattendues.

Fake fake fake,Zoë Beck(Milan)
disponible depuis le 6 janvier 2016
9782745972637 – 12.50€
à partir de 13 ans
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Petite – Anne Cortey & Audrey Calleja

Une deuxième collaboration pour Anne Cortey et Audrey Calleja : elles avaient déjà mis leur talent en commun pour un album paru chez Autrement en 2010 Mange ta chambreElles reviennent avec douceur et volupté pour nous offrir un délice de lecture : Petite.

petite

Une fillette prénommée « Petite » se réveille au beau milieu d’une prairie, constate sa petitesse et exprime son souhait d’être à hauteur de montagnes. Au contact d’une colonie de fourmis, elle va pénétrer dans un tunnel bien sombre, elle fait face à l’inconnu, à un trou bien trop étroit pour avancer. C’est bien la première fois que sa taille l’incommode…le tunnel finit par s’élargir tout au bout et une maison suspendue au-dessus du sol par des nœuds. Elle est sur le point de partir, la petite arrive à y entrer juste avant son envolée.

★★★★☆

Que de compliments à faire sur cet album !
La légèreté du crayonné d’Audrey Calleja semble animer le décor, les éléments semblent s’envoler grâce à leur superposition. Les motifs qu’elle nous offre sont admirables : son style épuré remplit de poésie une page dans son intégralité. Les détails sont si parfaitement ordonnés que je me suis demandée s’il n’y avait pas une touche feng-shui dans ces pages parce qu’on s’y sent si bien 🙂

Et le texte alors, quelles idées dégage t-il ? On peut y voir de nombreuses significations : je pense que c’est avant tout un message décomplexé sur l’acceptation de soi, ou plus simplement une fillette qui gagne en maturité, qui grandit ou encore une histoire sur la différence : il faudrait peut-être qu’un jour, je grandisse comme les autres. L’enfance bien tranquille va subitement devenir un tourment : l’adolescence vient juste après. Grandir effraie, que va t-on trouver dans cette période adolescente à part complications, craintes et inconnu ? La Petite est bien obligée d’en passer par là : la prairie est haute je me faufile dans la masse.

Un tour de force que les représentations des auteurs :
Ainsi je suis dans la vie de prairie : le quotidien
Le soleil luit, le jardin se réveille et s’agite après de longs mois de repos : entrée dans l’adolescence, la puberté

L’araignée bienveillante qui aide la petite à détacher les noeuds de la maison n’est-elle pas le symbole de la parentalité ? Vraiment, cet album parle tout seul, lire entre les lignes devient un jeu d’enfant. Mais la plus jolie pensée à la lecture de cet album c’est que le monde devient bien plus joli et simple lorsque l’on sait s’aimer tel que l’on est.

petiteextrait

Petite, Anne Cortey (texte) & Audrey Calleja (illustrations)
(A Pas de loups)
disponible depuis le 25 novembre 2015
9782930787152 – 16€
à partir de 5 ans
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Troisième branche à gauche – Alexandra Pichard

troisièmebrancheàgauche19h. Toujours pas de papa, seul le chat est dans le champ de vision de la fillette qui se met en tête d’aller jouer dehors avec lui. En tant que félin qui s’en contrecarre : il se contente de ne rien faire. Puis de disparaître dans l’arbre au nez et à la barbe de l’enfant. En grimpant pour retrouver son chat « domestiqué » (sommes-nous les seules à avoir trouvé que ce chat était un peu salaud de partir sans prévenir ?), elle va demander à chaque personnage qu’elle croisera s’ils ont vu son animal. Tous répondront par indice mais chacun cherche quelque chose…La fillette va t-elle parvenir à trouver son chat ?

