Discussion
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Les optimistes meurent en premier – Susin Nielsen

Vous connaissez sans doute déjà tout notre amour pour la merveilleuse, pétillante et incroyablement drôle Susin Nielsen. Si ce n’est pas le cas, il faut ABSOLUMENT vous rattraper et ajouter à votre vie ce qu’il lui manquait sans que vous le sachiez… Et comme Susin est une femme parfaite, elle sort un roman tous les deux ans. Et comme les éditions Hélium sont parfaites, ils traduisent et publient à la vitesse de l’éclair ce nouveau cru…pour notre plus grand plaisir ! ❤

9782330079406,0-4318607Pétula a 16 ans et la culpabilité la ronge tellement qu’elle s’empêche de vivre comme les autres ados, se débarrasse de sa meilleure amie et de toute vie sociale. Et ce ne sont pas ses parents qui vont l’aider : sa mère recueille toujours plus de chats et son père constamment absent pour le travail… Rongée de TOC et de collectionneuse de faits divers de morts absurdes, elle fréquente un groupe d’art-thérapie avec d’autres jeunes gens comme elle. Jusqu’au jour où débarque Jacob, au bras bionique qui a, lui aussi, un terrible secret…

Bob voit le verre à moitié plein…

★★★★★

Avec ce nouveau roman, Susin Nielsen nous propose une histoire un peu plus young adult. D’abord parce que ses personnages sont plus âgés (d’habitude, ils sont plutôt au début du collège) et ensuite car de nouveaux thèmes s’ajoutent à ceux que l’on retrouve habituellement : la famille, la gestion du deuil, l’humour pour transcender les difficultés, la douleur. Ici, nous aurons aussi le premier amour et tout ce qui en découle de bien comme de moins bien… Mais Susin Nielsen étant l’auteure que l’on connaît (ou que vous connaîtrez très vite), elle nous raconte tout cela avec toujours autant de finesse, de drôlerie, d’émotions, et ses personnages si singuliers, plein de failles, profondément humains, ne peuvent qu’être aimés. Surtout quand on en retrouve certains rencontrés dans d’autres romans, des « seconds rôles » qui ont grandi… Pétula est un personnage encore une fois atypique, comme sait si bien les dessiner Susin Nielsen, une fille unique qui semble porter toute la tristesse du monde sur son dos et qui, pourtant, nous émerveille par ses réactions et ses trouvailles. Un personnage cabossé, tout comme ses comparses de l’art-thérapie, aussi étonnants qu’émouvants, qui donnent une saveur toute particulière à ce très beau roman plein d’esprit. On en regrette qu’il soit si court…

…et Jean-Michel à moitié vide !

★★★★☆

Pas mon préféré de Susin Nielsen mais une vraie petite pièce de boucher comme on sait les apprécier. Et toujours cette dérision qui sert un chouette casting, chats inclus et aborde avec esprit de puissants sujets tels que le deuil, la culpabilité, le pardon, la maladie mentale…Un joli flow se dégage de cette lecture. Parmi les petits bonheurs on trouvera la « chat-bsession » de la mère de Pétula. Il y en a partout. Elle ne cesse d’en ramener et chacun d’entre eux sont prénommés d’après un héros de la littérature Gruffalo, Heidi, Stuart Little, Maman Moumine, Elmer. J’ai cru que toute la famille allait mourir étouffée par les kilos de litière mais l’auteur ne semble pas s’en être affolée alors j’imagine qu’ils se débrouillent plutôt pas mal avec les défécations félines. Et c’est un roman qui clairement nous montre une autre facette du scrapbooking. Mention spéciale aux obsessions de Pétula puisque cette collection de morts idiotes est franchement drôle. Et s’il ne fallait mentionner qu’un défaut à ce livre : trop court ! Tout est donc obligé de se passer si vite : notamment l’histoire d’amour entre Pétula et Jacob, qui la rend un peu moins authentique. Rapide, certes, mais voyons-le sous cet angle : une histoire façon « court-métrage » qui nous offre l’essentiel, avec un vrai clap de fin.

