Son
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Tracer – Guillaume Nail

Emjie a perdu ses parents dans un accident de voiture et vit désormais avec son oncle. Malgré l’amitié un peu folle de sa meilleure amie Nitsa et l’histoire d’amour naissante avec le nouveau, Walter, la jeune fille est incapable de faire son deuil, la tristesse prenant toute la place. Et puis, après avoir vu une émission de télé relatant le pèlerinage vers Saint-Jacques-de-Compostelle, Emjie décide de partir et de tracer, seule, sa route…

Seule ? Pas tout à fait. Car cette randonnée de l’Alsace vers l’Aubrac ne se passe pas vraiment comme prévu… D’abord, il y a Nitsa qui s’incruste, avec son babillage incessant, ses chansons de Madonna et sa folle dinguerie. L’envie de solitude en prend un coup ! Et ça, c’est sans compter les imprévus et les rencontres qui foutent en l’air un itinéraire savamment préparé, les disputes et les soirées où on oublie tout…bref, la vie ! Car le cheminement d’Emjie sur la route de Compostelle n’a absolument rien de religieux ou de spirituel mais est bien celui de la reconstruction de soi, de la résilience. Et lorsque la jeune fille se retrouve enfin seule sur les chemins du GR, c’est enfin l’occasion de se confronter à elle-même, d’apprivoiser sa peine, d’accepter la perte.

En dépit de la gravité du sujet, le roman n’a rien de plombant, et ne tombe jamais dans le pathos ! Tracer est au contraire un roman lumineux, porté par une héroïne certes aux prises avec des émotions difficiles et compliquées, mais démontrant surtout une force et une volonté qui vont la porter jusqu’au bout de son projet, et de sa recherche d’un peu de bonheur perdu. Le ton est donné : simple, direct, à fleur de peau. Si Guillaume Nail réussit à évoquer la douleur de la perte avec autant de sensibilité que de rudesse, il parvient également à nous offrir des scènes très drôles autant que de jolis instants de grâce à travers des rencontres humaines que l’on n’oublie pas. Le chemin d’Emjie est parfois semé d’embûches, mais il est toujours porté par l’espoir, par l’objectif qu’elle s’est fixé, et par la volonté de parvenir à se sentir à nouveau vivante.

Tracer, Guillaume Nail (Le Rouergue)
collection DoAdo
disponible depuis le 5 février 2020
9782812619212 – 13,50€
à partir de 13 ans
Son
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Cassidy Blake, t.1 Chasseuse de fantômes – Victoria Schwab

Il y un an, Cassidy a failli se noyer. Depuis, elle est capable de traverser le voile qui sépare le monde des vivants de celui des morts, et son meilleur ami Jacob est un fantôme ! Le jour où ses parents, Inspectreurs de leur état, se voient confier l’animation d’une émission télévisée sur les endroits les plus hantés du monde, Cassidy les accompagne de mauvaise grâce à Edimbourg, premier lieu de tournage. Et autant dire que la capitale écossaise regorge de fantômes et d’histoires macabres ! Mais c’est aussi l’endroit où Cassidy va faire la rencontre d’une jeune fille aux mêmes « pouvoirs » qu’elle…

Frissons, mystères et légendes sont les ingrédients de cette nouvelle série fantastique concoctée par Victoria Schwab, déjà remarquée pour ses romans young adults. Dans ce premier tome, parfaite introduction à ce qui ne manquera pas de suivre, on découvre surtout le personnage de Cassidy et son apprentissage d’une vie où le surnaturel n’est plus seulement la passion de ses parents, mais bien sa dure réalité à elle. Traverser le voile n’est pas toujours une partie de plaisir, tout comme découvrir l’histoire de ces fantômes condamnés à hanter un lieu, comme le théâtre de son collège. Alors quand on lui enlève ses vacances d’été habituelles à la plage pour les troquer contre les ruelles sombres et les cimetières d’Ecosse, Cassidy n’est pas particulièrement ravie. Et sa visite de la capitale va lui donner raison : la ville est pleine de fantômes et d’endroits terrifiants ! C’est d’ailleurs là toute la saveur du roman et du personnage de Cassidy, particulièrement juste et à hauteur d’enfant : ce n’est pas parce qu’elle est capable de voir des fantômes qu’elle est pour autant courageuse et sans peur, bien au contraire !

