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L’ourse – José Ramon Alonso & Lucia Cobo

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Vous avez sans doute vu ces adorables vidéos de bébés hippopotames ou girafes nés dans les zoos dernièrement ? Eh bien chez Bob & Jean-Michel, on vous propose d’assister vous aussi à une superbe naissance, celle d’un petit ourson. ❤

C’est l’automne. Pour la dernière fois avant son hibernation, une ourse s’enfonce dans la forêt à la recherche de graines, de fruits, de nourriture. Puis l’hiver est là, et l’ourse s’endort. Lorsqu’elle se réveille, ce n’est pas la fin qui lui tiraille le ventre, mais un tout petit…

★★★★★

C’est avec douceur et simplicité que José Ramon Alonso, biologiste de son état, nous raconte l’histoire de cette ourse, oscillant entre l’album et le premier documentaire. Au gré des saisons, nous suivons ainsi cette majestueuse créature dans sa préparation à l’hibernation, qui fait ses provisions pour l’hiver et construit l’habitat qui lui permettra de dormir au chaud au cœur de l’hiver. Jusqu’à son réveil où le printemps est revenu et, avec lui, l’ourson qui s’agite dans son ventre, prêt à découvrir le vaste monde. Si tout cela nous est dit de façon épurée, le texte est également très poétique et on s’imagine très bien le susurrer à l’oreille de l’enfant.

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De même que l’émerveillement sera total quand il faudra tourner les pages. Les illustrations de Lucia Cobo, à l’acrylique, sont extraordinaires ! C’est l’illustration de couverture qui ouvre l’album, et on se retrouve instantanément aux côtés de cette ourse, subjugué par son regard avant de la suivre dans sa dernière balade dans la forêt. La poésie des mots de José Ramon Alonso se retrouve complètement dans les images de Lucia Cobo, d’une grande maîtrise et qui ajoute dans ses tableaux l’évocation du cycle de la nature suggérée par le texte. Des illustrations d’autant plus belles et invitant à la contemplation que l’album est un grand format.

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Un album sublime autour de la maternité, de la vie qui se perpétue et de ses bonheurs simples.

L’ourse, José Ramon Alonso, illustré par Lucia Cobo (Didier Jeunesse)
disponible le 19 avril 2017
9782278085378 – 14,20€
à partir de 2 ans
Son
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La bibliothèque des citrons – Jo Cotterill

Il n’y a pas que les oignons qui font pleurer quand vous les épluchez. Les citrons aussi, même quand on en a pas dans la vraie vie mais juste sur la couverture d’un livre, Bob peut en témoigner à grand renfort des mouchoirs…

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Calypso a dix ans, n’a aucun ami à l’école et se réfugie dans les livres de sa bibliothèque, hérités de sa maman décédée quelques années plus tôt. Elle vit seule avec son père, un écrivain qui s’est donné la tâche d’écrire une histoire encyclopédique du citron. Un jour, une nouvelle arrive à l’école. Elle s’appelle Mae et va bousculer les habitudes de la solitaire Calpyso, lui faisant découvrir toute l’étendue du mot « amitié ».

★★★★★

A la mort de sa mère, Calypso n’avait que cinq ans. Très vite, son père lui a appris à barricader ses émotions, à se montrer forte et ne pas pleurer à la moindre contrariété. Lui-même a fait la même chose et s’est abîmé dans son travail, la correction de manuscrits, puis l’écriture de son chef d’œuvre : un livre consacré aux citrons ! (Ne riez pas, c’est très sérieux !) Alors Calypso a grandi seule avec son père, et même seule avec elle-même et ses livres, ceux que sa mère avait quand elle était petite. Des classiques de la littérature anglo-saxonne qu’elle dévore et qui lui permettent de s’évader et d’apprendre tout un tas de choses. Si cette vie semble lui plaire, il y a pourtant des à-côtés pas très chouettes : il y a longtemps qu’on ne lui a pas acheté de nouveaux vêtements, son papa oublie souvent de faire les courses et c’est elle qui cuisine, ou plutôt qui fait griller les tartines avec du fromage fondu ou des restes de fond de placard. Mais tout cela lui semble « normal »…jusqu’au jour où elle fait la rencontre de Mae, qui veut très vite devenir son amie. Malgré ses réticences, Calypso va se laisser entraîner dans cette amitié naissante et découvrir qu’elle a beaucoup de choses en commun avec la nouvelle, à commencer par l’amour des livres et des mots. Au fur et à mesure que leur complicité grandit, Calypso va progressivement se rendre compte que sa vie avec son père n’est pas véritablement « normale » et qu’un papa ne devrait pas autant laisser seul son enfant…

