Son
4

Ma fugue chez moi – Coline Pierré

9782812610523,0-3163137

Vous l’avez peut-être remarqué, on aime un peu beaucoup Coline Pierré ici ! Il était donc normal de continuer à vous parler d’elle et de ses livres moelleux et enveloppants.

Après une énième humiliation au collège et l’annonce que sa mère ne rentrera pas pour les fêtes de Noël, Anouk décide de fuguer. Sa préparation est exemplaire et la voilà dehors, prête à rouler sa bosse sur les routes d’Alsace…jusqu’à ce qu’elle se rende compte qu’elle ne sait pas où passer la nuit. Son projet avorté, elle rentre chez elle, toute penaude, avant de trouver la solution pour faire sa fugue : le grenier !

★★★★☆

C’est sur cette idée un peu folle et étonnante que repose ce très beau roman de Coline Pierré. Il y a un mal-être chez Anouk, entre son ancienne meilleure amie Marina qui la maltraite au collège et sa mère absente depuis des années, sans compter son père qui ne semble rien comprendre à ses émotions… Seule sa petite sœur Bena est capable de la rendre heureuse, mais celle-ci est en internat et Anouk ne la voit que le week-end. Alors elle décide de partir, de fuguer, de se prendre un petit studio quelque part et vivre sa vie, jouer de son banjo, être libre. Mais son rêve d’évasion romantique se heurte à la dure réalité de la vie et, malgré cette désillusion, Anouk choisit le grenier de sa maison pour assouvir son désir de solitude. Mais alors qu’elle organise sa vie dans cette pièce oubliée, Anouk se rend compte qu’elle entend tout ce qui se passe dans la maison grâce à la tuyauterie. Une astuce idéale pour savoir quand part son père pour descendre et prendre une douche ou se ravitailler, mais aussi une difficile prise de conscience que sa fugue laisse des traces chez les autres…

Je n’en dis pas plus sur cette histoire qui, malgré ce que je peux en dire, laisse beaucoup de place à l’humour et à des situations qui vous seront sourire. Anouk est une jeune fille particulièrement discrète et débrouillarde et on s’attache très rapidement à elle, aux émotions qui la traversent et à ce qui la pousse à fuguer chez elle. J’ai beaucoup aimé ses réflexions, notamment lorsqu’elle évoque sa fugue et les raisons qui l’y ont poussée ; ses souvenirs et sa tristesse de ne pas connaître réellement sa mère, présente à la maison une ou deux fois par an, trop occupée par son métier au Pôle Nord ; sa relation avec sa petite sœur ; sa sensation que son père ne la comprend pas. J’ai l’impression de vous parler d’un roman larmoyant mais ce n’est pas le cas du tout, il y a une véritable douceur dans tout ce que nous raconte Coline Pierré à travers Anouk, je me suis sentie bordée doucereusement dans ses mots et dans son histoire, j’ai ri et je suis sortie de ce livre avec un soupir de contentement. C’est une belle histoire de famille, une jolie rencontre avec cette drôle de fille et sa drôle d’idée, un livre aussi lumineux que le laisse présager sa très belle couverture. 🙂

Ma fugue chez moi, Coline Pierré (Rouergue)
collection DoAdo
disponible le 9 mars 2016
9782812610523 – 10,20€
à partir de 13 ans
Son
0

Cinémonstres – Stéphane Tamaillon et Laurent Audouin

Aventures et frissons sont au programme de ce beau dimanche où il fera bon découvrir quelques classiques du cinéma de genre. C’est parti ! 😀

9782848658506,0-3173427

Brooks est la fille du célèbre réalisateur Harry Hausen et a grandi auprès des plus stars les plus glamours d’Hollywood et les meilleurs techniciens du cinéma. Cet été, toute l’équipe débarque en Amazonie pour le nouveau tournage d’Harry : un film de monstre ! Mais le lagon qu’ils ont choisi est réputé maudit et, bientôt, Rose Glamour, la star du film, est enlevée…