Cette première aventure va mener Cassidy sur les traces d’une redoutable femme-fantôme qui enlève des enfants. Mais aussi à la découverte de sa véritable nature, qui va l’amener à reconsidérer tout ce qu’elle croyait savoir – bien peu ! – sur son étrange faculté, et sur son amitié avec Jacob, qui lui cache sans doute bien plus qu’elle ne le pense. Un roman passionnant et intelligent, qui nous fait également voyager à travers l’histoire d’une ville – et on prend beaucoup de plaisir à redécouvrir des lieux que l’on a visité, pour ceux qui sont déjà allés à Edimbourg – et de son folklore. Une excellente lecture pour tous ceux qui ont envie de se faire un peu peur mais, surtout, d’être embarqués dans une histoire captivante !

Cassidy Blake, t.1 Chasseuse de fantômes, Victoria Schwab, traduit par Sarah Dali (Lumen)
disponible depuis le 30 janvier 2020
9782371022553 – 15€
à partir de 11 ans
Son
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Les chroniques de Prydain, t.1 et 2 – Lloyd Alexander

Pour ceux qui ont grandi avec Le Seigneur des Anneaux ou Les chroniques de Narnia, vous avez sans doute manqué, vous aussi, de cet autre grand classique de la fantasy des années 1960, qui n’avait encore jamais été traduit dans son intégralité en France. Eh oui ! Si Les Chroniques de Prydain et son auteur Lloyd Alexander sont souvent cités comme une inspiration chez de nombreux auteurs anglo-saxons, nous ne pouvions jusqu’alors que hocher la tête en faisant « ah ouais, je vois… ». Mais aujourd’hui, réjouissez-vous ! Les éditions Anne Carrière se sont lancées dans la publication intégrale de la série : le premier tome est sorti en janvier et le cinquième paraîtra en octobre. On vous parle aujourd’hui des deux premiers…

Taram est un apprenti porcher qui ne rêve que d’aventures et de batailles héroïques. Mais son quotidien est loin d’y ressembler et sa tâche principale est de s’occuper d’Hen Wren, une truie prophétesse. Le jour où celle-ci s’échappe de son enclos, Taram est bien obligé de la poursuivre mais, bien vite, l’animal est introuvable. Taram est loin de se douter que cette quête n’est que le début d’une aventure qui va le mener à affronter le terrible Roi Cornu, le seigneur de guerre du maléfique Arawn qui rêve de régner sur tout le royaume de Prydain…

Si le nom de Taram vous dit quelque chose, c’est normal ! Son histoire (ou une partie) a en effet été adaptée par les studios Walt Disney dans les années 1980 avec Taram et le chaudron magique. Dans le roman, en tous cas, ce qui semble démarrer comme une quête annexe dans un jeu vidéo est surtout le moyen de nous présenter Taram, un jeune héros un peu antipathique, mécontent de sa situation et qui va devoir faire preuve de qualités qu’il ne possède pas comme il le croit. Sa rencontre avec le prince Gwydion, grand héros de guerre, va déjà lui remettre les idées en place et, bientôt, ce sont tous les autres compagnons de voyage qui vont lui permettre de trouver sa place, de se rendre compte de ses vraies forces et qualités. Ainsi allons-nous faire la connaissance de Gurgi, drôle de créature menée par son estomac vorace ; Eilonwy, jeune princesse un peu sorcière qui ne s’en laisse pas conter ; Fflewddur, ancien roi devenu barde errant ; et Doli, un nain bourru qui s’évertue à devenir invisible. Une équipée pas franchement héroïque mais qui insuffle la dose d’humour, de courage et de ruse qui leur permettront à tous de mener une aventure digne des meilleures chansons épiques !

Si l’on retrouve tous les ingrédients d’un bon roman de fantasy aux inspirations de mythologie galloise, avec tous ses lieux attendus, les deux premiers tomes des Chroniques de Prydain sont tout de même particulièrement étonnants : le personnage d’Eilonwy est tout à fait intéressant par son côté féministe ; si Taram et ses compagnons vivent nombre d’aventures par tome, ils ne sont pourtant jamais au cœur de batailles grandioses ou bien d’événements importants qui leur sont relatés ensuite (ou en prise directe avec le grand méchant qui n’est pour le moment qu’un nom lointain) ; et ce sont surtout les apprentissages de Taram qui comptent plus que les victoires sur un ennemi. Le deuxième tome est particulièrement rude pour le caractère de l’apprenti porcher, qui va devoir apprendre à prendre sur lui pour se montrer plus honorable que d’autres, et ainsi apprendre à grandir et devenir meilleur, avec l’aide de ses amis.