En ouvrant cet album, vous allez découvrir une galerie de personnages éclectiques prospectant pour des choses variées, aussi :
 Un oiseau cherche son nid
 Un ver blanc cherche son amie la jolie chenille à lunettes
 Un patineur cherche une écharpe en mohair couleur moutarde
 Un homme en pyjama cherche sa chaussette gauche
 Un gardien de zoo cherche un tigre qui s’est enfuit
 Un homme affublé d’un chapeau de cow-boy cherche un hors-la-loi
 Un teckel, un bouledogue et un fox-terrier cherchent une baballe
 Un musicien bwitish cherche son bwosse à cheveux
 Un chauffeur de bus cherche l’arrêt Picpus
 Un coureur cherche la ligne d’arrivée
 Une baleine cherche son poisson-chat

TroisiemeBrancheextrait

Autant de mauve ferait fondre de douceur n’importe quel patibulaire et rappelle aussi l’appartement de Monica & Rachel dans Friends : on ne quitterait sous aucun prétexte cette couleur pastel (vous trouvez cette comparaison étrange ? nous aussi.) Avec cet album c’est la même chose, on veut rester dans cet environnement calme à l’atmosphère poétique. Et attention c’est un livre-jeu, un cherche-et-trouve original toujours avec ce ton audacieux et humoristique emblématique des Fourmis Rouges. Vous percerez le mystère de la baballe bleue disparue, verrez l’arrêt Picpus là où le chauffeur a échoué et la jolie chenille à lunettes vous attendrira lorsque vous la rencontrerez.

Cette fillette part dans les méandres de son imagination, un méli-mélo bien orchestré par Alexandra Pichard qui vous emportera tout en haut de cet arbre labyrinthique. Essaie t-elle de se rassurer en se disant que si son papa n’est toujours pas rentré c’est qu’il a d’autres préoccupations ? Tout comme les personnages à qui elle a demandé de l’aide pour retrouver son chat, ils étaient tous affairés à autre chose. S’apercevoir que nous ne sommes pas le centre du monde, cela s’appelle t-il grandir ? L’apprentissage de la patience n’est-il pas synonyme de maturité ?
Merci Alexandra Pichard de nous avoir remémoré les années 90 et d’avoir battu Jacques Pradel : cet album est un bien meilleur divertissement que l’émission Perdu de vue.

Troisième branche à gauche, Alexandra Pichard (Les Fourmis Rouges)
disponible depuis le 5 novembre 2015
9782369020493 – 16.50€
à partir de 3 ans

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Dylan Dubois – Martine Pouchain

Après que sa mère eut quitté le foyer, le père de Dylan sombra dans l’alcool et l’adolescent fût envoyé en foyer. De retour aux côtés de son paternel, il se rend vite compte que la nouvelle petite amie de son père Cynthia, est polluante, manipulatrice et à la suite d’événements peu conventionnels, Dylan va s’enfuir et passer par la case forêt…

★★★★☆

dylanduboisOn se prend vite d’affection pour Dylan, 15 ans en quête de stabilité. Lors de son retour, il retrouve la maison familiale affublée d’une belle-mère et de son fils Pedro. La cohabitation se fait difficilement mais cela saute aux yeux : Dylan fait moult efforts et compromis qui ne sont absolument pas reconnus ni récompensés. Martine Pouchain, qui a formidablement réutilisé le mythe de la marâtre, nous offre la version 2.0 de la belle-mère de Blanche-Neige. Sournoise, fainéante, d’une beauté fatale, à tendance escamoteuse, qui a toujours raison, usant de ses charmes pour parvenir à ses fins…tout ce qu’il faut pour vous faire frémir de rage tant les injustices dues à son comportement sont répétées et révoltantes. Elle finira par aller trop loin dans la manipulation, bien après avoir joué avec les cordes sensibles de l’adolescent jusqu’à utiliser des moyens abjects voués à exciter le jeune homme. Dylan, en pleine ambivalence va commettre un acte plus ou moins violent. En plein désarroi, il fuira vers des contrées inconnues mais favorables. Lorsque Dylan rencontre Gus, un ermite vivant en plein cœur de la forêt en parfaite autonomie : nous assistons à la maturité qui fleurit de l’adolescent grâce à la sagesse bonifiée du vieil homme. J’apparente ce roman avec la série Kung Fu : Dylan Dubois est Petit Scarabée, en fuite après avoir frappé sa belle-mère qui elle-même ravage la vie familiale. Il dispose d’une arme solide contre ses ennemis : la réflexion 🙂

A travers ses lectures de Steinbeck, de Kerouac et de Henry David Thoreau, Martine Pouchain nous emporte au fond de nous-même et de nous place face à nos questionnements fondamentaux : qui sommes-nous ? De quoi sommes-nous capable ? Même si l’adolescent est le principal concerné, je dis « nous » car ces questions vous serons familières lors de la lecture. A défaut d’appels de phares, Martine Pouchain nous fait des appels forestiers (elle était vraiment pourrie cette phrase, je ne peux pas croire que j’ai écrit un truc pareil).

