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Les tribulations d’Esther Parmentier, sorcière stagiaire – Maëlle Desard

Esther Parmentier, 19 ans, fait son stage dans un cabinet d’agence comptable où elle s’ennuie profondément et où la chaleur écrasante de l’été strasbourgeois lui fait regretter sa Bretagne natale. Mais elle n’est pas au bout de ses peines car elle déboule tout à coup dans un monde complètement fou et inattendu lorsqu’elle découvre qu’elle est une sorcière ! La voilà désormais stagiaire au sein de l’Agence de Contrôle et de Détection des Créatures Surnaturelles. Et sa première enquête va la mener sur d’étranges disparitions d’adolescents…

Préparez-vous à succomber au charme ébouriffant et sarcastique d’Esther Parmentier, qui n’avait rien demandé à personne et se retrouve à frayer avec des créatures sorties tout droit de contes de fées ! Inspiré de la mythologie celtique, le monde magique de Maëlle Desard se compose de créatures aussi diverses que les vampires, les banshees, les loup-garous ou encore les djinns et les fantômes. Et sachez que tout ce petit monde vit parmi nous, grâce aux sorcières qui ouvrent des portails magiques entre la Terre et le Sidh, cet autre monde dont les créatures sont originaires. Passé le choc de cette découverte et de son nouveau statut de sorcière (de niveau 2 sur 82, soit un score particulièrement bas), Esther va se laisser embrigader dans une enquête de disparitions d’adolescents qui préfigure peut-être un complot bien plus important… Et pour tuteur, elle aura l’agent Loan, un vampire ultra séduisant qui lui hérisse le poil et avec qui la relation va être plus qu’électrique !

Maëlle Desard nous offre une enquête fantastique absolument trépidante, qui nous happe dès les premières pages. Et c’est dû sans aucun doute à la vivacité d’Esther, sa propension au sarcasme et aux formules fleuries et bouillonnantes ! J’ai eu un peu peur au début, que ce soit trop lourd et agaçant, et puis on se laisse vite prendre dans ce tourbillon d’actions et de dialogues qui fusent, qui ricochent et emportent tout sur leur passage. Les personnages sont tous très drôles et rivalisent d’imagination (gros coup de cœur pour le fantôme Mozzie et ses emojis très parlants) et Esther est sans doute aussi la plus originale, se démarquant des héroïnes qui se découvrent toujours être l’élue, la plus puissante de leur espèce ou ce genre de choses. Ici, les pouvoirs d’Esther – nuls, car elle est niveau 2, rappelons-le – ne sont pas ceux que l’on attend. Alors certes, elle résiste plutôt pas mal aux pouvoirs de séduction des Créatures, mais elle se révèle surtout être une enquêtrice plutôt douée en déduction et futée quand elle y met un peu du sien. Entre ses insécurités et sa vie qui bascule sans lui laisser le temps de digérer, Esther est ainsi très attachante et son humour dévastateur achève de nous convaincre d’en faire notre future meilleure amie.

Un roman décapant et plein d’énergie qui nous laisse un peu pantelant (c’est qu’on y laisse quelques litres de sueur nous aussi !) mais avec une furieuse envie de suivre Esther et tous les personnages de l’agence dans une nouvelle tribulation !

Les tribulations d’Esther Parmentier, sorcière stagiaire, t.1 – Cadavre haché, vampire fâché : une enquête sang pour sang, Maëlle Desard (Rageot)
disponible depuis le 1er juillet 2020
9782700275520 – 15,90€
à partir de 13 ans
Son
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Les derniers des branleurs – Vincent Mondiot

Chloé, Gaspard et Minh Tuan sont les losers officiels du lycée, moqués aussi bien par leurs camarades que par leurs professeurs… du moins quand ils sont présents en classe. Car leur spécialité, c’est aussi sécher, même si le bac est au bout de l’année, glander et fumer. Quand une des profs les traite de « branleurs », titre certainement pas démérité, un petit sursaut d’orgueil les incite à – peut-être – tenter de faire la nique (#expressiondevieux) à ceux qui croient qu’ils sont destinés à rien. Et peut-être que Tina va pouvoir les aider à se sortir les doigts…