Si chaque tome propose une aventure qui débute et se termine, il est vraiment passionnant de suivre l’évolution de Taram et de ses compagnons de route à travers leurs tentatives de mettre des bâtons dans les roues du terrible Arawn, tout en revenant à chaque fois à leur point de départ, la ferme de Caer Dallben où chacun retrouve ses occupations. Mais l’aventure n’est jamais bien loin du bout du chemin… Bref, on ne peut que vous recommander cette série intelligente, drôle, un peu effrayante et surtout captivante !

Les chroniques de Prydain, Lloyd Alexander, traduit par Marie de Prémonville (Anne Carrière)
1. Le livre des trois
disponible depuis le 17 janvier 2020
9782843379772 – 15€
2. Le chaudron noir
disponible depuis le 21 février 2020
9782843379789 – 15€
à partir de 10 ans
Son
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Une vie en milonga – Fanny Chartres

Alma vit à Brest avec ses parents qui gèrent le café Sans Souci et son petit frère sourd. Elle est passionnée de plongée sous-marine, adore sa meilleure amie Apolline aux looks excentriques et rêve de parler au beau Félix. Le jour où la mère d’Alma veut imposer à son petit frère Angelo de porter des implants cochléaires, le monde d’Alma vacille…

Fanny Chartres nous avait profondément touché avec son émouvant et lumineux Solaire. Elle nous démontre encore une fois toute sa sensibilité et tout son talent à dépeindre des fratries d’une grande justesse. Alma et Angelo sont très proches, la plus grande toujours là pour prendre soin de son petit frère et lui signer les conversations des clients du café, ou celles de son entourage quand il ne peut pas lire sur les lèvres. Sourd depuis la méningite qui a failli lui coûter la vie un jour de match de coupe du monde, le petit garçon se fait très bien à cette vie sans sons. Sauf quand sa mère n’accepte pas son handicap et qu’elle voudrait un petit garçon « normal », qui puisse suivre la classe avec les entendants, même si les implants le gênent, même si sa langue, c’est la LSF. Une incompréhension qui plongent Angelo comme sa mère dans une certaine douleur, jusqu’à ce que l’orage éclate !

Touchante et passionnante, Fanny Chartres nous offre une histoire de famille d’une grande richesse, saupoudrant son récit de disparitions en mer, d’Argentine dansante, de légendes marines, de culture sourde, de préjugés qui éclatent ou encore d’une très belle leçon de solidarité. Mais c’est bien sûr aussi un roman qui invite à réfléchir à la différence et à l’acceptation de celle-ci. L’occasion d’évoquer la culture sourde et la LSF, un sujet que l’on a déjà pu lire dernièrement chez Florence Medina (Direct du cœur, excellent pour les ados) ou encore Alex Gino (Tu crois tout savoir, Jilly P., avec un point de vue américain).

Une vie en milonga, c’est la magnifique et profonde relation entre une sœur et son petit frère, un roman sensible, poétique et bienveillant, qui fait également la part belle à toute une galerie de personnages aussi différents que drôles, mystérieux ou surprenants. A découvrir absolument !

Une vie en milonga, Fanny Chartres (L’école des loisirs)
collection Médium
disponible depuis le 29 janvier 2020
9782211306096 – 13,50€
à partir de 11 ans
Galerie
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Wicca : le manoir des Sorcelage – Marie Alhinho

Lisette a une confession à faire, elle adore l’univers de la sorcellerie, tout ce mouvement femme sorcière, femme sœur-cière qui s’émancipe…fait chaud à son petit cœur de bébé loutre.

Wicca nous présente la famille Sorcelage, une famille de sorciers très attachante, composée notamment d’Octobre et Avril, frère et soeur. Octobre est un hypersensible qui ressent les émotions et peut les influencer et Avril peut créer des tremblements de terre à chaque colère. Un jour, le cercle de pierres qui protégeait la région se brise, mettant tout le monde en danger… Ils vont devoir compter sur leur meilleure amie humaine Nour et un feu follet craquant pour empêcher des forces maléfiques de resurgir.