★★★★☆

La créature du lagon maudit, c’est la toute première aventure de Brooks dans la série Cinémonstres (qui comptera au moins 4 tomes, le prochain paraissant en août), créée par Stéphane Tamaillon (dont on vous a commenté son précédent roman et qu’on aime beaucoup ici) et Laurent Audouin (que vous connaissez sans aucun doute pour la série des Enquêtes de Mirette chez Sarbacane aussi). Ceux qui sont un peu vieux reconnaîtront sûrement les nombreuses références, à commencer par le film qui a inspiré cette première aventure : L’étrange créature du lac noir (1954). Quant aux plus jeunes, ils auront tout simplement le plaisir de découvrir une histoire complètement dingo, une jeune héroïne pleine de courage, des adultes colériques, trouillards et pas très débrouillards, et un monstre terrifiant…ou pas ?

Moi c'est pas tant le monstre qui me fait frissonner que le menton proéminent d'Edward...

Moi c’est pas tant le monstre qui me fait frissonner que le menton proéminent d’Edward…

Un petit roman au format album, qui ravira les amateurs de mystère et de monstres. L’écriture de Stéphane Tamaillon est efficace et énergique, les jeux de typographies et de bulles façon BD donnent encore plus de pep’s et les inventions de mots du père de Brooks enrichissent l’humour déjà bien présent de l’histoire et des personnages. Les illustrations de Laurent Audouin, riches et colorées, souvent en pleine page, se marient parfaitement au texte : Brooks en est encore plus pétillante, l’Amazonie terrifiante et la créature du lagon…pas si effrayante ? Un duo qui fonctionne en tous cas à merveille et que l’on a hâte de retrouver pour le prochain tome qui nous emmènera dans le froid de l’Alaska… Vivement le mois d’août ! 😛

Et pour ceux qui sont du côté de Poitiers, sachez qu’il y a une exposition en 3D à la Fnac de la ville jusqu’au 12 mars ! Une très chouette occasion de découvrir le livre, non ?

Cinémonstres – 1, La créature du lagon maudit, Stéphane Tamaillon, illustré par Laurent Audouin (Sarbacane)
disponible depuis le 2 mars 2016
9782848658506 – 12€
à partir de 8 ans
Son
0

Little sister – Benoît Séverac

9782748520927,0-3146260

Il y a quatre ans, le frère de Lena est devenu l’ennemi public n°1 lorsqu’il est apparu à la télévision aux côtés de djihadistes brandissant la dépouille d’un journaliste français. Depuis, Lena a été obligée de changer d’identité, de vie, et a vu ses parents devenir l’ombre d’eux-mêmes. Malgré les années, elle se pose toujours des questions sur son frère, et lorsqu’un jour celui-ci lui donne rendez-vous, elle espère enfin obtenir les réponses…

★★★★☆

Avec ce roman, Benoît Séverac s’attaque à un brûlant sujet d’actualité : le départ de jeunes en Syrie pour faire le djihad. Et malgré ce thème hyper casse-gueule, il s’en sort rudement bien et, à travers quatre voix, nous évoque surtout comment un tel événement peut être vécu par les proches. On commence avec Lena, qui n’arrive pas à comprendre comment son frère a pu faire une chose pareille voilà 4 ans, comment il a pu leur faire croire qu’il était en voyage en Angleterre alors qu’il rejoignait Daesh. Ses parents sont littéralement anéantis – comment pourrait-il en être autrement ? – et lorsque Théo, le meilleur ami d’Ivan, lui envoie une lettre lui disant que son frère cherche à la joindre, l’espoir renaît. Pour le rencontrer, Lena va devoir partir chez son oncle et sa tante, en Espagne, où le terrain de leurs jeux d’enfants sera le point de rendez-vous. Elle emmène avec elle Théo, qui se pose les mêmes questions sur Ivan et qui découvre en Lena une jeune fille forte et courageuse. Le jour du rendez-vous, la parole est donnée à Théo, qui se pose de nombreuses questions sur Ivan et commence à craindre que Lena ne tombe dans un piège. Elle passe ensuite à Joan, un sexagénaire que Lena et Théo ont rencontré à la gare et qui héberge le jeune homme. Joan s’est battu contre le franquisme et un nouveau combat semble se profiler pour le vieil homme. La dernière voix du roman, réaliste et sans concession, sera à découvrir dans le dernier chapitre épilogue…

