Son
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Longtemps, j’ai rêvé de mon île – Lauren Wolk

Abandonnée à la naissance dans une barque à la dérive, Corneille est recueillie par Osh, qui vit sur une petite île au large du Massachussetts. Son enfance est rythmée par la pêche aux homards, aux moules et les leçons avec Miss Maggie. Mais en grandissant, la petite se pose de plus en plus de questions sur ses origines : d’où vient-elle ? Qui sont ses parents ? Pourquoi tout le monde a-t-il peur d’elle…est-ce parce qu’elle pourrait venir de l’île de Penikese où se trouvait à l’époque une léproserie ?

★★★★★

Après la belle découverte que fut La combe aux loups paru l’année dernière (terrible roman sur les préjugés et le mensonge en pleine Seconde guerre mondiale), l’école des loisirs nous fait le plaisir de continuer à explorer l’œuvre de Lauren Wolk, qui nous emmène cette fois dans les États-Unis des années 1920. Cette fois encore, nous sommes dans un décor très rural, ici insulaire, où l’on découvre la vie simple et pourtant comblée d’une petite fille élevée par un homme au passé mystérieux qui s’est délesté de son ancienne vie pour s’échouer sur une île quasi-perdue. Mais l’amour de Osh et la gentillesse de Miss Maggie ne suffisent bientôt plus à Corneille qui éprouve un véritable manque : celui de ses origines. Lorsqu’un garde champêtre s’installe sur l’île de Penikese qui fut autrefois le sanctuaire des lépreux, le désir de Corneille de connaître son passé va la pousser à s’engager dans une enquête qui risque fort de ne pas être aussi simple que cela et, surtout, plus dangereuse qu’elle ne le croit…

La particularité des romans de Lauren Wolk, c’est l’atmosphère. Un rythme lent, poétique, qui invite à prendre le temps de rentrer dans le roman. Une fois que l’on a accepté cela, on se laisse emporter par ses personnages rudement bien écrits – Corneille en tête, bien sûr, mais la relation qui la lie à Osh est absolument magnifique d’émotion et de retenue – et son histoire passionnante et documentée, depuis la recherche d’un trésor de pirate à la quête initiatique en passant par des naufrages et une rencontre terrifiante…

Longtemps j’ai rêvé de mon île est un roman émouvant et poétique, que j’ai sans doute préféré au précédent de Lauren Wolk, pour son talent à construire une atmosphère empreinte de mystères et pour cette relation si belle et si profonde qui lie Corneille à Osh. La beauté de sa couverture achèvera, j’espère, de vous convaincre de découvrir ce merveilleux roman !

Longtemps, j’ai rêvé de mon île, Lauren Wolk, traduit par Marie-Anne de Béru (L’école des loisirs)
collection Medium
disponible depuis le 2 janvier 2019
9782211234481 – 16,50€
à partir de 12 ans
Son
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Un si petit oiseau – Marie Pavlenko

En vacances, Abi est victime d’un terrible accident de la route qui lui laisse un bras en charpie. Amputée, la jeune fille doit composer avec ce handicap et laisse son ancienne vie, insupportable, derrière elle pour se murer dans son chagrin et la détestation de son nouvel état…

★★★★☆

Il y a deux ans, Marie Pavlenko nous faisait nous gondoler avec Déborah et sa loose légendaire. Cette année, autant vous dire qu’on se marre moyen moyen avec ce nouveau roman qui commence durement, et sanglantement. Imagine, t’as 20 ans et toutes tes dents, tu rêves de devenir véto… Bon, t’as quand même été larguée par ton copain deux semaines plus tôt, ça va peut-être pas fort. Et là, bim, tu te retrouves avec le bras amputé jusqu’à l’épaule. Tu passes des mois à l’hosto, tes parents en profitent pour déménager et quand tu reviens, tu peux gentiment te terrer dans ta chambre, te gaver d’antidouleurs et attendre que le temps passe à te morfondre sur ton état et sans voir personne. Car tu es devenue moche, inutile, un vrai poids pour ta famille. D’ailleurs ta sœur en a marre et te le fait sentir, ton père fait le mariole pour essayer de te faire rire, ta mère plaque tout pour s’occuper exclusivement de toi, et ta tante folle-dingue essaye tant bien que mal de te remonter le moral. Ouais, bon, dis comme ça, ça a l’air horrible comme vie. Et sans doute que ça l’est ! Essayez donc de faire des choses avec un seul bras quand vous en avez toujours eu deux ! Et puis, petit à petit, Abi sort de sa coquille… Ça commence par une petite sortie chez le coiffeur, et puis au parc…et puis avec quelqu’un, quelqu’un d’autre qu’un membre de sa famille… Ce quelqu’un, c’est Aurèle, un passionné de zoziaux qui parviendra peut-être à inciter Abi à déployer ces ailes… (C’est beau, hein ?)