Dans ce manoir, pas de chat noir, ni balai, ni potion magique à base d’oeil de lézards. La magie utilisée par les Sorcelage – comme l’indique le titre – est une ancienne magie païenne : la Wicca (Ce mouvement religieux existe bel et bien et prône un culte à la nature, une belle découverte pour Lisette qui pense se reconvertir). On retrouvera, par exemple, dans le livre un petit précis à l’usage des wiccans indiquant qu’il faut «  S’aimer soi-même (même si c’est dur le matin) », un rituel de protection, qui viennent renforcer cette ambiance enchanteresse et rendent un aspect véridique à l’histoire.

Histoire qui m’a tenu en haleine, le rythme est bien dosé ! La plume de l’autrice mêle émotions et actions. Tous les personnages sont très attachants : Avril, la colérique douteuse, le sensible garçon Octobre (qui a les cheveux longs sur la couverture, pour vous ça ne veut pas dire grand chose mais pour moi ça veut dire beaucoup !), le feu follet hilarant qui se rend compte qu’être humain c’est douloureux (car oui on peut avoir des crampes et des courbatures) ou encore le manoir au mauvais caractère. Avril et Octobre vont devoir dévoiler leurs pouvoirs à leur amie humaine Nour pour combattre un monstre terrible qui se nourrit des mauvaises pensées que ses victimes s’adressent face à leurs reflets. Un monstre qui parlera aux adolescents mais pas que.

C’est l’illustratrice Diglee qui est aux commandes des illustrations, résultat : Lisette a eu envie de se faire tatouer tous les dessins tellement ils sont beaux ! Heureusement elle n’a pas encore l’âge.

Sous ses airs d’histoire sympathique, ce roman d’aventures/fantasy distille, comme un filtre d’amour, des notions d’égalité, de féminisme et de confiance en soi. Il aborde des préoccupations autour de l’image de soi, du regard des autres, de ses propres insécurités. Le tout de manière très naturelle et bienveillante à la lumière de la magie Wicca.

Un rituel magique est en préparation pour demander à l’autrice d’écrire des nouvelles aventures !

Wicca : le manoir des Sorcelage, Marie Alhinho, illustré par Diglee (Poulpe Fictions)
disponible depuis le 3 octobre 2019
9782377420872 – 12,95€
à partir de 9 ans
Son
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Collectif Black Bone, t.1 Coltan song – Manu Causse, Emmanuelle Urien, Marie Mazas, Maylis Jean-Préau

Souvenez-vous d’U4, la série littéraire dans laquelle 4 auteurs et autrices racontaient une histoire commune vécue par 4 personnages différents. Les éditions Nathan réitèrent l’expérience avec le Collectif Black Bone qui voit cette fois s’associer une éditrice (Marie Mazas), une journaliste (Maylis Jean-Préau), un auteur (Manu Causse) et une autrice (Emmanuelle Urien) pour une série prévue là aussi en 4 tomes, mais portant cette fois sur des sujets brûlants d’actualité !

Marie a 18 ans et vient de perdre sa mère dans un accident. Cette dernière était journaliste et, après avoir été reporter dans des zones de conflit, elle avait accepté de revenir en France pour s’occuper de la rubrique nouvelles technologies. En triant les affaires de sa mère et en regardant dans son ordinateur, Marie comprend que sa mère enquêtait sur les conditions de production d’un tout nouveau smartphone, remettant en cause la thèse de l’accident.

Il y a quelques années, on vous parlait de Blue gold, un roman d’Elizabeth Stewart qui, à travers le destin de trois jeunes filles, nous racontait, entre autres, les conditions de fabrication de nos téléphones portables. Cette même question est au cœur de l’enquête menée par Marie, bientôt aidée de Léo, un jeune hacker qui bossait pour la mère de Marie, et de Andrea, reporter italienne qui est aussi la marraine de la jeune fille. Entre l’Afrique et l’Europe, leur enquête va les mener à s’intéresser notamment aux mines de coltan et à ceux qui les exploitent, quitte à plonger dans un passé qui risque de leur attirer bien des ennuis…