En moins de 200 pages, Benoît Séverac construit un très bon roman sur un sujet vraiment pas simple en choisissant un axe au plus proche du lecteur et en faisant un parallèle intéressant entre les combats de résistance du vieux Joan, l’histoire de l’Espagne, et ceux du frère de Lena, pour mieux les distinguer. Les mots de Joan apportent une réflexion salutaire et l’auteur, en se focalisant sur les proches et non sur Ivan, traite le sujet avec une distance nécessaire et, surtout, laisse la possibilité à Lena et à sa famille de continuer à aimer Ivan malgré tout… Bien fichu et très prenant, Little sister est clairement un polar réussi !

Little sister, Benoît Séverac (Syros)
disponible depuis le 3 mars 2016
9782748520927 – 13,95€
à partir de 13 ans
Son
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Nouvelle collection : « Mes premiers Witty »

Vous devez tous connaître aujourd’hui la collection Witty chez Albin Michel ? (On en a chroniqué quelquesuns ici-même) Si ce n’est pas le cas, faut vous rattraper ! Tout de suite ! 😛 Pour les autres, une belle surprise car l’éditeur sort cette année Mes premiers Witty, une toute nouvelle collection pour les plus jeunes, à partir de 7 ans, avec les mêmes ingrédients : des auteurs anglo-saxons pros de l’humour, des enfants héros d’aventures du quotidien et des illustrations à gogo. Chouette, non ? En tous cas, nous on avait hâte ! Et ça tombe bien car la collection est lancée aujourd’hui, avec les deux titres que voici :

Crumble – Michael Rosen

9782226325211, 0-3095660

Laurie-Anne se rend à l’animalerie avec sa mère, dans l’espoir de se choisir un chien. Mais elle ne s’attendait pas du tout à ce que le chien qu’elle a repéré lui fasse passer un « entretien d’embauche ». Parviendra-t-elle à convaincre le canidé d’être adopté ?

★★★☆☆

Crumble est le genre de chien plutôt dur en affaire. La pauvre Laurie-Anne ne pensait pas devoir répondre à toute une batterie de questions, elle qui venait choisir un chien qu’elle appellerait Lassie. Raté ! Michael Rosen (celui de La chasse à l’ours) détourne ici cette règle humaine qui veut que ce soit le maître qui choisisse son chien et non l’inverse. Cet acte tout simple de la vie quotidienne prend alors une dimension fantastique pour notre plus grand plaisir. Les illustrations de Tony Ross, toujours fidèle à son style, ajoutent au charme de cette petite histoire idéale pour les jeunes lecteurs.

Crumble, Michael Joel Rosen, illustré par Tony Ross, traduit par Anne Léonard (Albin Michel)
collection Mes premiers Witty
disponible depuis le 2 mars 2016
9782226325211 – 7,50€
à partir de 7 ans
Colin de l’espace : la course cosmique puante – Tim Collins

9782226324672, 0-3095661

Colin s’ennuie en classe. En même temps, M. Watkins est le professeur le plus soporifique du monde ! Heureusement, Harry, le petit nouveau, va le tirer de son ennui. Car Harry voyage dans le temps et l’espace grâce à une poubelle magique. Les deux garçons vont alors partir à l’aventure, jusqu’à ce qu’une terrible erreur dans le passé les fasse revenir dans un monde terrifiant : tout le monde ressemble à M. Watkins !