La bibliothèque des citrons est un coup au cœur, une lecture qui ne peut pas vous laisser insensible, Bob en avait d’ailleurs les yeux très très humides (mais comme il lisait dehors, c’était à cause du vent, hein !). Jo Cotterill nous émeut par cette description d’une relation inversée entre un père enfermé dans son chagrin contenu et une petite fille qui a du grandir trop vite et assumer son quotidien et celui de son père toute seule. Il n’y a aucun pathos, aucune volonté de faire pleurer dans les chaumières mais une réflexion sensible et intelligente sur notre façon de gérer le deuil, sur l’importance de s’ouvrir aux autres, de demander et d’accepter de l’aide, et sur la puissance de l’amitié. L’écriture est toute en retenue et pleine de douceur, à l’image de Calypso, et c’est sans doute aussi ce qui la charge émotionnellement. Il y a également l’atmosphère, cette maison un peu perdue au fond d’un jardin où la nature a repris ses droits, où il fait froid, son allure de demeure ancienne, voire hantée, où se trouvent tous les vieux livres de sa mère (des classiques que l’on a d’ailleurs bien envie de découvrir pour ceux qu’on ne connaît pas). La solitude de cette petite fille nous transperce et son amitié avec Mae, salutaire et généreuse, lui ouvre les yeux et le cœur et lui apporte l’espoir de surmonter enfin ce chagrin aux côtés de son père. La bibliothèque des citrons est un roman bouleversant et débordant d’amour, à lire absolument !

La bibliothèque des citrons, Jo Cotterill, traduit par Charlotte Grossetête (Fleurus)
disponible le 14 avril 2017
9782215133315 – 16,90€
à partir de 10 ans
Son
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La petite romancière, la star et l’assassin – Caroline Solé

Il y a deux ans, Caroline Solé sortait un premier roman percutant qui avait beaucoup plus à Bob. Cette année, elle récidive avec un roman au titre tout aussi long, toujours aussi percutant et avec une nouvelle manière d’aborder l’adolescence et la célébrité…

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Cheyenne a quinze ans et décide de mettre à profit les vacances sans sa famille pour réaliser son funeste projet : en finir avec la vie. Mais voilà que la célèbre actrice qui vit en face de chez elle débarque dans sa belle villa et que, une nuit, Cheyenne est témoin d’une scène étrange : un homme enterre le cadavre d’un enfant dans le jardin…

★★★★☆

C’est un rapport de police, mentionnant la découverte du cadavre d’un enfant dans la poche duquel figurait le portait de la star, qui ouvre le roman où les trois personnages principaux vont être interrogés. On commence avec Cheyenne, jeune fille mal dans sa peau qui voulait profiter de l’absence de sa famille pour mettre fin à ses jours mais qui, faute d’un peu plus de courage, se met à jouer les Fenêtre sur cour. Puis c’est au tour de Tristan, assistant de la star qui vit en face de chez Cheyenne, de raconter sa présence dans cette histoire et son désir de devenir cinéaste. Et enfin l’actrice, celle dont tout le monde parle et dont personne ne sait véritablement rien de sa triste vie. Comment ses trois personnages totalement différents peuvent-ils être liés ? Ont-ils vraiment quelque chose à voir avec le cadavre repêché de cet enfant ?