Dylan Dubois, Martine Pouchain (Sarbacane), collection Exprim’
à paraître le 4 novembre 2015
9782848658216 – 15.50€
à partir de 14 ans

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Maman Renard – Amandine Momenceau

COUV-RENARDS

Premier ouvrage publié de l’auteur, cet album est insoutenable de mignonnerie. On le repose avec la satisfaction de posséder un ouvrage de qualité, une création intemporelle…on aimerait que ce livre devienne un classique. Amandine Momenceau, assez doué de ses dix doigts maispasque (oui on a lu sa bio, on se renseigne ma petite dame chez Bob et Jean-Michel), découpe en long en large et en travers rendant le final poétique et presque animé.

★★★★★

L’histoire est efficace : par une belle journée d’hiver ensoleillée, quatre renardeaux gambadent allègrement dans la neige et échappent à la surveillance de leur mère. La partie de « cache-cache » est lancée et fonctionne à merveille grâce aux animations de l’auteur. Le but est de nous balader de page en page, les découpes laissant belle part à la découverte des éléments cachés. Divertissant à souhait, le calme s’impose au fil des événements tant on se laisse porter par gaillardise des petits. Si jamais vous ressentez un soupçon d’inquiétude à la lecture ne vous faites aucun souci : tout se passe à merveille, Amandine Momenceau n’a pas réalisé un album sur la chasse et tous les petits finiront par se pelotonner contre leur mère.

Afin de vous rendre compte des animations, l’Agrume a publié une chouette vidéo de démonstration

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Maman Renard, Amandine Momenceau (L’Agrume)
disponible depuis le 20 octobre 2015
9791090743328 – 18€
à partir de 3 ans

 

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Tout revivre – Mélody Gornet

Lorsqu’un auteur écrit son tout premier livre et qu’il est aussi percutant, il est important de le souligner.

 ★★★★☆

toutrevivre

Sophie vient de périr dans un accident de voiture, laissant seuls ses deux fils Jordan et Matthis qui vont devoir cohabiter avec leur père, sa femme ainsi que leurs deux filles Oriane et Axelle. Une cousine de Sophie, Solveig se révèle assez touchée par le décès de sa tante et le destin de ses neveux ne la laisse pas indifférente. Elle décide de renouer avec eux et de les embarquer dans son projet de restauration de sa maison. Roman à trois voix, il explore avec perspicacité et rigueur les affres du deuil.

Comment parler d’une personne disparue alors qu’elle manque cruellement ? Comment gérer son deuil ? Mélody Gornet nous raconte l’essentiel, sans un mot de trop. Pas le temps de s’épancher sur les scènes que nous lisons car à l’image de la vie, le temps ne s’arrête pas et il faut avancer jusqu’à ce que la douleur s’estompe. En perdant leur mère et probablement leur unique point de conversion, les garçons sont propulsés au coeur d’une famille qui ne l’attendait pas. Oriane, nouvelle adolescente de 13 ans, n’accepte pas d’avoir perdu sa chambre qu’elle partage avec sa cadette Axelle, en faveur de ses demis-frères. Leur père ne leur accorde que peu d’attention malgré l’immensité du chagrin qui les habite, causant de nombreux problèmes sur leur état psychique. Seule Sonia, belle-mère à plein temps ne semble pas être un frein au bon fonctionnement du quotidien de la maison.

Matthis…

…se révèle le plus percuté par la mort de sa mère et le bouleversant aussi. Probablement le personnage qui m’a le plus touchée. Son premier cauchemar est le plus traumatisant qu’il m’ait été donné de lire : une femme d’apparence charmante lui cuisine des cookies, puis tout bascule :
– Tu ne sais pas où tu es Matthis ?
Elle posa devant moi une assiette de cookies chauds
[…] Elle approchait son visage un peu trop près du mien. Ses iris s’assombrissaient et grandissaient lentement, mangeant tout le blanc à l’intérieur […] – Mange tes cookies, Matthis. Je sentis une odeur horrible et regardai mon assiette : ils étaient moisis, et des vers blancs grouillaient à leur surface. Quand je relevai la tête, la femme avait les yeux complètement noirs, comme ceux d’un corbeau, et elle me sourit, exhibant une rangée de dents pourries […] – Tu as oublié de manger tes cookies, Matthis […] – Tu as oublié ta mère, Matthis.