Depuis la bonne petite claque qu’était Nightwork, on attend à chaque fois le nouveau texte de Vincent Mondiot avec impatience. On ne va pas se mentir, l’entrée dans le roman a été un peu compliquée… Principalement à cause d’une forme assez déconcertante : les notes de côté de pages (eh ouais, même pas en bas !). Et il y en a beaucoup ! Tout le temps ou presque. Pour préciser une référence culturelle, qui est le personnage cité, un lieu, une habitude, une caractéristique…bref, un peu tout et n’importe quoi. Ce qui ne facilite pas la fluidité de lecture et que je vous déconseillerai pourtant de ne pas lire car elles apportent vraiment un petit truc en plus, le petit truc qui fait que le roman n’est pas un énième roman sur le lycée ou l’adolescence. Alors oui, il a fallu m’accrocher… et puis, finalement, ce trio de losers a eu raison de cette drôle de forme grâce à la tendresse incroyable qu’on finit par avoir pour eux. Et c’est pourtant pas gagné parce qu’ils font vraiment tout pour que ce ne soit pas le cas ! Vulgaires, sans beaucoup de centres d’intérêts dans la vie à part les mangas et la branlette (sauf pour Chloé qui trouve les premiers nazes et la seconde dégueu’), sans aucune perspective d’avenir à l’horizon, ils sont aussi désespérants que tous ces ados que vous regardez en levant les yeux au ciel. Ouais mais ils sont attachants quand même. Parce que même s’ils ont des conversations sans queue ni tête, très – très – peu politiquement correctes, leur envie de sortir de la case attribuée, leur envie de se comprendre, de se trouver, est irrésistible et touchante. Et puis on se marre ! Certains dialogues sont tordants de réalisme et, oui, on finit par se laisser totalement attendrir par ce petit groupe disparate et pourtant soudé.

Au début du roman, et dans les remerciements, il est dit que cela aurait pu être le roman de l’année 2020, s’il n’y avait pas eu la situation que vous savez. Alors oui, peut-être que la scolarité et cette dernière année du bac tel qu’on le connaît n’aura pas été vécue ainsi par tous les adolescents et que l’histoire de Chloé, Gaspard et Minh Tuan relève de l’uchronie, mais Les derniers des branleurs, c’est indubitablement le roman qui raconte l’adolescence d’aujourd’hui, qui le fait avec un humour corrosif et cru, mais avec surtout beaucoup de tendresse.

Et pour les fans de Vincent Mondiot, sachez qu’une petite surprise vous attend si vous aviez aimé Rattrapage. 😀

Les derniers des branleurs, Vincent Mondiot (Actes Sud Junior)
disponible depuis le 10 juin 2020
9782330136963 – 16,80€
à partir de 15 ans
Son
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La ville sans vent – Éléonore Devillepoix

A Hyperborée, Lastyanax vient de terminer sa formation de mage. S’il a des ambitions, il ne s’attendait pas à devenir Ministre du Nivellement à 19 ans seulement, suite à la mort mystérieuse de son mentor… Alors qu’il prend ses fonctions, son chemin croise celui d’Arka, une gamine débarquée de loin qui a tendance à provoquer des situations malencontreuses dans sa recherche d’un père qu’elle n’a jamais connu. Tous deux vont devoir apprendre à s’apprivoiser pour déjouer les nombreux complots qui menacent la ville.