C’est bien la question qui nous taraude jusqu’à la fin du roman. Car, de déposition en circonvolutions, chacun des personnages va nous révéler bien plus que ce qu’ils pensent. Cela ne sera sans doute d’aucune aide à la police pour résoudre son affaire, mais cela nous ravira, nous lecteurs, de découvrir l’envers du décor, comment l’une assiste à une scène terrible, comment l’autre révèle la vérité sur son geste et comment la dernière observe malgré son absence. Ce procédé du huis-clos de la salle d’interrogatoire où chacun parle sans s’arrêter, jamais interrompu, fonctionne particulièrement bien, faisant monter la tension, nous emmenant sur des fausses pistes et révélant petit à petit le fin mot de l’histoire. Mais là où Caroline Solé est vraiment forte, c’est dans sa dépiction de l’adolescence et de ses affres, la dépression terrible dont souffre Cheyenne, la marginalité (on remarquera d’ailleurs que Christopher n’est pas loin…), la solitude induite par la célébrité. Des thèmes déjà abordés dans son précédent roman, qui trouvent une toute autre dimension dans ce récit à plusieurs voix particulièrement touchant.

La petite romancière, la star et l’assassin, Caroline Solé (Albin Michel Jeunesse)
collection Litt’
disponible depuis le 29 mars 2017
9782226396716 – 12€
à partir de 13 ans
Son
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Baleine rouge – Michelle Montmoulineix

9782330075835,0-4045933

Delphine part en vacances au bord de la mer avec son père et sa belle-mère qu’elle n’apprécie pas. En se promenant sur la plage, elle fait la rencontre d’une vieille femme qui semble confondre les couleurs et qui, chaque soir, s’en va nager au loin. Intriguée, Delphine et son nouvel ami Thomas se rendent chez Léandre, un vieil homme qui va leur conter l’histoire étonnante d’Eliaz, mousse breton du siècle dernier, et de Skye, jeune baleine bleue.

★★★★☆

Quel rapport entre Delphine, adolescente du 21e siècle à la famille recomposée et dont la mère lui manque affreusement après qu’elle soit partie un jour sans laisser d’adresse, et Eliaz, jeune garçon de onze ans engagé comme mousse sur un terre-neuvier pour rapporter de l’argent à ses parents en des temps difficiles ? Ahah, je ne vous le dirais pas ! Mais sachez que cela concerne évidemment l’océan et les majestueuses baleines qui vivent dans ses eaux. Le roman fait la part belle au récit d’Eliaz, conté par un personnage de vieil homme malicieux qui ne refuse pas de raconter les légendes du village à de jeunes ados curieux. Un procédé assez classique mais qui fonctionne toujours aussi bien : on réagit comme Delphine et Thomas à chaque rebondissement de l’histoire. Et cette histoire, c’est celle d’Eliaz et de son étonnante amitié avec une baleinelle (ouais, c’est rare mais ça se dit) prénommé Skye. Je ne vous en dis pas plus, même si les lecteurs avertis verront sans doute où tout cela va.

La beauté du roman vous frappera par sa description du monde sous-marin et de celui des baleines. Notre imaginaire nous les présente douces, majestueuses, puissantes. Michelle Montmoulineix nous en fait le même portrait et y ajoute, sans qu’on s’en rende compte, tout un tas d’informations étonnantes sur ces superbes créatures. Je crois que les passages concernant Skye et sa mère Blow sont mes préférés, on y sent tout l’amour et toute la sensibilité de l’auteure pour les baleines. Des moments poétiques qui contrebalancent la dureté de la vie d’Eliaz sur le terre-neuvier, du mal de mer aux brimades du second. Mais grâce à la musique de son violon et aux étranges sculptures du saleur Lullan, indien du Canada, Eliaz va voir sa vie changer radicalement… Par bien des aspects, le récit de Léandre va toucher Delphine en plein cœur et la perte de sa mère la ronger sérieusement. La vieille et « folle » Marina lui apportera-t-elle les réponses qu’elle cherche ?