« L’optimisme m’avait discrètement approchée par-derrière pour me mordre les fesses »

Les optimistes meurent en premier, Susin Nielsen, traduit par Valérie Le Plouhinec (Hélium)
disponible depuis le 30 août 2017
9782330079406 – 14,90€
à partir de 13 ans
Son
4

La fourmi rouge – Emilie Chazerand

Bob et Jean-Michel reviennent en forme après des vacances bien méritées ! Et comme tous les ans, c’est avec la rentrée littéraire qu’on se retrouve… Pour se faire un peu plaisir avant de retourner sur les bancs de l’école, on vous propose de rester un peu en vacances avec ce premier roman qui explose de drôlerie comme un feu d’artifice !

9782848659985,0-4372232Un prénom de protège-slip, un nom de pâtisserie allemande (qu’on peut aussi déformer pour en faire le petit nom d’une partie de l’anatomie humaine), un œil qui part en vrille et un père taxidermiste qui l’emmène au lycée dans une voiture customisée à la fourrure ? Oui, il s’agit bien de Vania Strudel, 15 ans, présidente du club très fermé des Minables. Heureusement qu’elle a son meilleur ami Pierre-Rachid pour voir la vie du bon côté… Mais voilà qu’après les vacances d’été, le jeune homme revient beau comme un dieu et, surtout, accompagné d’une horrible petite amie…

★★★★☆

Et quand Vania apprend que cette nouvelle girlfriend n’est autre que sa pire ennemie, cette pouffiasse de Charlotte Kramer, autant vous dire que son monde s’effondre définitivement ! Entre le nouveau prof qui ne lui fait pas de cadeaux, les looses quotidiennes, Pirach (pour Pierre-Rachid) qui s’éloigne peu à peu d’elle, et ses conversations à sens unique avec le vieux monsieur du dessus qu’elle garde parfois, la vie de Vania est HORRIBLE. Jusqu’au jour où elle reçoit un mail anonyme qui lui démontre qu’elle n’est pas qu’une vulgaire fourmi noire et qu’elle pourrait être bien plus que ce qu’elle pense d’elle-même et se démarquer réellement, être une « fourmi rouge ».

On connaissait Emilie Chazerand pour ses albums joueurs et irrévérencieux et c’est avec beaucoup de plaisir que l’on découvre sa plume en long format avec ce roman qui se pose en digne héritier des Petites Reines, dans la même collection, et à rapprocher également de Je suis ton soleil, paru au printemps. On y retrouve en effet une héroïne cynique à souhait, qui aurait sans doute eu sa place sur le podium des Boudins, et dont la vie semble particulièrement vide et improbable. (En vrai, on aimerait bien vivre parfois des trucs aussi loufoques qu’elle !) Entre répliques bien envoyées et dialogues savoureux, Emilie Chazerand nous propose des scènes délectables, des personnages sympathiquement humains, quoi-qu’affublés de beaucoup de tares. Il vous faudra parfois prendre un peu de recul car Vania est une ado qui ne prend pas de pincettes et qui risque fort de vous faire grincer des dents… Un roman particulièrement bien rythmé et piquant dans lequel on ne s’ennuie pas un seul instant ! Un humour qui cache aussi une véritable profondeur, où des sujets « graves » sont abordés avec finesse et sensibilité, comme le deuil ou le harcèlement scolaire. Une mention toute spéciale pour papa Strudel, un adulte responsable, présent, aimant (quand bien même Vania en a parfois honte, le trouve ringard, moche ou relou) et personnage essentiel du roman. Les parents ne sont pas toujours au top dans les romans jeunesse (quand ils sont là, bien sûr) et ça fait du bien d’en voir un qui fait bien son job. Pour ça, merci Emilie !
Petite et insignifiante fourmi noire deviendra-t-elle une belle et piquante fourmi rouge ? On vous laisse le découvrir ! 😀