Car à Hyperborée, cité construite sur plusieurs niveaux et protégée d’un dôme magique – d’où son surnom de « ville sans vent » – la politique est un art qui se joue habilement et sournoisement. Si l’essentiel de l’action se déroule dans la ville, il est également question des autres cités de ce monde aux inspirations diverses, entre mythologie grecque et fantasy médiévale. Et Hyperborée est d’ailleurs un personnage clé, tout autant que Lastyanax ou Arka. Sa construction complexe et étonnante, basée bien évidemment sur ceux qui ont le pouvoir et ceux qui ne l’ont pas, en fait le terrain de jeu parfait pour des intrigues tantôt mystérieuses et retorses, tantôt drôles et improbables. C’est d’ailleurs toute la force de ce premier roman d’Eléonore Devillepoix de proposer un roman de fantasy qui mêle habilement une intrigue politique passionnante à des personnages et des situations bourrés d’humour. Certains éléments m’ont d’ailleurs fait penser au fameux Disque-Monde de Terry Pratchett (les mages, même s’ils sont tout de même moins bras-cassés, les tortues qui ont un usage pas si éloigné de la Grande A’Tuin…). Bref, un univers riche, que l’on découvre au fur et à mesure des conflits qui se jouent, ou du passé d’Arka qui se révèle, et qui sera sans aucun doute exploré dans le deuxième tome de ce diptyque.

Mais le cœur de ce roman, ce sont aussi ses personnages. La ville, bien sûr, mais également Lastyanax et Arka. Si l’on ne se passionne pas tout de suite pour le mage, plutôt antipathique au début, on soutient tout de suite la quête d’Arka, son caractère aventureux et déterminé, son passé tout en mystères. La relation entre les deux va se mettre en place avec méfiance mais promet un très chouette développement qui change des codes du genre. Les dialogues sont savoureux, à l’image de ce duo que tout semble opposer. Comme dans toute bonne fantasy, nos héros ne sont pas seuls et un grand nombre de personnages gravitent autour d’eux. Si certains sont un peu trop en retrait (coup de cœur pour Pyrrha qu’on aimerait bien découvrir plus), d’autres apparaissent volontairement très peu de fois pour des ressorts comiques plutôt bien vus ! Mais tous apportent une densité à l’univers et à l’attachement que l’on porte à nos deux héros.

Bref, le plaisir de lecture est clairement là, on est dans une fantasy de qualité, un univers, des personnages et une intrigue qui nous embarquent dès les premières pages. Et que dire de cette magnifique couverture toute en dorures ! J’ai en tous cas bien hâte de découvrir la suite et fin de cette histoire captivante !

La ville sans vent, Éléonore Devillepoix (Hachette)
disponible depuis le 3 juin 2020
9782017108443 – 18€
à partir de 13 ans
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La sans-visage – Louise Mey

Clara part en colonie avec sa meilleure amie Aïssa, espérant renouer alors que les deux filles ne sont plus dans le même collège. Entre les rando VTT et le rafting, les journées sont bien remplies et les ados voient sans vraiment voir toutes les bousculades, les petites cruautés de Lila sur Éléonore, surnommée Babar dès la sortie du train ! Au dixième jour de colonie, Éléonore disparaît et personne n’est étonné. Surtout pas Clara, qui a tout vu, tout entendu, et qui a fini par s’habituer, trouvant ça presque « normal »…

Vous connaissez peut-être Louise Mey pour ses thrillers en littérature adulte : il s’agit ici de son premier roman pour adolescents. Vous l’aurez compris, il sera question de harcèlement. Mais surtout, de la façon dont il est perçu par ceux qui l’observent. Et notamment à travers les yeux de Clara, 13 ans, gamine de 4e dont le souci principal est de savoir si Aïssa et elle sont toujours les meilleures amies du monde, comme elles l’étaient avant que cette dernière ne déménage. Cette colo, c’est l’occasion de se retrouver, de resserrer les liens. Mais clairement, Aïssa comme Clara ont changé pendant cette année de séparation, et Clara le vit très mal, souvent jalouse quand Aïssa montre de l’intérêt aux autres ados de la colo (alors qu’ils vont vachement débiles, tous, entre ceux qui sont accros à leur console, celles qui se croient trop belles, ou ceux qui ricanent comme des nazes en se fouettant les mollets avec des branches…) et pourtant consciente que oui, tout a changé. Alors que cette Éléonore se fasse traiter de grosse, de moche, se fasse frapper « sans faire exprès » et autres brimades du même acabit, Clara s’en fout. Le principal, c’est que c’est pas elle, la victime. Et puis bon, elle a qu’à faire des efforts, aussi, Éléonore, non ?