Baleine rouge est une histoire intemporelle somme toute classique mais qui apporte un vrai souffle d’aventure, avec des sensations et une universalité qui m’ont parfois rappelé les textes de Michael Morpurgo. Si vous aimez les baleines, comme Bob, alors vous n’en serez que plus conquis par ce texte aussi doux et éthéré qu’un moment passé dans la sérénité de l’océan.

Baleine rouge, Michelle Montmoulineix (hélium)
disponible depuis le 15 mars 2017
9782330075835 – 13,90€
à partir de 10 ans
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Hors-champ – Chiara Carminati

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Ce qu’on aime dans la collection Encrage, à la Joie de Lire, c’est découvrir la littérature européenne (mais pas que !) de qualité, ses auteurs que l’on apprend à connaître à travers de très beaux textes, parfois durs, parfois poétiques mais qui, toujours, nous transportent. Cette fois, notre rendez-vous est en Italie…

Quand la guerre éclate, Jolanda et sa famille sont obligés de quitter l’Autrice où ils vivaient depuis plusieurs années afin de rejoindre leur pays d’origine, l’Italie. Très vite, son père et son frère aîné sont envoyés sur le front pour combattre les autrichiens. Bientôt suivis par son autre frère et son meilleur ami Sandro, qui lui vole un baiser. Jolanda se retrouve alors seule avec sa mère, sa petite sœur Mafalda et leur ânesse Modestine. Mais un jour, leur mère est arrêtée et les deux filles sont livrées à elles-mêmes…

★★★★☆

Au cinéma, le hors-champ c’est la partie de la scène qui n’apparaît pas dans le champ de la caméra, ce qui n’est pas enregistré dans le film. Dans ce roman autour de la Première Guerre mondiale, ce ne sont donc pas les combats qui intéressent Chiara Carminati, les soldats sur le front, les tactiques des généraux, les prises de territoires ou le vainqueur de la guerre, mais ceux qui ne figurent généralement pas à la une des journaux, dans les films ou les livres d’histoire. L’auteure n’utilise finalement la guerre que pour évoquer une histoire de femmes, de famille. Il est cependant intéressant d’assister à cette guerre du point de vue des italiens, car il est assez rare, même dans nos livres d’histoire, d’évoquer la situation des autres pays européens. Cela dit, il vous faudra tout de même vous procurer d’autres livres plus précis si l’Italie pendant la Première Guerre mondiale vous intéresse car il s’agit ici uniquement d’éléments de contextes. . Car, comme je vous le disais, le cœur du sujet, ce sont les femmes, ce sont Jolanda, Mafalda, leur mère et les deux femmes dont cette dernière ne leur a jamais parlé et qui vont pourtant devenir des personnes importantes pour les deux enfants. Lorsque Jolanda et Mafalda se retrouvent sans leur mère, arrêtée et exilée loin du village, elles vont trouver refuge à Udine, chez une certaine Adèle, une vieille femme aveugle mais plutôt futée. C’est chez cette « tante » qu’elles vont découvrir un secret de famille, celui de leur mère… Et lorsque les bombardements touchent la ville, les deux filles et la vieille femme vont à nouveau devoir fuir et se rendre dans l’Italie autrichienne…

Le roman de Chiara Carminati paraît sans doute très classique dans ses thèmes, et il l’est, mais son écriture sensible nous transporte instantanément dans cette Italie du siècle dernier et ces destins de femmes. Son originalité tient finalement de l’insertion de photographies…totalement vides ! Après un moment de flottement (euh…une erreur à l’impression ?) et une vérification sur le site internet de l’éditeur, non, pas d’erreur, il n’y a absolument rien sur les photos, seulement cet aspect de photographies anciennes et une légende qui nous invite à imaginer le décor. C’est déroutant au début, et puis on se laisse guider dans ce hors-champ qu’il sera tout aussi important de lire que l’histoire. Une belle découverte de la littérature italienne !