★★★★★

Alors là, vous allez vous régaler ! Colin de l’espace, c’est un peu Doctor Who mais pour vos petits neveux. D’abord, le vaisseau spatial de Harry, c’est une benne à ordure (c’est un peu moins classe que la cabine de police, ok, mais c’est plus drôle) et il possède un transpondeur interstellaire (genre de tournevis sonique, un peu). Mais surtout, il peut voyager à travers le temps et l’espace et le moindre faux pas peut changer le cours du temps ! Pas de bol, c’est ce qu’ils ont fait. Colin et Harry ont malencontreusement ramené un poil de moustache de M. Watkins dans le passé et l’évolution étant passé par là, l’humanité s’est transformée en bonhommes chauves à moustaches soporifiques au possible et au vocabulaire limité. Colin et Harry vont alors devoir réparer leur erreur pour retrouver un monde normal… Cette histoire totalement déjantée et pleine d’humour l’est d’autant plus par les illustrations hyper présentes de Joëlle Dreidemy et leur côté parfois un peu BD, mais surtout grâce à l’inventivité de l’auteur. Génial ! Encore plus cool ? Le tome 2 sera disponible dès le mois de mai ! 😀

Colin de l’espace : la course cosmique puante, Tim Collins, illustré par Joëlle Dreidemy, traduit par Mickey Gaboriaud (Albin Michel Jeunesse)
collection Mes premiers Witty
disponible depuis le 2 mars 2016
9782226324672 – 8,50€
à partir de 7 ans
Son
1

Le dernier songe de lord Scriven – Eric Senabre

Ce qui est bien avec Eric Senabre c’est que, quoi qu’il fasse, nous ne sommes jamais déçues ! En ce début d’année, il nous propose un voyage dans le Londres victorien et son époque pleine de mystères et d’énigmes…

9782278059508,0-3064222

Journaliste déchu, Christopher Carandini répond à une drôle d’annonce : « Gentleman cherche secrétaire particulier pour surveiller son sommeil. Se présenter au 30 Portobello Road et demander une théière. » Intrigué mais désespérant de trouver de quoi subsister, Christopher se présente et rencontre Arjuna Banerjee, un détective très particulier puisque, pour résoudre les énigmes soumises par ses clients, il doit rêver…

★★★★☆

Engagé pour surveiller le sommeil de Banerjee, qui ne soit pas excéder les 26 minutes sous peine d’y rester, Christopher va découvrir un monde totalement nouveau, une façon étrange et étonnante de résoudre une enquête à laquelle son passé de journaliste sera également utile. Le premier client de ce duo inédit est donc lord Scriven, réincarné dans son fidèle majordome, persuadé d’avoir été assassiné dans son bureau pourtant fermé à clé de l’intérieur… Une énigme qui va donner du fil à retordre à nos deux enquêteurs de l’étrange et nous offrir un récit des plus passionnant.

Amateurs de Sherlock Holmes et d’énigmes, ce roman est fait pour vous ! On y retrouve tous les ingrédients qui font le charme des romans du début du siècle dernier : un peu de fantastique, beaucoup de mystère et une flopée de suspects potentiels, des retournements de situation et un peu d’espionnage. Sans oublier un grand méchant non sans rappeler Moriarty… On se laisse très vite emporter dans le récit, de part l’écriture d’Eric Senabre, efficace, dynamique et non sans un certain flegme tout britannique, mais également par les nombreux rebondissements de l’affaire qui, d’une « simple » crise cardiaque, va prendre des tours totalement inattendus. Je me suis vraiment passionnée pour cette histoire, pour ce personnage de Banerjee et de son mystère indien, pour Christopher et son désir de justice, pour toutes les petites références et pour ce très bel hommage aux personnages et aux histoires inventées par Conan Doyle. Et si le roman vous a plu autant qu’à moi, l’auteur laisse entendre qu’il pourrait y avoir d’autres aventures de ces détectives du rêve ! 😀

Pour en savoir plus sur le livre, n’hésitez pas à visiter le site internet dédié, il y a plein d’anecdotes super chouettes et, pour ceux qui ont lu le précédent roman de l’auteur, vous ne manquerez pas de reconnaître un certain trio dans les cuisines du manoir de lord Scriven… 😛

Le dernier songe de lord Scriven, Eric Senabre (Didier Jeunesse)
disponible depuis le 17 février 2016
9782278059508 – 14,20€
à partir de 12 ans
Son
3