Un roman très fort, donc, construit comme un thriller, oscillant entre le jour J, celui où Éléonore disparaît, et des flashbacks sur les dix jours qui ont précédé, pour comprendre comment on en est arrivé là. Le plus fort est sans doute cette réflexion sur ce que c’est qu’être témoin de ce harcèlement, sur la façon dont, à 13 ans, on est capable de fermer les yeux, d’être heureux que ça ne soit pas tombé sur nous, d’avoir envie de réagir mais d’avoir peur de l’effet de groupe, jusqu’à une sorte d’indifférence, jusqu’à trouver ça « normal »… Louise Mey le rend ici avec beaucoup de justesse et de réalisme, grâce aussi à un style très oral qui nous fait entrer véritablement dans la tête de Clara. La mécanique insidieuse de ce harcèlement est analysée dans son ensemble et, si ce harcèlement est principalement vu par Clara, on le découvre aussi indirectement à travers les autres personnages, depuis les autres ados de la colo jusqu’aux deux moniteurs. Une excellente lecture, jamais donneuse de leçon, mais toujours pertinente et interpellante, qui rejoint les indispensables sur le sujet. A lire absolument !

La sans-visage, Louise Mey (L’école des loisirs)
collection Médium
disponible depuis le 10 juin 2020
9782211307031 – 15€
à partir de 12 ans
Son
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Le barrage – David Almond et Levi Pinfold

Avant de commencer à vous parler de cet album, Bob voulait exprimer sa joie de retrouver les mots de David Almond, l’un de ses auteurs favoris, dont beaucoup de romans de son adolescence sont désormais épuisés… Et autant vous le dire tout de suite : les yeux de Bob brillent autant de joie que d’émotion ! ❤

Lorsque le barrage sera achevé, les terres seront inondées. Mais avant qu’elles ne disparaissent à jamais, Kathryn et son père se rendent une dernière fois dans le village abandonné et, avec leur musique, dansent et chantent pour les maisons et les souvenirs qu’elles renferment, pour tous ceux qui ont dû partir et ceux qui viendront… Et puis le barrage est terminé, les terres inondées, formant désormais un magnifique lac, d’où la musique ne s’en ira jamais !

Est-ce que ça ne vous a pas toujours fasciné ces barrages et cette idée que sous l’eau qui est retenue, il y avait avant des habitations, des gens, une nature qui s’ébrouait ? Inspiré de l’histoire vraie qui lui a été racontée par une célèbre musicienne, David Almond nous invite à découvrir ce souvenir de petite fille qui, avec son père, a choisi d’offrir de la musique et de l’espoir à cette vallée bientôt recouverte par les eaux. Un texte poétique, sensible, vibrant, qui évoque également la perte, la disparition d’un monde, et la volonté de se souvenir, de ne jamais oublier ce qui a vécu là, tout ce qui a été beau. Un récit magnifique que des illustrations fascinantes rendent encore plus fort et émouvant !

C’est Levi Pinfold, dont le travail n’est pas encore très présent en France, qui est aux images et autant vous dire qu’elles sont incroyables ! Il s’en dégage une atmosphère et une lumière qui nous font hésiter entre la photographie et la peinture. Des illustrations pleine page nous invitent à nous attarder, à nous émerveiller de sa précision, de son sens du détail, du jeu d’ombre et de lumière qui nous transporte dans un univers tantôt fantomatique et brumeux, tantôt ensoleillé et plein de joie. Des images qui complètent à merveille le texte de David Almond, qui laisse aussi sa place aux silences, aux évocations, aux légendes. Un album magique, à ne pas manquer !