Encore une fois, Marie Pavlenko parvient à trouver le ton juste, sait instiller la touche d’humour, de légèreté ou de totale déconnade quand il le faut, sans jamais minimiser les émotions et les sentiments de son personnage, son rapport à ce nouveau corps, sa gravité, ses doutes et ses peines. On sent un véritable amour pour Abi et sa famille – la relation mère/fille est d’ailleurs touchante, et est un peu dans la continuité de celle de Je suis ton soleil. Et suivre Abi dans ce chemin vers l’acceptation de son nouveau soi, de sa perte, dans sa (re)découverte des autres, est une expérience absolument bouleversante. Un si petit oiseau est une petite pépite de douceur et d’émotion à découvrir comme à l’éclosion d’un petit volatile qui sort de son œuf. Prenez-en soin et il vous le rendra bien. 🙂

Un si petit oiseau, Marie Pavlenko (Flammarion)
disponible depuis le 2 janvier 2019
9782081443846 – 17,50€
à partir de 13 ans
Son
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Ah l’amour !

Aujourd’hui, c’est l’amour et tous ses tracas qui unit nos deux romans.

Ce soir je le fais / Ce soir je le quitte

Ce soir, à la soirée organisée par Emma, Simon et elle ont tous deux un plan. Pour Emma, c’est le soir où elle quittera Loïc, qu’elle ne supporte plus. Pour Simon, c’est celui où il se déclarera enfin à Méline et couchera avec elle…

★★★★★

Vous connaissiez sans doute la collection Boomerang pour les plus jeunes, avec ses textes recto-verso. Voici le premier à destination des ados ! Et pour une première, quoi de mieux que cette éternelle et passionnante question du désir, de l’amour ? C’est Cathy Ytak qui se prête au jeu avec ces deux histoires racontant la même nuit, du point de vue de deux personnages qui ont tout à jouer ce soir-là. Comme toujours, Cathy Ytak est d’une exquise justesse dans sa description des élans du corps et du cœur. Toute sa sensibilité et sa finesse s’expriment dans ces textes courts mais ô combien appropriés. Le récit tête-bêche fonctionne à merveille et on espère que le concept sera à nouveau proposé pour les ados !

Ce soir, je le fais / Ce soir, je le quitte , Cathy Ytak (Le Rouergue)
collection DoAdo
disponible depuis le 26 septembre 2018
9782812616549 – 8,50€
à partir de 13 ans

Mon âme frère

Les notes de Camille sont en chute libre. Convoquée au lycée avec ses parents, la sentence finit par tomber : privée de sortie, de téléphone et, surtout, de retrouver Yanis, son petit ami. La jeune fille finit par craquer…

★★★★☆

Même s’il peut se lire indépendamment, Mon âme frère est plus ou moins la suite de Oublier Camille, où nous découvrions les prémices de l’histoire entre Camille et Yanis du point de vue du garçon. Histoire d’amour, toujours, où Camille va s’interroger sur sa relation avec Yanis, le roman évoque aussi et surtout la pression exercée par les parents sur l’avenir de leur enfant. C’est vraiment l’idée du chemin tracé par les adultes qui est au cœur du récit et des réflexions de cette jeune fille qui ne sait plus quoi faire pour se sortir de ce qu’on attend d’elle et cherche sa vérité. Gaël Aymon parle avec réalisme et sensibilité de la difficulté à trouver sa place, à faire entendre sa voix et à résister à la pression sociale ou familiale. Un roman qui explore avec acuité les relations entre filles et garçons, également, à travers l’histoire d’amour de Camille et Yanis.