La fourmi rouge, Emilie Chazerand (Sarbacane)
collection Exprim’
disponible le 23 août 2017
9782848659985 – 15,50€
à partir de 13 ans
Son
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Le phénomène Philomène – Emmanuelle Cosso

9782848659404,0-4198015

Anatole est un ado un peu ailleurs, qui se prend la porte en plein nez, qui lit des mangas tout seul dans la cour et que tout le monde ignore un peu superbement… Sauf Juliette, apprentie journaliste qui a un faible pour le garçon. Un jour, pourtant, Anatole se découvre un talent particulier : il peut voir les fantômes ! Il rencontre ainsi Philomène, morte en 1870 dans un accident de la filature qui se trouvait à la place du collège…

★★★★☆

Et cette Philomène, c’est un vrai phénomène (ohohoh!) ! Du même âge qu’Anatole, c’est bien la première fois qu’un humain vivant peut la voir. Pour Anatole, c’est la révélation. Lui qui était rêveur, pas du tout ami des maths et de la géographie, voilà que, grâce à cette petite fantôme qui l’aide à se sortir de situations périlleuses face aux professeurs et à ses camarades, le garçon change… Ce que ne manque pas de repérer Juliette, qui connaît Anatole depuis toujours et nous raconte son étonnante histoire. Car si Philomène est particulièrement heureuse d’être enfin vue d’un garçon vivant, ses motivations à se lier à Anatole sont nombreuses. Et grâce à Philomène, Anatole va découvrir l’histoire de son collège, celle des enfants en 1870 et, peut-être, devenir un héros ?

Voilà un Pépix très différent des précédents titres de la collection ! Pas de bonus, pas d’humour débordant d’irrévérence (bien que Juliette soit une reporter pleine d’esprit et apporte pas mal d’humour au récit), mais une véritable histoire d’amitié inoubliable, d’aventure à hauteur d’ado rêveur et de secrets historiques tout plein d’émotion. Emmanuelle Cosso nous transporte par son écriture fluide et délicate et son histoire parfaitement construite dans laquelle les révélations s’égrènent au fil du récit, pour nous surprendre et nous émouvoir. Une jolie manière d’aborder la grande Histoire et la condition difficile des enfants de la fin du XIXe siècle. Les illustrations au crayon de Nathanaël Ferdinand complètent à merveille l’histoire dans toutes ses émotions, j’ai beaucoup aimé son style et son souci du détail (je n’avais pas remarqué qu’on voyait Anatole avec son pansement sur le nez – résultat de la porte prise dans la figure dès la première page – jusqu’à la fin du livre). C’est le premier roman d’Emmanuelle Cosso et ça ne présage que du bon pour la suite, j’ai été véritablement séduite par son écriture et son histoire intemporelle et pleine de charme !

Le phénomène Philomène, Emmanuelle Cosso, illustré par Nathanaël Ferdinand (Sarbacane)
collection Pépix
disponible depuis le 6 juin 2017
9782848659404 – 10,90€
à partir de 9 ans
Son
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Ma dernière chance s’appelle Billy D. – Erin Lange

9782211231848,0-4211083

Dane n’est pas capable de s’exprimer autrement qu’avec les poings. Malgré de bons résultats au lycée, il suffit d’une bagarre de plus et il sera exclu définitivement. Sa dernière chance, c’est Billy D., un garçon trisomique qui vient de s’installer à côté de chez lui. Leur marché : Dane devient son « ambassadeur » au lycée et Billy le soutiendra devant le proviseur. Mais Billy a une autre mission à confier à Dane : l’aider à retrouver son père avec, pour seul indice, un atlas du pays rempli d’énigmes.