Bonus : la bande annonce de l’album !

Le barrage, David Almond, illustré par Levi Pinfold, traduit par Christiane Duchesne (D’Eux)
disponible depuis le 9 juin 2020
9782924645376 – 16€
à partir de 5 ans
Son
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Et ta vie m’appartiendra – Gaël Aymon

A la mort de sa grand-mère, Irina reçoit un étrange héritage : une vieille peau parcheminée sur laquelle figure une inscription étrange. Il s’agit d’un talisman censé exaucer tous les désirs de son possesseur à la condition de sacrifier un peu de sa propre vie. Sans vraiment trop y croire, Irina formule son premier vœu : celui de devenir riche et que sa meilleure amie Halima lui dévoue son existence !

Si ces quelques mots vous font penser à La peau de chagrin, c’est bien vu ! Irina est au début du roman une jeune fille qui vient de rater l’examen d’entrée à Science Po alors que sa meilleure amie Halima est prise. Une déconvenue qui n’arrange pas sa vie déjà pas très drôle, avec une mère absente qui ne jure que par l’argent alors qu’elle ne possède rien, et une grand-mère jusqu’alors inconnue qui ressurgit dans sa vie pour lui laisser un héritage étrange et repoussant. C’est sur le coup de la colère et de la jalousie qu’Irina fera part de son premier désir à la peau de chagrin, demandant évidemment d’être riche (car qui ne le demanderait pas, n’est-ce pas ?) mais aussi qu’Halima ne vive que pour la servir ! Et petit à petit, à mesure qu’Irina va demander des choses, aussi futiles qu’importantes, la peau de chagrin va se réduire et grignoter la force vitale de la jeune fille. La richesse et l’existence de rêve se transforment alors en cauchemar… d’autant plus que d’autres personnes semblent à la recherche de cet objet de pouvoir !

Gaël Aymon revisite dans ce nouveau roman le mythe créé par Balzac pour en proposer non seulement une réécriture transposée à notre époque, mais en profite aussi pour utiliser la vie de Balzac pour aller plus loin dans l’intrigue et faire de cette peau de chagrin l’objet d’une vaste chasse au trésor à travers les siècles. Et ce côté thriller fonctionne vraiment bien, ajoutant une bonne dose de mystère et de suspense à cette histoire que vous connaissez sans doute déjà si vous avez lu La peau de chagrin. Mais l’essentiel du roman de Balzac est là aussi car, bien sûr, les questions soulevées par la possession de talisman restent les mêmes : quels sont nos désirs ? Que peut-on désirer quand on finit par tout avoir ? Et, bien sûr, la question ultime pour Irina : quel est le sens de la vie ?

Une histoire très captivante, qui nous tient en haleine jusqu’au bout et qui nous interroge sur le sens de la vie, mais aussi et surtout, sur ce que représente cette idée de la richesse dans notre société. Est-ce que tout avoir, être riche, c’est être heureux ? Avoir réussi sa vie ? Est-ce que c’est notre but à atteindre ? Ah, vous ne pensiez pas être soumis à tant de questions et de réflexions avec un thriller à la touche fantastique ? Eh bien vous voilà prévenus ! Et on espère que ça vous donne envie… 😉

Et ta vie m’appartiendra, Gaël Aymon (Nathan)
disponible depuis le 19 mars 2020
9782092591451 – 15,95€
à partir de 13 ans
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« Hanté », la collection qui va hanter tes nuits !

Vous aussi vous avez grandi avec la collection « Chair de poule » ? Vous aussi vous êtes traumatisés des pantins (surtout après avoir vu l’adaptation télé de l’époque) ou n’avez jamais voulu ouvrir le placard sous l’évier ? Alors tremblez, car vos cauchemars sont loin d’être derrière vous ! Avec « Hanté » et ses deux premiers titres, les éditions Casterman ambitionnent de vous foutre une bonne grosse trouille. Et…ça marche : Lisette n’est plus la seule à faire pipi au lit !