Mon âme frère, Gaël Aymon (Actes Sud Junior)
collection Ado
disponible depuis le 3 octobre 2018
9782330111427 – 13,90€
à partir de 13 ans
Son
1

Tous les bruits du monde – Sigrid Baffert

Italie, 1905. Pour venger son honneur, Graziella s’apprête à tuer son ex-fiancé Anthelmo. Enceinte jusqu’aux yeux, elle le regarde en épouser une autre, avant de viser son cœur… Condamnée pour ce meurtre, Graziella se retrouve en prison et attend son jugement, jusqu’au jour où un tremblement de terre lui offre la fuite. Une vie nouvelle s’offre à elle, mais les démons du passé ne sont jamais loin…

★★★★★

Pour ceux à qui manquait un grand roman d’aventure : voici Tous les bruits du monde ! Un destin de femme, une histoire d’amour gâchée, un honneur à laver plus important que la vie elle-même, une malédiction, des éléments qui se déchaînent, des traversées en bateau et des découvertes fabuleuses, il se passe tout cela, et bien plus encore dans le nouveau roman de Sigrid Baffert, qui nous transporte dans l’Italie et la France du début du XXème siècle. On notera d’ailleurs tout le travail de documentation pour ce roman historique où des événements réels côtoient les inventions de l’époque et quelques grandes figures des début du cinéma. Des détails et des clins d’œil qui n’éclipsent certainement pas l’aventure palpitante de Graziella et de son frère Baldassare qui vont tous deux fuir leur Italie natale pour rejoindre la France, où ils espèrent non seulement échapper aux représailles de leur départ mais également retrouver leur frère aîné, Tommaso, disparu mystérieusement voilà des années… Mais si la chance semble sourire à cette fratrie qui accueillera très vite l’enfant illégitime et non désiré de Graziella, le passé et le danger sont clairement à leurs trousses.

Un roman captivant, porté par une plume sensible et exigeante, qui, au-delà de l’aventure et de l’histoire d’une vengeance familiale, aborde aussi des thèmes beaucoup plus rares dans ce genre mais qui offrent de passionnantes explorations de l’humain : l’amour maternel, ou plutôt ici son absence ; la surdité et comment, voilà plus d’un siècle, on traitait les jeunes sourds ; et l’exil, grande question d’actualité s’il en est. Les personnages sont admirables dans leur construction, à commencer par Graziella, aussi vulnérable que déterminée, en proie à un conflit autant physique qu’émotionnel et Baldassare, le frère funambule, véritable soutien pour sa sœur, qui navigue entre l’espoir et le pragmatisme. Et puis César, le frère d’Anthelmo, un personnage diablement angoissant, qui étend son ombre menaçante sur tout le roman…

Tous les bruits du monde, c’est le souffle de la liberté, la richesse d’une époque, des personnages, et toute l’émotion d’un grand roman d’aventure.

Tous les bruits du monde, Sigrid Baffert (Milan)
disponible depuis le 22 août 2018
9782745997685 – 15,90€
à partir de 13 ans
Son
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Lectures d’été #1

Les vacances sont sans doute le meilleur moment pour lire, lire et lire ! 😀 Le comble, c’est que Bob n’a (presque) lu que des histoires avec tout ce qu’on imagine derrière le mot « vacances » : des voyages, des îles paradisiaques, des personnages eux aussi en vacances… Petit tour d’horizon de nos derniers bons moments de lecture.

Catégorie #plages

Vendredi ou les autres jours

C’est avec délice que l’on suit les nouvelles aventures de Robinson et Vendredi sur leur caillou perdu au milieu de l’océan, où leur solitude est mise à rude épreuve… En effet, pirates et autres évangélisateurs ne cessent de débarquer alors qu’ils entament une partie de crabe-caillou ou dégustent une bonne petite bière de banane. Nos deux compères rivalisent alors d’imagination pour se débarrasser de ces importuns… Un savoureux recueil de nouvelles imaginées par Gilles Barraqué, où se mêlent habilement humour et sensibilité, légèreté et profondeur. Des dialogues facétieux, des héros qui célèbrent l’enfance, le jeu et la joie de vivre et des illustrations délicates d’Hélène Rajcak, ce petit livre bleu océan vous transportera sur cette île généreuse et inventive !