★★★★★

Essayez de regarder Dane de travers et c’est toutes vos dents qui sautent ! Dane est un garçon violent, incapable de maîtriser une colère sourde. Une colère dont il n’a aucune idée de la provenance. Il vit seul avec sa mère qui l’a eu adolescente et qui collectionne les tickets à gratter gagnant qu’elle encadre sans encaisser les sommes… Alors qu’il battait un mec juste parce qu’il avait une caisse et se pavanait avec, Dane croise le regard de son nouveau voisin, Billy D. Billy D. est trisomique et Dane frappe pas les handicapés, ni les filles. Pourtant, il en a parfois envie, de lui faire la tête au carré à ce Billy. Pour éviter l’exclusion, Dane va accepter de s’occuper de Billy pour son arrivée au lycée, de lui montrer les lieux, etc. Mais pour Billy, se rapprocher de Dane c’était surtout s’assurer un garde du corps – le garçon étant harcelé par d’autres lycéens – et apprendre à se battre. Mais autre chose les rapproche : tous deux sont en manque de père. Dane n’a jamais connu le sien et Billy a été arraché au sien par sa mère. Et pour Billy, retrouver son père est la chose la plus importante, d’autant que ce dernier lui a laissé des indices, glissés sur les pages d’un atlas des États-Unis…

Un roman dense, passionnant, où Erin Lange fait se rencontrer deux garçons que tout oppose, dans la construction d’une amitié compliquée, énervante, bruyante, étonnante et émouvante. Entre jeu de piste et chronique sociale, Erin Lange se fait la voix de ces deux jeunes aux tempéraments explosifs, dont l’absence de père les embarque jusque dans un road trip hasardeux. Des personnages très forts, tant dans leurs caractères (Dane violent et brutal, Billy malin et manipulateur) que dans leur faiblesses, les rendant parfaitement humains et attachants. C’est bien là la grande force de ce roman, entre violence et émotion, qui nous emmène bien loin de ce à quoi l’on peut s’attendre. Une histoire qui prend aux tripes, une amitié incroyable et puissante, un roman vraiment superbe à découvrir !

Ma dernière chance s’appelle Billy D., Erin Lange, traduit par Valérie Dayre (École des loisirs)
disponible depuis le 7 juin 2017
9782211231848 – 19€
à partir de 14 ans
Son
4

Inséparables – Sarah Crossan

9782700253269,0-4105499

Après le roman de Clémentine Beauvais qui avait (un peu) divisé Bob et Jean-Michel, c’est Rageot qui continue à explorer le roman en vers pour adolescents, avec la publication en français d’un titre de Sarah Crossan, qui avait justement inspiré Clémentine Beauvais pour son propre livre. C’est d’ailleurs cette dernière qui en signe la traduction (la boucle est bouclée). Vous vous en souvenez sans doute, Bob n’avait pas été touché par Songe à la douceur…le sera-t-il cette fois ? Mystère ! (On aurait dû être scénaristes des « résumés du dernier épisode » dans les séries)

Grace et Tippi sont sœurs siamoises. Face au regard des auteurs, elles se soutiennent constamment. Elles ont toujours été scolarisées à domicile…jusqu’au jour où elles entrent enfin au lycée. C’est là que Grace tombe amoureuse.

★★★★☆

Et tomber amoureuse, c’est typiquement le genre de choses que Grace et Tippi se sont juré de ne jamais faire. Aussi physiquement que psychologiquement, cela leur semble impossible, bizarre. Pourtant, Grace ne pourra pas lutter contre ce sentiment si nouveau, si étonnant… C’est donc à travers la voix de Grace que nous découvrons l’histoire de ses siamoises qui, pendant huit mois, nous raconte, à la façon d’un journal intime, cette entrée au lycée. C’est à la fois excitant et terrifiant pour ces jeunes filles que le monde entier regarde avec fascination et répulsion. Et c’est en plus un investissement financier important pour leurs parents, dont le père est au chômage, et leur petite sœur Nicole, surnommée Dragon, qui ne rêve que de danse classique. Pour toute la famille, c’est Grace et Tippi, leur santé, qui passent avant tout. Quitte à se ruiner, quitte à renoncer à ses rêves. Alors quand l’opportunité se présente se réaliser un documentaire sur leur particularité et de gagner beaucoup d’argent, Grace et Tippi, malgré leurs réticences à être montrées comme des bêtes de foire, acceptent. Une équipe les suit alors dans leur vie quotidienne, et jusqu’au lycée, où Grace et Tippi ne se révèlent pas des modèles d’élèves studieuses et passent beaucoup de temps avec Yasmeen et Jon à faire tout un tas de choses illicites…