La maison sans sommeil

Paul vient de déménager et il a bien du mal à trouver le sommeil dans cette maison qui grince et craque de partout, comme si ça se faufilait jusqu’à lui… Et c’est encore pire quand il s’endort car alors, il se réveille dans la cave et il n’y est pas seul ! Si vous parvenez à lire le prologue sans déglutir, alors votre cœur est suffisamment accroché pour continuer cette histoire qui ne laissera aucun instant de répit dans l’angoisse puis l’horreur. C’est un certain Benoît Malewicz qui signe ce premier titre de la collection et si je vous dis que sous ce pseudo se cache en fait Thibault Vermot, j’imagine que vous ne serez pas surpris si je vous dis aussi que ce roman est abominablement effrayant ? Car si la collection se veut « pour ceux qui n’ont pas peur d’avoir peur », leurs auteurs ne s’interdisent donc rien et, ici, le côté très « graphique » de certaines scènes vous fera peut-être détourner les yeux comme devant un film d’horreur. Mais l’intrigue est maîtrisée, le style efficace et sans concession, et évite toute facilité grâce à un dénouement qui donne peu de réponses et ouvre à l’interprétation…et à continuer de frissonner !

L’amie du sous-sol

Pour le deuxième titre, c’est Rolland Auda qui nous emmène à la rencontre de Letho qui, s’inquiétant de l’absence de sa meilleure amie Alma au collège, décide de se rendre chez elle pour voir si tout va bien. Mais il semble qu’Alma est malade et que, dans la vieille boutique à côté de chez elle où elle se réfugie, se cache un étrange secret… Une ambiance quelque peu différente dans ce texte où la peur se diffuse progressivement et prend un peu plus de temps pour se dévoiler. Rolland Auda joue avec notre angoisse et, subtilement, nous amène jusqu’à un dénouement là aussi surprenant et inattendu. Moins dans l’horreur pure, L’amie du sous-sol effraye de manière un peu plus psychologique même si, comme dans le premier titre, on s’interroge sur la frontière entre le réel et l’imaginaire – ou le cauchemardesque.

Deux manières d’effrayer, mais deux manières de qualité, et on a plutôt hâte de découvrir les prochains titres de cette collection qui offre aux auteurs français un bel espace de créativité horrifique et horrifiante ! Vous laisserez-vous tenter ?

La maison sans sommeil, Benoît Malewicz (Casterman)
collection Hanté
disponible depuis le 4 mars 2020
9782203064553 – 5,95€
à partir de 10 ans
L’amie du sous-sol, Rolland Auda (Casterman)
collection Hanté
disponible depuis le 4 mars 2020
9782203180949 – 5,95€
à partir de 10 ans
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Si c’est fluo, c’est bio !

Tu le trouves suspect ton étang qui irradie de jaune la nuit ? Ou ta boisson vert fluo 100% recyclée ? Alors t’es peut-être la bonne personne pour résoudre nos deux enquêtes du jour, et faire éclater la vérité sur des entreprises qui font fi des lois environnementales ! Justiciers de l’écologie, c’est à vous !