Vendredi ou les autres jours , Gilles Barraqué, illustré par Hélène Rajcak (MeMo)
collection Polynie
disponible depuis le 24 mai 2018
9782352893738 – 10€
à partir de 10 ans
Pëppo

Des parents absents, une grande sœur qui se casse en laissant 2 bébés – Colette et Georges – sur les bras d’un lycéen pas très porté sur les études, qui vit dans un vieux camping pourri des années 80 avec un oncle alcolo et un Argentin musico… Bienvenue dans la vie pas toute rose de Pëppo ! Mais il y a la plage, les petits vols, les commerçants sympas qui donnent les invendus, les petites entreprises qui se créent avec rien, les bébés hyper attachants, et puis Marie-Lola, un prénom moche, des bagues aux dents et des bourrelets mais un sourire magnifique. Séverine Vidal ravit notre petit cœur avec ce roman complètement barré et pourtant plein de tendresse et d’humanité ! Une comédie douce-amère que l’on a du mal à quitter tant on finit par s’attacher à toute cette tribu de marginaux rassemblés autour de Pëppo, le plus inoubliable d’entre tous.

Pëppo, Séverine Vidal (Bayard)
disponible depuis le 6 juin 2018
9782747090711 – 13,90€
à partir de 13 ans
La sirène & la licorne

On termine avec une jolie histoire d’amour entre deux jeunes filles égratignées par la vie. Lili détonne dans sa banlieue, où paillettes et licornes sont tolérées jusqu’au moment où on la surprend embrassant une fille. Pour l’éloigner du harcèlement dont elle est victime, ses parents l’envoient en Charentes chez sa tante. Elle y fait la rencontre de Cris, ancienne championne de voile, qui cache autant de blessures qu’elle. L’amitié cède bientôt la place à l’amour, mais comment faire confiance, s’exprimer ou se livrer après avoir subi autant ? Erin Mosta évoque la reconstruction et l’homosexualité avec beaucoup de justesse et de naturel, et nous offre deux très beaux personnages.

La sirène & la licorne, Erin Mosta (Rageot)
disponible depuis le 20 juin 2018
9782700259162 – 15,50€
à partir de 13 ans
Son
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Solaire – Fanny Chartres

9782211235129,0-4913946

Ernest et Sara vivent avec leur mère depuis le divorce de leurs parents. Mais leur maman ne se remet pas de cette séparation et fait vivre à ses enfants des moments difficiles. Depuis quelques temps, Sara fond à vue d’œil et, lorsqu’elle fait un malaise au lycée, c’est le signal d’alarme pour Ernest. Le petit garçon va tout faire pour redonner le goût à sa sœur, et pas seulement celui des aliments, mais aussi celui de la vie…

★★★★★

Après le très beau J’ai suivi un nuage, de Maëlle Fierpied, l’école des loisirs nous propose un nouveau roman sur le même thème : la maladie d’un parent qui se répercute sur les enfants. Et tout comme sa consœur, Fanny Chartres parvient avec une grande sensibilité, une parfaite justesse et une immense douceur à retranscrire cette dépression et ses conséquences sur des enfants qui doivent apprendre à grandir tous seuls, sans l’aide de leur mère. Ils ont pourtant un père, qu’ils ne voient que le week-end, qu’ils craignent pourtant de retrouver – malgré leur enthousiasme – car cela signifie qu’ils vont laisser leur mère seule et que cette dernière le leur reprochera. Une situation difficile, terrible, pour ces deux enfants et qui, pour Sara, va l’amener à elle aussi se rendre malade. Ernest, lui, comprend très vite que sa sœur ne va pas bien et, bientôt, il aperçoit un loup qui rôde autour de sa sœur, un loup qui lui dit des méchancetés et cherche à le déstabiliser. Ce loup, c’est celui qui se croit le plus fort, c’est le héros d’une histoire de Mario Ramos qu’Ernest découvre à la BCD. Car l’originalité et la beauté du roman de Fanny Chartres, c’est aussi ce personnage du loup, et un peu après celui d’un bon gros géant, ces personnages fictionnels qui vont mettre des bâtons dans les roues du garçon ou bien tenter de lui donner les armes pour se sortir de cette situation : demander de l’aide.