Hors-champ, Chiara Carminati, traduit par Bernard Friot (La Joie de lire)
collection Encrage
disponible depuis le 11 février 2017
9782889083527 – 14,50€
à partir de 12 ans
Son
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Celle qui voulait conduire le tram – Catherine Cuenca

Bob vous parlait de la collection de romans historiques Les Héroïques la dernière fois. Il en a lu encore un qui s’intéresse cette fois au sort des femmes durant la Première Guerre mondiale et c’est toujours aussi bien !

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En 1916, les hommes sont mobilisés sur le front et les femmes prennent leur relève. Ancienne couturière, Agnès devient alors conductrice de tramway, un emploi mieux payé et qui lui plaît beaucoup. Mais lorsque son mari revient, blessé, il supporte mal que sa femme gagne plus que lui. Jusqu’au jour où la paix est déclarée et que les femmes sont envoyées. Révoltée, Agnès s’engage dans le mouvement des suffragettes, attisant encore l’animosité de son mari…

★★★★☆

A travers l’histoire d’Agnès, Catherine Cuenca nous fait découvrir un aspect de la Première Guerre mondiale souvent inconnu, voire ignoré : le travail des femmes pour soutenir l’effort de guerre. Des femmes qui prennent la place des hommes dans des métiers jusqu’alors réservés exclusivement aux genre masculin. Parce que, comme vous le savez, les femmes sont faibles de corps comme d’esprit (*blague, si jamais vous n’aviez pas compris*). Mais malgré la guerre et l’absence des hommes sur des postes utiles au quotidien, le remplacement par les femmes n’est pas forcément vu d’un bon œil. Insultes et mines désapprobatrices de la part de la société masculine comme féminine sont le lot de ces femmes qui « osent » postuler à ces emplois. Et si, comme beaucoup, Agnès est d’abord surprise de voir une jeune femme lui valider son ticket en montant dans le tramway, le perspective de gagner plus d’argent que dans son emploi actuel au sein d’un atelier de couture lui donne très vite l’envie de s’engager dans la compagnie de transport. Une décision qui va changer sa vie : elle va apprendre à conduire des tramways et, au contact de Renée, engagée dans la lutte pour le droit de vote des femmes, se trouver également une cause à défendre.

Mais le poids de conventions sociales, de la croyance de l’infériorité des femmes et de leur rôle uniquement marital, ménager, va clairement être un frein à l’épanouissement complet d’Agnès. D’autant plus quand son mari, Célestin, revient blessé de la guerre puis reprend son poste à l’atelier où il travaillait avec Agnès. Il gagne moins qu’elle, n’apprécie pas qu’elle fasse un boulot d’homme et voit d’un très mauvais œil son association avec des féministes et, pire, des « inverties ». Le vin aidant, Célestin se montre de plus en plus hostile et violent, renforcement d’autant la détermination d’Agnès à améliorer sa vie et celle des autres femmes… Une histoire qui trouve sa conclusion en 1945, avec Luce, la nièce d’Agnès et dont vous pouvez vous douter de l’issue historique.

Avec Celle qui voulait conduire le tram, Catherine Cuenca nous livre un roman passionnant sur l’histoire de ces femmes qui se sont battues pour leurs droits à une époque complexe. Au travers d’un destin, celui d’Agnès et de son héritage, évoqué avec humanité et émotion. Ses rêves, ses doutes et ses actions sont rendus avec un réalisme parfois rude, nous rappelant toute la difficulté à se battre pour nos convictions et la patience requise pour être témoin du changement. Un très beau roman historique à compléter avec le visionnage du film Les Suffragettes, sur le même thème mais en Angleterre, où les femmes obtinrent les droit de vote plus tôt que nous…

Celle qui voulait conduire le tram, Catherine Cuenca (Talents Hauts)
collection Les Héroïques
disponible depuis le 11 février 2017
9782362661549 – 14€
à partir de 13 ans
Son
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Rage – Orianne Charpentier