Des mutants dans l’étang

Après le génial Trafic à la fosse aux griffes, Véronique Cauchy nous propose une nouvelle Enquête graphique, avec cette fois Barroux au dessin. Le principe de la collection est simple : sensibiliser les enfants à l’écologie à travers des romans graphiques policiers. Et là où certains se ratent un peu en étant trop documentaires ou démago, ces enquêtes graphiques sont au contraire une véritable fiction, accompagnée simplement d’une double page documentaire en fin d’ouvrage. Véronique Cauchy réussit à nous embarquer dans une enquête véritablement à hauteur d’enfant et son écriture, qui va à l’essentiel tout en évoquant plein de pistes de réflexion, donne un rythme que la construction sous format bande dessinée complète à merveille. Et donc dans ce 2e titre de la collection, ce sont des vacances en Anjou qui permettent à nos deux héros, un frère et une sœur, de déjouer les méfaits d’une entreprise qui déverse ses déchets toxiques dans un étang. L’enquête est progressive, les différents symptômes de la pollution et de l’empoisonnement qui affectent humains et animaux distillent suspense et indices, et la résolution vient aussi grâce à l’intervention des adultes, parents et autorités compétentes. C’est vraiment très bien fichu (tout comme le 1er titre) et les illustrations de Barroux sont comme toujours un vrai régal ! Une série qui ne prend pas les enfants pour des billes à découvrir absolument !

Des mutants dans l’étang, Véronique Cauchy, illustré par Barroux (Kilowatt)
collection Enquête graphique
disponible depuis le 6 mars 2020
9782917045701 – 16,50€
à partir de 7 ans

La vie en vert fluo

Dans cet album, c’est un jeune trio d’enquêteurs qui ne pourra malheureusement pas compter sur les adultes pour venir à bout de cette usine de recyclage maléfique qui recycle absolument tout pour en faire des emballages, du compost et…des boissons ! Vous avez dit « beurk » ? Eh bien pareil pour nos jeunes héros qui vont découvrir que ce recyclage intégral, s’il paraît plutôt positif sur le papier, est en fait un véritable danger et que, bientôt, les adultes sont tous lobotomisés par leur « café vert » ou « vin composté » ! Ainsi les enfants et leur ingéniosité vont-ils être au cœur de cette enquête périlleuse qui va aussi les amener à un retour à la nature, jusqu’à ce que le problème soit résolu grâce à leur brillant stratagème. Le texte de Coline Pierré, fantasque et un peu dingo, nous emporte de l’insouciance d’une bande de copains à la lente et quelque peu terrifiante compréhension que tout ne tourne pas rond. Les illustrations hyper colorées de Gilles Freluche, dans un style graphique très vivant et expressif, offrent aussi de beaux moments de créativité et de fantastique digne des meilleurs films de monstres ! Un album qui ne manque pas d’humour et fait surtout la part belle au pouvoir de l’action collective !

La vie en vert fluo, Coline Pierré, illustré par Gilles Freluche (Mango)
disponible depuis le 10 janvier 2020
9782317022692 – 14,50€
à partir de 6 ans
Son
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D’un grand loup rouge – Mathias Friman

Dernier représentant de sa meute chassée de son territoire par les hommes, un loup rouge s’engage dans un long et rude voyage dans l’espoir de trouver une nouvelle famille. Une nuit, il rencontre une meute de loups aux yeux luisants. Méfiants, ils refusent de l’accepter à cause de sa couleur trop voyante, mais grâce au chef de meute, qui décide de l’accueillir, le loup rouge découvre que ses nouveaux compagnons sont eux aussi issus de loups qui ont fui…

Après nous avoir régalés avec son trait d’une incroyable finesse et si reconnaissable tout en explorant la chaîne alimentaire dans Une petite mouche bleue puis l’incroyable destin D’une petite graine verte, Mathias Friman nous émerveille à nouveau dans cet album sur la migration. Une migration qui n’est pas naturelle, et qui sort ainsi du travail presque documentaire des précédents titres, mais qui est induite par l’action de l’homme sur le territoire d’une meute de loups. A travers le destin terrible de ce loup rouge, qui voit sa forêt dévastée, ses congénères abattus (une illustration extrêmement forte) et sa survie menacée s’il ne se décide pas à fuir pour trouver de plus verts pâturages ailleurs, on ne peut évidemment pas s’empêcher de penser à ce que vivent certaines populations humaines. Après un long voyage, le loup rouge rencontre une meute qui se montre tout d’abord méfiante et rétive à son entrée dans le groupe, car il n’est pas comme eux. Il faudra toute la bienveillance et l’intelligence d’un chef pour que le loup rouge trouve une nouvelle famille. Une famille composée elle aussi de loups – de toutes les couleurs – qui ont dû migrer à un moment donné de leur vie. Car ce que Mathias Friman nous rappelle ici, c’est que nous sommes tous issus de mouvements migratoires, qu’ils datent de plusieurs siècles ou de quelques années.