Illustré tout en rondeurs et en douceurs par l’excellente Camille Jourdy, Solaire est un merveilleux roman qui, malgré son thème extrêmement dur, ne tombe à aucun moment dans le jugement ou le misérabilisme. On admire la plume de Fanny Chartres et ses personnages magnifiquement construits : le courageux Ernest, la fragile Sara et leur très belle relation frère/sœur ; et tous les personnages secondaires qui gravitent autour de leur histoire. Un roman émouvant et véritablement lumineux. ❤

Solaire, Fanny Chartres, illustré par Camille Jourdy (L’école des loisirs)
collection Neuf
disponible depuis le 4 avril 2018
9782211235129 – 12,50€
à partir de 9 ans
Son
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Les filles de l’astrologue, t.1 – Laurence Schaack et Françoise de Guibert

9782700256215,0-4784569

France, XVIIe siècle : une ordonnance royale signée par Louis XIV interdit la pratique de toute forme de magie et de divination. Les astrologues font également partie de cette chasse aux sorcières et Germain Lavol de Sauvagnac est ainsi arrêté et emprisonné, laissant seules ses trois filles et leur cousine. Elles sont bientôt contraintes de quitter le domaine familial et, séparées, toutes vont tenter de se rejoindre et de libérer leur père et oncle. Les astres leur seront-ils favorables ?

★★★★★

Elles sont quatre : Thérèse, l’aînée, guérisseuse qui a pris le rôle de mère pour ses sœurs ; Ariane et Philomène, jumelles aux caractères diamétralement opposés, là où la première est studieuse et travailleuse, l’autre est sauvage et casse-cou ; et enfin Soledad, la cousine chassée d’Espagne, dont la frivolité n’a d’égale que la beauté…et la ruse ! Grâce à leurs qualités très différentes et à cause de leur expulsion du domaine familial, les quatre filles vont devoir rivaliser d’intelligence et de débrouillardise pour parvenir à leur objectif : sauver Germain, leur père et oncle, du procès – et sans doute de la terrible sentence – qui l’attend. Car les temps sont durs pour ceux qui pratiquent l’astrologie et les charlatans comme les astrologues respectables sont mis dans le même panier. Et quand tous les soutiens sur lesquels les quatre filles pouvaient compter les laissent tomber, leur séparation devient une nécessité. Commencent alors de très nombreuses aventures, qui vont les faire voyager de leur Tarn natal jusqu’à Paris, où tout se jouera sans doute auprès du roi !

Un premier tome passionnant et prometteur ! Dans un contexte historique déjà souvent exploité en littérature jeunesse, Laurence Schaack et Françoise de Guibert nous font découvrir l’astrologie et sa pratique au XVIIe siècle. Science ou croyance, réalité et mystification, qu’importe, on y découvre un monde totalement nouveau, source d’excitation (merci Soledad qui n’aide pourtant pas à dorer le blason de la profession) ou de frisson (on a hâte d’en savoir plus sur Philomène). Les deux autrices mènent tambour battant leur histoire et nos quatre héroïnes vont de péripéties en concours de circonstances, pour notre plus grand plaisir de lecture ! Car ce que Laurence Schaack et Françoise de Guibert ont construit est surtout un véritable roman d’aventures, qu’on ne lâche à aucun moment ! L’histoire est lancée, la grande Histoire est en marche également, nos héroïnes ont déjà traversé de nombreuses épreuves et ce premier tome nous a déjà régalé par la richesse de son univers, de ses intrigues et de ses personnages. On attend désormais avec impatience le deuxième tome, qui paraîtra au solstice d’été de cette année ! Oui oui ! Trop bien ! 😛

Les filles de l’astrologue, t.1, Laurence Schaack et Françoise de Guibert (Rageot)
disponible depuis le 21 mars 2018
9782700256215 – 14,90€
à partir de 12 ans
Son
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Pour un œil de poupée – Marina Cohen