Le Collectif Black Bone nous propose avec Coltan song un premier tome très réussi, parfaitement documenté, où c’est l’enquête journalistique qui prime et où l’on découvre tous les ressorts d’une investigation menée avec intelligence. C’est plutôt passionnant, la narration est efficace, faisant des allers et retours entre le passé et le présent, et le personnage de Marie, parfaitement incarné, nous entraîne dans cette volonté de faire la lumière sur cette affaire, découvrant ainsi ses qualités et ses projets d’avenir…qui se concrétiseront à n’en pas douter dans la suite de la série ! Une première aventure captivante, qui invite à s’interroger sur des sujets de société, sur le rôle des lanceurs d’alerte et, dans un dernier chapitre particulièrement glaçant, sur le cynisme de notre monde… Ça donne envie, non ? 😛

Collectif Black Bone, t.1 – Coltan song, Manu Causse, Emmanuelle Urien, Marie Mazas, Maylis Jean-Préau (Nathan)
disponible depuis le 9 janvier 2020
9782092591086 – 14,95€
à partir de 14 ans
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Et le désert disparaîtra – Marie Pavlenko

Pour cette première chronique en duo, Bob et Lisette se sont penchés sur le tout nouveau roman de Marie Pavlenko qui, après nous avoir fait beaucoup rire (et un peu pleuré), revient avec un texte très différent et particulièrement actuel !

Samaa, 12 ans, rêve de chasser les arbres comme les hommes de sa tribu nomade. Son peuple vit dans le désert, respire dans des bouteilles d’oxygène et se nourrit de barres de protéines. Ils vendent le bohis à la grande ville en échange d’eau et de nourriture. Seule l’Ancienne, un veille femme qui vit à l’écart de la tribu en attendant la mort, se souvient d’un monde ancien où les arbres étaient synonymes de vie. Un jour, Samaa décide de suivre les chasseurs, mais très vite perd leurs traces dans l’immensité du désert. Lors d’une tempête de sable, Samaa se retrouve coincée dans une trouée et découvre un arbre gigantesque, de l’eau… Blessée, Samaa va réaliser que le monde d’avant n’a peut-être pas tout à fait disparu.

Lisette se sent seule dans le désert…

Ce roman très contemplatif, se rapprochant du conte, est un bel hommage à notre Nature. L’écriture de Marie Pavlenko est toujours poétique, lente, on subit avec Samaa le temps qui passe. Mais je crains aussi que certains lecteurs subissent le manque d’action, de suspense.
L’autrice aimerait que ce livre devienne un étendard d’une jeunesse qu’elle admire, cette lecture peut être une première graine dans la tête des jeunes lecteurs pour ouvrir grand les yeux sur ce que pourrait devenir notre monde si nous n’y prenons pas soin.

Lisette, du haut de ses couches culottes, a envie de vous rappeler que : le meilleur moment pour planter un arbre était il y a 20 ans. Le deuxième meilleur moment est maintenant ! Et puis elle serait trop triste si les framboisiers venaient à disparaître.

…Bob garde l’espoir !

C’est justement le côté contemplatif du roman qui a beaucoup plu à Bob. La force de l’écriture de Marie Pavlenko réside dans cette poésie, cette lenteur qui nous rend plus proches de la solitude, de la peur, et des espoirs de Samaa. Un récit fait de silences, qui explore la croyance d’une population qui n’a jamais connu rien d’autre que le désert et son enfer, et d’une jeune fille qui redécouvre tout ce qu’elle tenait pour vrai, tout ce que les arbres apportent au monde. C’est aussi l’histoire d’un combat, qui résonne bien évidemment avec ceux menés par la jeunesse d’aujourd’hui : celui de se faire entendre, de prendre soin de notre Terre qui subit les ravages de l’humanité et de tenir tête à ceux qui détiennent (ou croient détenir) l’autorité ou le savoir. A travers un récit d’anticipation d’une grande humanité, et la magnifique voix de Samaa, Marie Pavlenko nous invite à prendre conscience du caractère précieux de la nature et à la protéger, coûte que coûte !
Vous l’aurez compris, c’est un coup de cœur pour Bob ! ❤

A noter !
> une parution simultanée en livre audio, magnifiquement lu par la comédienne Delphine Cogniard, qui donne à entendre toute l'émotion de ce très beau roman.
> l'attention toute particulière portée à la fabrication du roman, de la façon la plus écologique possible.