Les petits orages – Marie Chartres

On vous avait déjà parlé de Marie Chartres avec son très beau et poétique roman sibérien, cette fois-ci, elle nous emmène dans les montagnes du Dakota du Sud, à la rencontre d’un duo inoubliable. 🙂

9782211222969,0-3103790Moses Laufer Victor Léonard a 16 ans, est boiteux, boutonneux, et habite le Dakota du Sud. Il y a un an, lui et sa mère ont eu un grave accident de voiture. Depuis, Moses a non seulement une patte folle mais également une rage qu’il ne contrôle pas et qu’il n’arrive pas à exprimer. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir des parents psys ! Un jour, au lycée, il rencontre Ratso, un Indien pétri lui aussi de secrets mais qui, à l’inverse de tous, ne le traite pas comme un pauvre handicapé à qui on pardonne tout. Ratso, qui a besoin de Moses pour aller rendre visite à sa sœur…

★★★★☆

Vous vous dites comme ça, à première vue et avec ce mauvais résumé, que je sujet n’a pas l’air super drôle…détrompez-vous ! Ce roman est une petite mine de moments à vous faire sourire et rire. Il y a certes cette difficile acceptation du handicap après l’accident, et surtout cette culpabilité qui ronge Moses et qui a changé ses relations avec ses parents, avec son père surtout, alors que sa mère, désormais en fauteuil roulant, cache sa peine en étant d’une humeur toujours joyeuse et optimiste. Pourtant, l’arrivée de Ratso va tout changer et va donner de très belles scènes humoristiques, à commencer par cette rencontre avec Moses et leur dialogue à la limite de l’absurde. Ratso, jeune homme expulsé de son ancien établissement et placé dans une famille d’accueil, mais dont les racines sont à Pine Ridge, une réserve indienne. Ratso qui va être une vraie bouffée d’oxygène pour Moses, qui n’avait besoin que d’un coup de fouet pour se reprendre. Et ce coup de fouet va prendre forme lorsque Ratso demande à Moses de l’accompagner un week-end à Pine Ridge, afin de rendre visite à sa sœur pour lui faire une surprise pour son anniversaire…

Je ne vous en dis pas plus sur l’histoire, sur cette amitié qui va se nouer au fur et à mesure que les deux garçons s’ouvrent l’un à l’autre, que Moses enchaîne les gaffes ou que Ratso se met en colère. Marie Chartres nous offre deux beaux portraits d’adolescents abimés par la vie et qui, le temps d’un week-end, vont apprendre à sortir de leur réserve. (Je sais, c’est beau, et j’aurais bien voulu l’inventer, mais c’est sur la 4e de couverture et je trouvais ça bien trouvé, alors…) L’écriture de Marie Chartres est toujours aussi belle, nous fait encore une fois voyager en évoquant la beauté des paysages américains ou les conditions de vies des Indiens d’Amériques. L’humour des personnages, parfois malgré eux, achève de nous garder bien emmitouflé dans son récit et de nous attacher à ces deux garçons lumineux. Un road-book magique ! 😀

Les petits orages, Marie Chartres (L’école des loisirs)
collection Médium
disponible depuis le 24 février 2016
9782211222969 – 16,50€
à partir de 13 ans
Son
1

Une histoire de sable – Benjamin Desmarès

9782812609978,0-3008191

Jeanne passe les vacances d’hiver dans une station balnéaire sinistre. Alors que ses parents passent leur temps à travailler sur l’ordinateur et que leur humeur est aussi massacrante que la sienne, Jeanne passe tout son temps dehors, à se balader dans la station, sur la plage, à croiser une vieille dame à vélo…et à rencontrer deux garçons sur le perron d’une maison, qui passent leur temps à compter les grains de sable.