9791035201319,0-4694227

Hadley emménage dans une nouvelle maison avec sa mère, son beau-père Ed et son fils Isaac, âgé de six ans. Fâchée et boudeuse depuis que sa mère la délaisse complètement pour cette nouvelle famille, Hadley finit par découvrir dans le grenier une magnifique maison de poupée, réplique exacte de sa nouvelle demeure, dans laquelle sont posées trois poupées formant une famille idéale. Lorsque la jeune fille formule le vœu que sa famille ressemble à celle des poupées, elle ne se doute pas que son monde va basculer…

★★★★☆

Ceux qui ne se sentent pas très à l’aise sous le regard de verre des poupées devraient frissonner en lisant ce roman prenant à l’atmosphère délicieusement terrifiante. Qui, après une dispute avec sa famille, ne s’est jamais dit « ah si seulement ma mère était plus comme ci ? si seulement mon père était comme ça ? et si je n’avais pas de sœur ou de frère !? » Attention aux souhaits que l’on exprime, nous disent parfois certains dictons. Et c’est précisément ce que dit également Grace, la meilleure amie mystique un peu hippie de la maman de Hadley à la jeune fille lors de sa visite dans leur nouvelle maison. Mais Hadley, toute gamine qu’elle est, ne peut s’empêcher de formuler des souhaits sous le coup de la colère, sans se rendre compte qu’une étrange magie est à l’œuvre dans cette maison réputée maudite, de laquelle un nombre incalculable de familles se sont enfuis. Et c’est sans compter ces poupées trop ressemblantes sculptées par la vieille dame qui habite au-dessus du garage, ou cet étrange œil de verre trouvé en même temps que la maison de poupée, qui semble détenir un drôle de pouvoir… Bientôt, Ed et Isaac disparaissent, comme effacés de la mémoire de tous et Hadley se retrouve seule avec sa mère, pour son plus grand plaisir…jusqu’à ce qu’elle souhaite que son vrai père vive avec elles…

Il y a dans Pour un œil de poupée un petit air de Coraline qui ravira assurément ceux qui ont lu cette excellente histoire de Neil Gaiman. Pour les autres, ce sera l’occasion de découvrir un roman fantastique où l’effroi n’a d’égal que le suspense qui nous tient jusqu’au dénouement. Des flashbacks du temps des premiers propriétaires de la maison permettent de lever le voile sur l’histoire de cet endroit, sur les croyances issues du folklore allemand, tout en ajoutant des pièces au puzzle qui se construit sous nos yeux. Un roman qui, par l’épouvante, nous interroge aussi sur la famille et les relations que l’on a – ou pas – avec chacun de ses membres et sur le bonheur. Et qui vous fera réfléchir à deux fois avant de souhaiter de changer de parents parce que les vôtres sont nuls ! 😛

Pour un œil de poupée, Marina Cohen, traduit par Valérie Dayre (Thierry Magnier)
disponible depuis le 21 février 2018
9791035201319 – 16,40€
à partir de 12 ans
Son
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Soixante-douze heures – Marie-Sophie Vermot

9791035201357,0-4694228

72 heures. C’est le temps dont dispose Irène, 17 ans, qui vient d’accoucher d’un petit garçon, pour revenir sur la décision qu’elle a prise depuis le jour où elle s’est rendu compte de sa grossesse. Elle accouchera sous X. Dans sa chambre d’hôpital, en attendant de sortir et de signer les papiers qui permettront à son enfant d’être adopté, Irène repense à ces derniers mois de sa vie, qui a révélé et changé beaucoup de choses autour d’elle…

★★★★★

Irène est une jeune fille discrète, bonne élève, qu’on ne remarque pas tellement mais qu’on imagine mal faire une « erreur ». Mais un jour, chez sa grand-mère, Irène rencontre un voisin, Alban, un garçon qui aime cette maigreur qu’on lui reproche et la fait se sentir désirable. Ils font l’amour, sans réellement se poser de questions, mus par le désir – et oubliant de se protéger. C’était la première fois pour Irène et, comble de malchance, elle tombe enceinte ! Alors qu’elle sent l’enfant grandir en elle, Irène prend une décision. Elle n’avortera pas, elle mènera sa grossesse à son terme et accouchera sous X. Une annonce à la famille de son état, puis sa décision, chamboulent tout dans la vie d’Irène. Et alors que l’adolescente vient tout juste d’expulser le bébé de son corps, alors qu’elle se remet doucement de cette expérience sur son lit d’hôpital, alors qu’elle attend impatiemment la fin des 72 heures qui marqueront l’abandon de son enfant, elle nous raconte comment cet événement a fait exploser les barrières autour d’elle.