Et le désert disparaîtra, Marie Pavlenko (Flammarion)
disponible depuis le 8 janvier 2020
9782081495616 – 14€
à partir de 12 ans
Et le désert disparaîtra (version audio), Marie Pavlenko, lu par Delphine Cogniard (Gallimard)
collection Écoutez lire
disponible depuis le 9 janvier 2020
9782072883927 – 18,90€
à partir de 12 ans
Galerie
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Magic Charly, t.1 : L’apprenti – Audrey Alwett

Qui n’a pas envie en hiver de se faufiler sous une couette avec un thé et un bon livre, me jette la première citrouille ! Si vous cherchez un livre ensorcelant qui vous embarque dans des contrées magiques, Lisette vous conseille de vous ruer sur ce roman français d’Audrey Alwett – le premier tome d’une trilogie.

Charly, notre jeune héros de 14 ans, n’a rien de « magic », il vit avec sa mère et un chat snob. Il 
a une vie tranquille, jusqu’au jour où sa grand-mère, qui avait disparu voilà 5 ans, refasse apparition, mais celle-ci est devenue amnésique. Charly va découvrir que sa mamie fait en réalité partie d’une confrérie de magiciens et qu’on lui a volé ses souvenirs (par un personnage qui n’est pas sans RAPPELER LA MORT DE TERRY PRATCHETT). S’il souhaite l’aider, il va devoir faire une formation express de magicier (oui oui vous avez bien lu) et déjouer un terrible complot.


C’est un plaisir que de plonger dans ce monde magique qui regorge de codes, de nouvelles inventions gourmandes et farfelues. Vous découvrirez par exemple une théière perpétuelle qui fait un thé différent à chaque tasse qu’elle sélectionne en fonction de votre humeur ; des librairies qui marchent ; des moyens de locomotions qui poussent dans le jardin… et d’autres délicieuses inventions que je vous laisserai découvrir. Mais l’autrice dénonce aussi un monde où la magie est rare et donc commercialisée ; où le pouvoir est concentré dans des institutions douteuses…

Charly est un héros très attachant, il est accompagné de deux personnages féminins Sapotille, apprentie magicier comme lui et June, sa meilleure amie sans pouvoir. Ces deux héroïnes (Sapotille est ma préférée, June râle trop) vont aider Charly à gérer de nombreux rebondissements : des balais volants (qui se transforment en buissons), des tartes-chercheuses (qui s’écrasent sur les figures de leurs victimes) ou encore un dragon (pétrifié). Cependant, je me méfie de June qui, sous son air rebelle, pourrait jouer des mauvais tours ; nous verrons si ma suspicion est justifiée dans les prochains tomes.

Attention! La lecture de ce livre pourrait vous donnez envie d’adopter une serpillière magique au doux nom de Pépouze, Lisette est entrain de négocier avec Bob pour l’ajouter à leur ménagerie magique ★.

Magic Charly, t.1 L’apprenti, Audrey Alwett (Gallimard jeunesse)
disponible depuis le 6 juin 2019
9782075121453 – 16,50 €
à partir de 12 ans
Son
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Pieds de bois – Lalou

Jansen, apprenti d’un grand professeur de botanique, ne rêve que d’aventures et de découvertes scientifiques. Un beau matin, il décide de mettre enfin son plan à exécution : intégrer l’équipage d’un navire sous une fausse lettre de recommandation pour vivre son rêve. Et si cette partie-là du rêve se réalise très vite, la suite de l’aventure va se révéler bien plus complexe et étrange qu’il ne le pensait…

A une époque qui n’est jamais réellement donnée, mais qui nous ramène quelques siècles plus tôt quand le commerce entre les continents était aussi l’occasion de découvertes scientifiques, Lalou nous offre un roman d’aventures aux doux accents de réalisme magique. Aux côtés de Jansen, nous voilà embarqués dans une histoire de marins qu’une catastrophe va contraindre à complètement revoir leurs croyances. Lorsque le Batavia, leur navire, est attaqué et dévorée par des drôles de bestioles, les voilà qui dérivent le long d’une île inconnue, répertoriée sur aucune carte. Quelle n’est pas leur surprise lorsque, débarquant pour trouver de quoi réparer leur bateau, ils tombent sur des géants à la peau de bronze qui, sous prétexte d’obéir au « Protocole », ne leur laisse aucunement explorer leur île, au grand dam de Jansen… Ces Hommes de Bronze, dont les expressions totalement anachroniques nous arrachent quelques sourires, nous intriguent autant que notre héros et, quand ils apportent aux marins en perdition la solution à tout leur problème, on ne doute pas que leurs trésors et leurs mystères attireront bientôt la convoitise…