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Rage. C’est le nom que lui a donné son amie, celui auquel elle se raccroche depuis son arrivée en France, pour oublier son véritable nom, celui de sa vie passée, de l’horreur et du pays qu’elle a fui. Mais en France, elle ne se sent toujours pas en sécurité, se méfiant de tout et de tous. Jusqu’au jour où, lors d’une soirée, sa route croise celle d’un chien dangereux mais blessé, comme elle…

★★★★☆

Une nuit. C’est la durée de cette histoire d’une force et d’une émotion intense. On ne sait pas d’où vient Rage, on ne saura ni son véritable nom ni ce qu’elle a vécu, Orianne Charpentier nous laissant imaginer tout ce que l’on voudra, mais ce n’est finalement pas ce qui compte dans ce très court roman. L’important, c’est cette rencontre décisive. Celle de Rage avec ce chien terrifiant, qui lui fait tout d’abord aussi peur que les hommes de son passé, dont elle est persuadée qu’il va la déchirer. Un chien qui se révèle être une fille, comme elle. Qui subit la maltraitance des hommes, comme elle. Et qui, malgré des blessures graves et profondes, garde la rage. Celle de vivre. Comment un chien peut-il autant lui ressembler ? C’est durant cette nuit tendue, étonnante, étrange, que tout va se jouer. Orianne Charpentier nous livre un roman émouvant, délicat, et d’une belle finesse psychologique.

Rage, Orianne Charpentier (Gallimard jeunesse)
collection Scripto
disponible depuis le 16 mars 2017
9782075082556 – 7€
à partir de 14 ans
Son
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Envole-moi – Annelise Heurtier

9782203122215,0-4031956

Vous le savez (ou pas, d’ailleurs, parce qu’en vrai, on a commenté qu’un seul de ses livres donc c’est pas forcément évident), on aime beaucoup les romans d’Annelise Heurtier chez Bob et Jean-Michel. Son œil aiguisé sur le monde qui l’entoure, sa façon toujours délicate d’évoquer les problématiques de l’adolescence. Cette fois-ci, Annelise Heurtier nous parle du handicap mais aussi, et surtout, d’amour. ♥

Swann rêve de s’acheter la guitare de ses rêves. Pour récolter de l’argent, il participe au vide-grenier de son village. Et ce jour-là, il a un coup de foudre pour la fille du stand d’en face, Joanna. Mais un détail lui a échappé : elle est en fauteuil roulant… Malgré les doutes et les difficultés que le handicap de la jeune fille peut impliquer, ils vont débuter leur histoire d’amour, en dépit de ce que tout le monde peut en penser.

★★★★☆

Et ce que le monde en pense, c’est aussi un peu ce que pense Swann au début du roman. Swann, c’est un peu le beau gosse du lycée : 15 ans, musicien, sorti avec déjà pas mal de filles. Quand il se rend compte que Joanna est en fauteuil roulant, son coup de foudre prend un peu de plomb dans l’aile : que vont dire les gens ? et comment sortir avec une fille qui ne peut pas faire la moitié des choses qu’il faisait avec ses autres copines ? et puis, comment on fait l’amour quand on est en fauteuil roulant ? Des questions qu’il semble évident de se poser mais qui, pour Swann, vont vite être balayées par ce sentiment incroyable qu’il a pour Joanna. Ainsi comment leur histoire, une histoire pas si simple à évoquer devant les autres, de peur du rejet, de l’étonnement ou des ricanements mais qui va grandir au fur et à mesure de ce qu’ils vont vivre, de surprises pleines d’adrénaline en coups de mou à en faire presque exploser leur jeune couple…