Deux pages qui m’ont fait froid dans le dos. Aurait-il peur que sa mère tombe dans l’oubli ? Pour une telle description, je suis persuadée que notre nouvel auteur chouchou a du regarder quelques films d’horreur pour être aussi bien inspirée (arrête Mélody, on sait). Mais reprenons : ce n’est que le début du traumatisme pour le jeune garçon qui en plus d’être effrayé par son sommeil le sera aussi par les ombres et les reflets dans les miroirs…Le harcèlement au collège dont il sera victime ne sera que la goupille qui fera exploser toute la tristesse qu’il lui reste à évacuer.

Jordan,

en guise d’ultime affront envers son père qui ne lui accorde aucune sollicitude, réagira par la violence. On sait pertinemment que le manque d’égard de son paternel ne représente qu’une mince excuse : sa gestion du deuil est plus compliquée. Expulsion du collège, offense brutale contre sa petite amie…la colère l’enflamme à longueur de journée, mais finira par s’éteindre. Quant à…

Solveig

Elle a finalement peu fréquenté sa tante Sophie mais la compassion qu’elle ressent pour ses cousins et l’envie qu’elle éprouve de mieux les connaitre la pousse à passer du temps avec eux, les aider à surmonter cette épreuve douloureuse. Mais secrets de polichinelle oblige, il y a d’autres éléments à découvrir dans ce roman et bien sûr : nous ne dirons rien. Oui, nous ne sommes pas des filles très sympas.

Tout revivre, Mélody Gornet (Thierry Magnier)
disponible depuis 22 octobre 2015
9782364747722 – 12.90€
à partir de 13 ans

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La machine à câlins – Scott Campbell

machineàcâlins

Si vous n’avez pas été câliné aujourd’hui, gaffe à la machine à câlins qui traîne sournoisement à la recherche de sa proie. Cet agresseur pour le moins tendre vous attend peut-être au coin de la rue, tapi dans l’ombre, prêt à vous enlacer le plus chaleureusement possible… Un petit garçon se réinvente « robot » doté d’un super pouvoir : la machine à câlins est lancée et personne ne peut y échapper.

★★★★★

Irrésistible, cet album plein d’humour et de tendresse (indéniablement) définit avec brio la définition du câlin : une arme encore méconnue qui peut faire des dégâts comme vous rendre souriant, détendu, un geste simple qui signifie beaucoup. L’un des plus grands moments de l’album reste celui du porc-épic qui bien évidemment n’est pas approché tous les jours par qui que ce soit mais cela gène t-il La machine à câlins ?! Néni ! Armé de maniques et d’un casque, cet animal déboussolé repartira le coeur tout chamboulé par l’étreinte qu’il a reçu. Et admirez les expressions de l’ours et la tortue :
extraitmachineàcâlins
Alors la tortue personnellement je ne m’en remets pas : elle a un petit air narquois qui me plaît bien. Vous connaissez Scott Campbell ? Il a travaillé pour le magazine Nickelodeon (yeah) et vous aurez sans doute reconnu le trait de ses illustrations dans ses deux ouvrages édités chez Cambourakis Les grands duels du cinéma (tome I et II) et après concertation avec Bob nous trouvons que c’est un chouette auteur aux livres pétris à la dérision et à la malice. Son site est ici si vous souhaitez le découvrir un peu plus.

Pour vous exercer à câliner comme il faut : faites comme Will, trouvez un arbre.

Nous sommes très déçus avec Bob d’avoir raté cette semaine si particulière l’an dernier, cétait vraiment une idée originale 🙂
hugabookweek

La machine à câlins, Scott Campbell (Little Urban)
disponible depuis le 9 octobre 2015
9782374080000 – 10.50€
de 2 à 102 ans

Les câlins préservent la santé, étreignez-vous 5 à 10 fois par jour. Tout abus est recommandé