Une île étrange et inconnue, un peuple mystérieux, il n’en faudra pas plus à Jansen – et à nous lecteurs – pour succomber à la fascination que tous ces éléments exercent, et le récit de Lalou, rondement mené, nous tient en haleine jusqu’au bout. Une fable qui montre aussi l’impact de l’impérialisme sur une population jusqu’à alors coupée du reste du monde – et pour une bonne raison, et rappelle habilement comment les erreurs se répètent, encore et encore. Un roman d’aventures somme toute classique dans sa construction, mais résolument moderne sur les thématiques écologiques et sociétales, qui trouve une saveur toute particulière dans son côté magique et son humour absurde. Une belle découverte ! (On regrettera simplement les nombreuses coquilles qui parcourent le roman…) qui ne sont plus présentes dans le tirage actuel ! allez-y les yeux fermés ! (ou grands ouverts…pour lire, c’est mieux !

Pieds de bois, Lalou (Zebulo)
disponible depuis le 14 janvier 2020
9791096163137 – 13€
à partir de 13 ans
Son
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Broken things – Lauren Oliver

Il y a 5 ans, Summer, 13 ans, est retrouvée assassinée dans une mise en scène macabre. Sont accusés trois autres jeunes gens, Owen, son petit ami, et Brynn et Mia, ses deux meilleures amies. Ils sont alors surnommés les Monstres de Brickhouse Lane et font la une des journaux. Pourtant, ils ont toujours proclamé leur innocence… Cinq ans plus tard, alors que la ville commémore la mort de Summer, les trois amis sont de retour chez eux.

Notre année commence bien avec ce thriller bien mené dans lequel la fascination pour un univers littéraire fictif devient responsable d’un drame. Un peu à la manière du monde inventé par les héros du Royaume de la rivière, de Katherine Paterson, pour échapper à la dure réalité de la vie (mais la comparaison s’arrête là), Summer, Brynn est Mia se plongent dans celui de Lovelorn, monde magique fictif issu d’un roman qu’elles vénèrent toutes les trois. Un roman qui se termine sans réellement se terminer – en plein milieu d’une phrase – et que les trois jeunes filles vont tenter de continuer à travers une fanfiction de leur cru. Mais Summer n’est pas une amie comme les autres : enfant placée, dite « à problèmes », elle mène Brynn et Mia par le bout du nez, attisant la flamme chez l’une, rabaissant constamment l’autre plus timide. Une amitié étrange, qui a ses hauts et ses bas et qui est justement finissante lorsque Summer est lardée de coups de couteaux dans un étrange rituel rappelant celui qu’elles décrivent dans leur fanfiction sur Lovelorn. L’horreur frappe la communauté, et l’amitié, les secrets et la difficile séparation entre la fiction et la réalité font de Brynn, Mia et Owen les coupables parfaits. Mais le sont-ils vraiment ? Cette cérémonie de commémoration cinq ans plus tard permettra-t-elle de lever le voile ? Après des années à enchaîner les cures de désintoxication pour Brynn, à suivre des cours à domicile avec une mère qui s’effondre pour Mia et à passer le reste de son adolescence à l’étranger pour Owen, nos trois suspects vont découvrir de nouvelles informations…

Un roman dense, vous l’aurez compris, qui explore la dissociation entre réalité et fiction, l’emprise exercée par une incroyable jeune fille sur deux autres, et toutes les difficultés à se reconstruire ou continuer à vivre avec le poids d’une accusation, d’une mise au ban de la société. Articulé entre le maintenant et l’autrefois, entre la voix de Brynn et celle de Mia, et entrecoupé d’extraits du roman fictif Le chemin de Lovelorn et de la fanfiction des trois filles, le roman est particulièrement prenant, et servi par une très belle écriture de Lauren Oliver. On est complètement happé dans l’ambiance et dans cette enquête de nos trois protagonistes, à la recherche de la vérité…et de leur innocence !

Broken things, Lauren Oliver, traduit par Alice Delarbre (Albin Michel Jeunesse)
disponible depuis le 2 janvier 2020
9782226442505 – 19€
à partir de 13 ans