Sur le thème de la maternité et de la grossesse adolescente, Marie-Sophie Vermot nous livre un portrait bouleversant de cette jeune fille dont la décision pourtant bien claire pour elle est sans cesse remise en cause par les autres. Le récit se déroule sur les 72 heures où Irène est à l’hôpital, attendant de poser un point final à son accouchement sous X et l’on se laisse totalement emporter par le flot de ses souvenirs, de ses impressions, de ses découvertes sur sa famille qui n’ont fait que renforcer sa décision, et sur cet amour qu’elle porte malgré tout à cet enfant qui a grandi en elle. Une alternance entre l’avant et le maintenant qui fonctionne parfaitement, qui semble parfois semer le doute dans l’esprit de la jeune fille, et qui explique sa décision. Les réflexions sur le désir, sur la réputation d’une grossesse adolescente, sur l’abandon, sur la famille, sont particulièrement subtiles et j’ai également beaucoup aimé cette description de l’accouchement, un événement qui passe souvent bien vite dans les histoires, et qui nous est raconté ici dans ce qu’il a de plus cru.
Un roman magnifique, une écriture sensible et intime sur un sujet peut-être souvent déjà abordé mais raconté ici avec intelligence, sans jugement. Saluons enfin la très jolie illustration de couverture d’Édith Carron, en parfaite adéquation avec le contenu du roman, et le ressenti de lecture. Un très très beau livre. ❤

Soixante-douze heures, Marie-Sophie Vermot (Thierry Magnier)
disponible depuis le 14 février 2018
9791035201357 – 13€
à partir de 14 ans
Son
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Les fantômes d’Achille Plume – Katherine & Florian Ferrier

9782377310555,0-4690500

Achille Plume est un garçon assez spécial ! Sa meilleure amie s’appelle Athénaïs et…est un fantôme ! En effet, le garçon a un incroyable don : celui de voir les fantômes. Mais bientôt, un terrible démon tente de l’attaquer lui et tous les fantômes. C’est Orcus, le terrible seigneur de Sombrenfer, bien décidé à anéantir la cité de Fantombres, où vivent les spectres.

★★★★☆

Achille était un garçon tout ce qu’il y avait de plus « normal » jusqu’au jour où, en frottant une vieille cuillère oxydée apparaisse, tel un génie de sa lampe, le fantôme d’Athénaïs, petite fille morte au XVIIIe siècle. La surprise passée, et de nombreux moments gênants à l’école plus tard, Achille se lie d’amitié avec Athénaïs et, bientôt, les deux se lancent dans une mission d’importance : libérer tous les fantômes des objets dont ils sont prisonniers pour qu’ils parviennent enfin à Fantombres, la cité qui fait office de paradis pour les fantômes. Car, vous ne le saviez peut-être pas, mais lorsque les gens meurent, leur fantôme peut parfois être emprisonné dans un objet qui était proche d’eux ou qu’ils tenaient à la main. Leur permettant de mettre fin à leur captivité, Achille devient vite le héros de tous les fantômes… Serait-ce pour cette raison qu’il est visé par le terrible Orcus et ses sbires dont les éclairs rouges détruisent humains comme fantômes ?

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Une aventure pleine de dangers et de mystères attend alors le jeune Achille, qui ne manque certainement pas de ressources ! Katherine et Florian Ferrier, après l’excellente série de BD Hôtel étrange, signent ici un roman tout aussi riche et pétillant ! Les fantômes ont ce moment le vent en poupe dans les romans de la collection et c’est ici toute l’inventivité de l’univers fantomatique, la qualité des personnages et du mystère qui les entoure, le suspense jusqu’au dernier moment et les illustrations superbes et dynamiques qui en font un roman d’aventure à ne pas manquer ! 😛

Les fantômes d’Achille Plume, Katherine & Florian Ferrier (Sarbacane)
collection Pépix
disponible depuis le 7 février 2018
9782377310555 – 10,90€
à partir de 9 ans