Dans ce format à l’italienne qu’on lui connait si bien, avec cette découpe sur la couverture qui laisse apercevoir ce superbe loup rouge, et ce gris métallisé qui nous attire aussitôt, c’est encore une fois le trait magnifiquement fin et réaliste qui nous subjugue. Ce rouge orangé vif qui se détache et ces scènes de nuit magnétiques, un texte poétique et sensible, Mathias Friman nous démontre encore une fois tout son talent. Un album sublime et indispensable !

D’un grand loup rouge, Mathias Friman (Les Fourmis Rouges)
disponible depuis le 19 mars 2020
9782369021186 – 14,50€
à partir de 4 ans
Son
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Je te plumerai la tête – Claire Mazard

Lilou voue une admiration sans borne à son père, le père idéal, charmant, drôle, parfait, toujours là pour elle et qui lui montre son affection et son attention à chaque moment de sa vie. Et depuis que sa mère est hospitalisée, le duo père/fille est plus soudé que jamais, même si cela signifie pour Lilou de ne jamais rendre visite à sa mère, de ne pas penser à elle alors qu’elle est en phase terminale… Il faudra que ses amis lui fassent quelques remarques innocentes pour que Lilou réalise peu à peu dans quel monde elle vit…

En 500 pages hyper prenantes et qu’on ne voit pas défiler, Claire Mazard nous offre un thriller psychologique d’une grande efficacité et, surtout, plutôt effrayant ! Évidemment, c’est très chouette d’avoir une belle relation avec son père, qu’il vous montre plein d’attention, qu’il soit tout le temps disponible pour venir vous chercher à la sortie du lycée, qu’il ait toujours un super cadeau à vous offrir et qu’il soit toujours de bon conseil car, bien sûr, il a toujours raison, il est drôle, charmeur et charmant, plein de réussite, tout le monde au village le dit et quel courage il a avec sa femme très malade… Vous l’aurez peut-être compris, il est question ici de la perversion narcissique et comment un père entretient une emprise toxique sur sa fille. Mais aussi de comment une adolescente, complètement subjuguée et envoûtée par la perfection de son papa, va peu à peu prendre conscience que ce n’est peut-être pas tout à fait « normal » comme situation et comme relation. Et le chemin va être très long car Lilou n’est pas prête à accepter que toute sa vie n’ait été qu’un mensonge, que son père n’est pas sincère et qu’il l’a sans doute privée d’un véritable amour parental. La particularité de cette manipulation, c’est que Lilou va sans cesse trouver des excuses à son père, imaginer que tout n’est que méprise, que son père l’aime vraiment trop pour lui faire ça… En dépit de l’aide de ses meilleurs amis, de ce garçon qui n’a d’yeux que pour elle et de cette tante avec qui elle renoue – difficilement – ouvrir les yeux sera très compliqué, car cela ferait s’effondrer son monde et la plongerait dans la plus grande des détresses…

Le style est simple mais efficace : Claire Mazard est avant tout dans l’écriture de l’émotion, avec un récit conçu comme un journal intime – exercice qui est d’ailleurs conseillé à Lilou à un moment donné. C’est très bien fait, tout en tension, et le roman aborde un sujet finalement assez peu traité en littérature jeunesse, celui de la manipulation psychologique au sein de la famille. Un roman indispensable !

Je te plumerai la tête, Claire Mazard (Syros)
disponible depuis le 6 février 2020
9782748526783 – 17,95€
à partir de 13 ans