Beaucoup de sujets abordés dans ce roman étonnant et touchant, à commencer par cette superbe réflexion autour de la différence et de l’acceptation de soi. Les deux filles sont très différentes en terme de caractère et, pourtant, elles ne se considèrent pas autrement qu’en une seule et même personne (c’est d’ailleurs le sens du titre original One). Une réflexion forte, singulière, qui trouve aussi toute sa beauté dans l’écriture en vers. Le texte est splendide tout en étant extrêmement simple, tout en grâce et fluidité. On se laisse littéralement emporter par les mots, par ces vers qui nous font glisser jusqu’à une fin bouleversante, aussi belle que terrible, frustrante. Inséparables est un roman surprenant et émouvant, vibrant d’amour, à découvrir absolument.

Inséparables, Sarah Crossan, traduit par Clémentine Beauvais (Rageot)
disponible depuis le 17 mai 2017
9782700253269 – 14,90€
à partir de 13 ans
Son
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I am Princess X – Cherie Priest

9782747058957,0-4105410May et Libby étaient les meilleures amies du monde. Ensemble, elles ont créé un personnage à qui elles faisaient vivre plein d’aventures : Princess X. Mais il y a trois ans, Libby est décédée dans un accident de voiture. Un jour pourtant, May découvre sur la vitrine d’une boutique un autocollant à l’effigie de cette héroïne qu’elle croyait enterrée avec son amie. Etonnée, elle découvre bien vite qu’il existe un compte Instagram où sont narrées en BD les aventures de Princess X et, en les lisant attentivement, May découvre des indices troublants… Son amie est-elle vivante ?

★★★★☆

Faites-vous partie de ceux qui ont vu la campagne de publicité dans les rues autour de l’univers de Princess X ? Si ce n’est pas le cas, rendez-vous sur Instagram ! Une fois votre curiosité bien attisée, Bob vous propose de vous précipiter sur ce très bon thriller, où la BD et le roman se mélangent avec une très grande réussite. En effet, pas toujours facile de concilier les deux ! Cherie Priest, elle, y parvient simplement et efficacement : les planches de BD, tout en violet réalisées par Kali Ciesemier, font partie intégrante de l’intrigue policière, elles n’ont pas qu’une vertu illustrative mais sont bien des éléments clés de l’histoire. Nous sommes ainsi comme May, qui découvre ce qui est arrivé à son amie disparue en même temps que nous, et qui entrevoit les indices glissés dans les cases. Si l’intrigue générale est relativement simple, c’est bien la façon dont elle est menée qui est particulièrement originale, ainsi que les personnages secondaires qui vont épauler May dans sa quête, et le parallèle entre la véritable histoire et celle de la fiction, de Princess X. C’est plutôt bien fichu et on se laisse entraîner de bout en bout, dans l’attente du dénouement final.

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Un roman qui n’est pas sans rappeler l’univers des comics et de ses super-héros. Princess X est une ado fringuée comme une princesse de Disney, couronne comprise, mais avec des Converse rouge et un katana pour seule arme. Son passé est terrible, ses parents sont morts et elle a été kidnappée par un dangereux malade pour des raisons aussi folles que malsaines. Des éléments qui paraîtront surréalistes à qui cherche un thriller noir ancré dans la société (d’autant que le final va un peu vite), mais qui plaira sans aucun doute à ceux qui accepteront cette influence. La thématique des réseaux sociaux et du hacking est également très intéressante dans le roman, et apporte beaucoup à tout l’univers virtuel déployé dans l’intrigue. Original et vivant, aussi sombre que punchy, I am princess X mêle habilement la BD et le roman, à découvrir !