★★★☆☆

Avec cette couverture et ce titre énigmatique, on ne pouvait s’attendre qu’à une histoire tout aussi étrange. Le début commence pourtant dans une réalité fracassante : Jeanne ne cesse de se disputer avec ses parents, de jouer les rebelles – ou les ados en crise – et de claquer les portes à tout bout de champ. Alors autant vous dire qu’elle n’est pas particulièrement heureuse de passer des vacances à la mer en plein hiver. D’autant qu’il n’y a personne, rien, nulle part où aller ! Elle croise bien une petite vieille à vélo, mais c’est tout. Mortel, le coin est mortel ! Jusqu’au moment où, remontant une rue déserte, Jeanne aperçoit deux garçons tout aussi désœuvrés qu’elle. Ce n’est que le lendemain qu’elle ose les aborder et, après une conversation à la limite de l’absurde, accepte de les aider à compter les grains de sable devant la maison. Alain et Bruno, ce sont les deux garçons avec lesquels elle se lie d’amitié. Deux drôles de gars, aux looks improbables, dont les parents sont aussi absents qu’invisibles.

Finalement, ces vacances ne vont pas être si nulles que ça pour Jeanne. Tout son temps libre, elle le passe avec Alain et Bruno, ou alors au bar, le seul endroit ouvert dans ce patelin désert, où elle écoute les conversations des habitués. Petit à petit, le récit bascule dans le fantastique et, dans la plus pure tradition du genre, on ne s’en rend pas tout de suite compte et on se pose des questions, tout comme Jeanne. Quel mystère entoure Alain et Bruno ? Pour cela, il faudra lire ce roman très bien écrit, qui fait également la part belle à l’amour adolescent. Une histoire étrange, sensible et émouvante, qui donne un vrai roman d’ambiance, atmosphérique.

Une histoire de sable, Benjamin Desmarès (Le Rouergue)
collection DoAdo
disponible depuis le 10 février 2016
9782812609978 – 10,70€
à partir de 13 ans
Discussion
7

Les regards des autres – Ahmed Kalouaz

lesregardsdesautres

La vie de Laure est en enfer depuis qu’au collège, une bande de filles ont fait d’elle leur cible préférée. Injures, bousculades, railleries, menaces à répétition…le quotidien de l’adolescente se dégrade également à la maison. Comment réagir face à ses tortionnaires ? Ahmed Kalouaz, à travers le regard de Laure, nous offre une perspective puissante et intelligente sur le harcèlement.

Jean-Michel, vit un enfer avec un morse

★★★☆☆

Ahmed Kalouaz nous enferme avec subtilité dans la tête de Laure, si bien que son mal-être devient pesant. Ce roman est un appel au secours, décrit les peurs d’une jeune fille, montre une confiance en soi tout juste naissance qui se recroqueville en position fœtale face aux injures quotidiennes. Mais l’auteur nous prouve également qu’il est possible de sortir du silence du harcèlement par plusieurs moyens : la dénonciation (CPE, famille…), par le biais d’associations (Stop Harcèlement notamment), la confrontation avec ses bourreaux…Un livre que je juge utile. Ahmed Kalouaz emploie des phrases justes qui expliquent avec perspicacité les conséquences de ces violences morales qui n’influencent pas seulement les bulletins scolaires mais aussi le quotidien familial (les disputes, l’alimentation, la solitude) et reste surtout une obstruction à la construction de soi. Des notions habilement expliquées : le concept de « tyran » et de « bouc émissaire » au collège par exemple. J’ai trouvé l’écriture brillante, concise et pondérée. La souffrance de Laure est palpable on la ressent vibrer à chaque page. Un petit détail néanmoins : j’ai trouvé que cette jeune fille était d’une sagacité étonnante pour son âge mais j’ai choisi d’en faire abstraction pour mieux me concentrer sur sa peine et les messages forts et justes d’Ahmed Kalouaz.