Je ne vous en dirais pas plus, pour vous laisser découvrir cette histoire d’amour toute en finesse et en sensibilité. Annelise Heurtier propose une belle réflexion sur le handicap, ne s’interrogeant pas outre mesure sur les difficultés du handicap ou n’y voyant que des obstacles ou des situations discriminantes (même si elles existent et font même partie d’un des enjeux forts du roman), mais bien sur les opportunités et les possibilités de Joanna. Une jeune fille finalement comme les autres, avec ses doutes et ses rêves, ses déceptions et ses surprises. Et avec un petit copain. Car au-delà du handicap, c’est, comme je vous le disais, une très belle histoire d’amour. Un véritable coup de foudre, une relation qui progresse en douceur, qui se noue avec simplicité et complicité, qui se laisse le temps de mûrir, d’affronter les obstacles, de faire mentir les vieilles tantes aigries. J’ai presque envie de dire une histoire d’amour « originale » au regard de tous les autres romans ados où les relations amoureuses sont souvent inutilement complexes de frissonnements et de triangles amoureux, voire malsaines ou douteuses. Mais je dirais plutôt une histoire d’amour très joliment romantique, enrichissante – pour Swann comme pour Joanna (et pour nous) – et pleine d’espoir. Annelise Heurtier montre encore toute sa délicatesse, sa justesse et sa sincérité. Et on aime ça !

Envole-moi, Annelise Heurtier (Casterman)
disponible depuis le 8 mars 2017
9782203122215 – 12,90€
à partir de 12 ans
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Gulistan : contes persans – Saadi

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Aujourd’hui, Bob vous propose un voyage en Orient, à une époque fort lointaine où ne nous attendent ni tapis volants, ni lampes magiques, mais où nous découvrirons que les mœurs et les interrogations n’étaient finalement pas si éloignés de nos préoccupations actuelles… Mais bon, comme Bob est sympa, il vous fait une petite place sur sa carpette enchantée. 😉

★★★★★

Abū-Muḥammad Muṣliḥ al-Dīn bin Abdallāh Shīrāzī (à tes souhaits !), dit aussi Saadi, est un poète et conteur persan du XIIIe siècle ! Il est l’auteur de plusieurs œuvres, dont Gulistan, le jardin de roses, qui fait un peu office de grand texte classique de la littérature orientale. Il s’agit d’un recueil de poèmes en prose et de petites histoires, entre contes moralisateurs et fables, découpé en huit chapitres thématiques (les mœurs des rois, l’amour et la jeunesse, l’éducation, la bonne conduite dans la vie, etc.). Dans ce très bel ouvrage des éditions Courtes et Longues, Jean Poderos et Chloé Fougerouse ont choisi de nous présenter 14 de ces contes persans.

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Et restez bien accrochés à vos babouches, car vous allez en être tout retournés (et pas juste à cause de la conduite chaotique de Bob) ! Dans cet album, impossible de séparer le texte de l’illustration pour en parler, l’alliance des deux forme en effet une livre d’une cohérence et d’une beauté époustouflante ! Des textes très courts, plein d’humour et de sagesse, encadrés et agrémentés de délicates fioritures, comme de la dentelle autour des manches de votre chemisier, où chaque petit conte (ou presque) se termine par un aphorisme, une morale qui vous invite à réfléchir à notre conduite, à nos sentiments ou à nos puissants. Des textes parfois déposés sur des fonds comme des papiers peints aux motifs floraux et volutes orientaux et aux couleurs dans les tons beiges, verts, ocres ou rouges ; et sur des illustrations, au collage et à la peinture, absolument sublimes de raffinement de Reza Dalvand, artiste iranien (qui a déjà gagné pas mal de prix mais dont c’est la première publication française). ECL PdfLivre Gulistan-38-39Ses décors sont d’une somptueuse précision, j’adore tout particulièrement ses maisons et palais, et son style, mêlant inspirations classiques et un grand modernisme, donne un souffle tout particulier à ces textes anciens mais ô combien toujours valables !

Une découverte du patrimoine littéraire iranien à ne pas manquer, surtout aussi richement et magnifiquement illustrée ! ❤ Et si vous voulez lire l’entièreté de l’œuvre de Saadi, sachez qu’elle est disponible chez Albin Michel.

Gulistan : contes persans, Saadi, adaptation de Jean Poderos et Chloé Fougerouse, illustré par Reza Dalvand (Éditions Courtes et Longues)
disponible depuis le 23 février 2017
9782352901761 – 22€
à partir de 8 ans
Son
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Je suis ton soleil – Marie Pavlenko

9782081396623,0-4031862

Déborah entre en terminale et son année commence mal. Non seulement son chien miteux lui a dévoré toutes ses godasses et elle doit se rendre au lycée en bottes de pluie, mais il y a aussi sa mère qui découpe des magazines à en garnir tout le salon, et c’est sans compter son père qu’elle découvre au bras d’une belle inconnue… Heureusement, Déborah va pouvoir compter sur l’amitié toute neuve de Jamal et Victor, sans oublier sa meilleure amie Éloïse.

★★★★☆

Tu pensais en te levant ce matin que ta vie c’était un peu la loose ? Genre t’as pas révisé ton contrôle, ton collant est troué ou le chat a fait pipi sur ton tapis ? LOL. Tu n’as aucune chance contre Déborah, reine de la malchance (ou scoumoune, selon son théorème) qui assiste au chamboulement de sa vie, et pas juste à cause de son chien galeux, Isidore, qui pue du bec et lui détruit ses ballerines. Sa mère agit comme une folledingue, découpant des magazines et collant des post-it partout sur le miroir de l’entrée avec un mystérieux numéro de téléphone et que dire de son père, le sale traître qui embrasse une autre femme ? Et puis sa meilleure amie Éloïse qui s’amourache d’un beau neuneu et la laisse doucement tomber, la contraignant à devenir amie avec Jamal, alias mygale-man et ses dents de cheval et…le beau Victor, le nouveau. Bon, ok, tout n’est pas totalement naze…sauf quand Victor a en fait déjà une copine. Échec et mat.

Mais Déborah a de la chance, c’est Marie Pavlenko qui s’occupe de nous raconter son histoire. Après s’être plutôt illustrée dans les genres de l’imaginaire (Le livre de Saskia, Marjane…), l’auteure nous emmène dans le quotidien ébouriffant de cette ado un peu perdue mais volontaire et pleine d’humour ! Car le roman est aussi lumineux que sa couverture dorée et son titre estival : Déborah est incroyablement drôle et l’écriture enlevée de Marie Pavlenko d’une grande fraîcheur. Le secret des coquillettes sur la couverture vous sera révélé en lisant le roman, tout comme d’autres éléments de l’histoire qui, vous le découvrirez, ne sont pas tous aussi comiques que ce que peut le laisser penser cette chronique, mais la gouaille de cette lycéenne foutraque, son chien-clochard qui schlingue (mais qui est super attachant) et tous les personnages qui gravitent autour d’elle ne pourront que vous ravir le cœur. C’est en tous cas ce qui est arrivé à Bob.

Il y a une vraie justesse dans cette description de l’adolescence, que ce soit dans le ton ou dans les personnages et Marie Pavlenko parvient à nous toucher et à nous bidonner en même temps (ou presque, hein, vous verrez qu’il y a quand même des trucs pas rigolos rigolos). On a dit à Bob que le roman faisait penser aux Petites reines, de Clémentine Beauvais. Au début, il trouvait que non, mais en fait, oui, il est tout aussi jubilatoire, notamment grâce à Déborah, qui n’a en effet rien à envier à la truculente Mireille. Le propos n’est pas le même, mais le plaisir de lecture, assurément ! Bref, laisse tomber les remèdes de grand-mère pour réparer ton collant troué et cours vite te procurer les épatantes aventures de Déborah ! ;D

Je suis ton soleil, Marie Pavlenko (Flammarion jeunesse)
disponible depuis le 8 mars 2017
9782081396623 – 17,50€
à partir de 14 ans