Bob, harcelé par un ornithorynque

★☆☆☆☆

C’est sans doute la première fois : gros désaccord avec Jean-Michel ! J’avais beaucoup aimé les précédents romans d’Ahmed Kalouaz et je dois dire que j’ai été vraiment déçue par celui-ci. Je ne suis pas parvenue à m’attacher à Laure et à sa douleur, même si j’ai trouvé le traitement du harcèlement différent de ce que j’ai pu lire dernièrement, notamment dans le fait que cette violence passe par l’invisible, les regards, pas forcément la violence physique ou même verbale (ou, en tous cas, Laure ne le dit pas). J’ai regretté également que les rares amis de Laure ne soient pas plus présents, on évoque leurs noms mais sans plus…tout comme ses tortionnaires, finalement. Mais je crois que ce qui m’a le plus déplu, déçu, c’est l’écriture, et notamment les dialogues que j’ai trouvé particulièrement irréalistes (voire surréalistes). Laure, victime (d’une bande de filles), est amie avec Léo, bourreau (qui cogne des mecs). Si cela peut paraître étonnant, leurs conversations le sont d’autant plus car elles tournent toutes ouvertement autour du harcèlement, de la « philosophie » surprenante de Léo sur le sujet, donnant ainsi une sensation étrange que les deux personnages flottent au-dessus de la réalité. Je pense que nous avons tous à un moment donné été victimes d’une forme ou d’une autre de harcèlement à l’école mais, clairement, je ne me suis pas retrouvée du tout dans cette évocation. Déçue je suis ! 🙁

Les regards des autres, Ahmed Kalouaz(Le Rouergue)
collection DoAdo
disponible depuis le 3 février 2016
9782812609954 – 9,20€
à partir de 13 ans
Discussion
4

Un jour il m’arrivera un truc extraordinaire – Gilles Abier

Avec trois parutions cette année, 2016 semble être importante pour Monsieur Abier. Celle de nouveaux succès ? On l’espère. En plus de son *très formidable* roman publié chez La Joie de Lire, on attend avec impatience Je sais que tu sais, un petit nouveau de la collection Ego chez Talents Hauts le 18 février, puis Violon dingue un Petite Poche chez Thierry Magnier en mai. Mais pour l’heure, on vous présente celui qui est déjà sorti des cartons.

9782889083046,0-3014538

Élias vit avec sa mère, Franck Garny, son beau-père et Choucroute, la chat de celui-ci. Enfant prématuré, il a toujours été petit pour son âge, particulièrement pâle et chétif. Malgré cela, Élias est persuadé qu’il est destiné à faire des choses extraordinaires. Un jour, ça le frappe : il va voler. Mais quand il commence à perdre ses doigts de pieds au profit de pattes d’oiseaux et que son nez s’allonge en bec, il n’est plus si sûr de vouloir voler…

L’avis extraordinaire de Jean-Michel

★★★★★

Comment fait-on pour écrire un roman si ensorcelant ? A la lecture de deux phrases la magie opère : les rires fusent, on aimerait retenir chacune des répliques d’Elias, la curiosité est éveillée et la fin si inattendue que le roman en devient extraordinaire. Élias aurait pu être mon meilleur pote : il adore le gratin dauphinois, Matilde et Milo sont ses meilleurs amis et je trouve que ce sont 2 des plus beaux prénoms qui existent. Surtout, il a cette capacité à utiliser la dérision comme moyen d’auto-défense : ses tortionnaires, Guillaume et Farid, sont respectivement surnommés par notre super-héros « Gratte-cul » toujours à fouiller son entre-fesses et « Deux grammes » tel le poids de son cerveau. Un héros chétif certes, mais il va en conquérir, des cœurs de lecteurs ! Comme le mentionne Bob un peu plus bas : il est difficile de ne pas spolier le livre, nous omettons des détails volontairement pour ne pas vous mettre la puce à l’oreille, vous laisser la part belle à cette découverte surprenante, cette fin intrigante qui mériterait d’être discutée.

D’autres trucs de Bob

★★★★☆

Quand il n’écrit pas de belles histoires poétiques à destination des plus jeunes, Gilles Abier est particulièrement doué pour nous trimballer là où on ne s’y attend pas grâce à des chutes surprenantes (je pense notamment à Un de perdu qui m’avait particulièrement frappée). Du coup, ça va être vachement dur de vous parler de ce roman sans rien vous révéler car je ne m’attendais vraiment pas à cette fin et, rien qu’en vous disant cela, c’est limite si je ne vous spolie pas un peu.
Je vais donc me contenter de vous dire que les personnages inventés par Gilles Abier sont réellement attachants, j’ai beaucoup apprécié l’humour très différent et très particulier de chacun, Élias le premier. On est clairement intrigué par cette drôle de chose qui arrive à Élias, cette transformation physique qu’il semble être le seul à constater mais que ses meilleurs amis acceptent avec une facilité délirante. J’ai trouvé l’écriture de Gilles Abier vraiment très fine et humoristique, d’autant plus déconcertante quand on arrive à cette fin qui non seulement nous « choque » mais nous donne envie de recommencer le livre pour repérer les endroits où l’on a rien vu venir… Bien joué, monsieur Abier.

Un jour il m’arrivera un truc extraordinaire, Gilles Abier, couverture illustrée par Séverin Millet (La Joie de lire)
collection Encrage
disponible depuis le 21 janvier 2016
9782889083046 – 14€
à partir de 13 ans
Discussion
0

Le fils de l’ombre et de l’oiseau – Alex Cousseau

filsdelombreetdeloiseau

Bob et Jean-Michel ne vous ont pas encore parlé d’Alex Cousseau… Pourtant, ils adorent tous ses livres ! Alors autant vous dire que, lorsque nous avons repéré la parution de son tout nouveau roman, nous avons sauté dessus et nous n’avons pas regretté le voyage…

En guise d’introduction, les deux frères Elie et Elias attendent le moment opportun pour assouvir leur vengeance envers Butch Cassidy, un bandit. Mais avant tout acte, ils souhaitent nous raconter comment ils en sont arrivés là…ainsi, une plongée dans l’histoire familiale est narrée…Et quels ancêtres !

Jean-Michel, fils des berges et du castor

★★★★★

Parce que c’est un roman océan où il faut suivre et ne pas se laisser distraire lors de la lecture, on vous donne en exclusivité (et aussi parce que nous sommes fort sympathiques) l’arbre généalogique abrégé de cette famille hors du commun.

Mahina

Poki – Peter Schlemihl

Pawel – Wari
↓ ↓
Elie – Elias

De rien.
Vous devez savoir avant de vous plonger dans cette aventure stupéfiante que grâce à Alex Cousseau, la notion de rêve est presque palpable. Vous côtoierez des paysages et des lieux enchanteurs : des déserts, des océans d’un bleu intense, des montagnes arides, des mines sombres, toucherez du sable chaud, un ciel glacé, percerez le mystère d’une forêt et sentirez l’humidité d’un fleuve d’argent. De l’action ? Vous en aurez. Vous assisterez à des cavales, des parcours qui n’en finissent plus et des points de non-retour. Soyez curieux et laissez-vous emporter par l’épopée douce d’un brillant rêveur : Monsieur Cousseau.

« La vie est un cheval entendit Pawel dans une conversation…
un cheval furieux, un cheval espiègle, ou un cheval docile.
A chacun d’en décider, mais pour avancer il faut l’enfourcher »
Bob, fils de la glace et de l’éléphant

★★★★★

Il n’y a bien qu’Alex Cousseau pour nous conter une épopée familiale, s’étalant sur deux siècles, deux mondes, avec autant de rêve et de beauté. On se laisse bercer par son écriture, sa façon de raconter, qui nous porte au gré des vents, des coups du sort, de la vie et de la mort. J’aime son univers, exotique et foisonnant ; ses personnages, vivants et surprenants ; son sens de l’aventure et du destin ; son incroyable travail mêlant fiction et éléments historiques, techniques, technologiques et scientifiques. Il faudra attendre la dernière partie du roman pour comprendre comment Elie et Elias se retrouvent devant Butch Cassidy mais ce voyage magique en vaut assurément la peine.

Le fils de l’ombre et de l’oiseau,Alex Cousseau(Rouergue)
collection DoAdo
disponible depuis le 6 janvier 2016
9782812609862 – 15,90€
à partir de 14 ans