I am Princess X, Cherie Priest, illustré par Kali Ciesemier, traduit par Vanessa Rubio-Barreau (Bayard jeunesse)
disponible depuis le 26 avril 2017
9782747058957 – 14,90€
à partir de 13 ans
Son
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Mosquitoland – David Arnold

9782745977847,0-3742399

Elle s’appelle Mary Iris Malone et elle ne va pas bien. Surnommée Mim, l’adolescente décide de quitter le Mississippi pour rejoindre Cleveland, à plus de 1500km de là, pour retrouver sa mère, malade. Alors que son père et sa belle-mère la recherchent, la jeune fille se lance dans un périple entre dangers et belles rencontres, où ses lettres à une certaine Isabel vont peu à peu nous révéler la raison de sa fugue…

★★★★☆

Mosquitoland, c’est un road trip en solo effectué par une adolescente particulièrement cynique qui ne rentre pas dans le moule. Au lycée, pas question d’être comme les autres moutons, qu’il s’agisse de mode, de façon de vivre ou autre. Mim est une gamine à part. Une gamine qui, quand elle jouait à la marchande, faisait la voix du vieux monsieur qui achète des carottes puis de la petite caissière qui lui réclame des sous. Pour cette raison, « on » la diagnostique schizophrène. Le « on », c’est son père, un homme marqué par la maladie mentale de sa sœur Isabel qui a peur de ces antécédents familiaux. Et ce sont les médecins, qui lui fournissent des médicaments pour lutter contre. Alors quand son père quitte sa mère, déménage à 1500km et se remarie avec une serveuse nommé Kathy (et je ne vous annonce pas le pire !), c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase, et Mim s’enfuit, emportant la cache d’argent de Kathy, son carnet bonhomme où elle écrit à Isabel et son rouge à lèvres fétiche qui appartenait à sa maman. Et l’ado, seule et déterminée, embarque dans le premier car pour Cleveland, où l’attend une aventure qu’elle n’est pas prête d’oublier !

Et nous non plus ! Mim est un personnage magnifique, de par son cynisme qui nous fait sourire, et touchant par ses fêlures, ses imperfections qu’elle nous révèle petit à petit, sa remise en question sur elle-même, sa maladie, sa famille. On embarque avec elle dans ce car Greyhound, conduit par un Carl d’anthologie, à la rencontre d’une Arlene étonnante, d’un Poncho Man sirupeux et de tout un tas d’autres personnages bizarres que l’on rencontre sur la route. Débrouillarde, Mim ne se laisse pas abattre par les écueils. Elle a un Objectif, elle s’y tient. Qu’importe les détours qui l’amènent à livrer une boîte à un pompiste, à assister à un match des Cubs, la pire équipe des États-Unis, ou à dormir à la belle étoile avec Walt, un garçon étonnant, retardé mentalement, mais qui lui apporte tant de bonheurs. Mim est une fille chouette, une gamine au grand cœur, même si elle prétend ne pas aimer les gens, et son voyage vers sa mère, presque initiatique, va lui permettre de se trouver elle et sa famille. David Arnold mêle avec brio tout l’humour et toute la sensibilité de Mim et nous délivre un beau message d’amitié et de tolérance. Nous restent alors un sentiment d’espoir pour l’avenir de Mim et une grande affection pour ce personnage atypique et attachant. Très réussi !

Mosquitoland, David Arnold, traduit par Maud Ortalda (Milan)
disponible depuis le 22 mars 2017
9782745977847 – 15,90€
à partir de 13 ans
Son
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La bibliothèque des citrons – Jo Cotterill

Il n’y a pas que les oignons qui font pleurer quand vous les épluchez. Les citrons aussi, même quand on en a pas dans la vraie vie mais juste sur la couverture d’un livre, Bob peut en témoigner à grand renfort des mouchoirs…

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Calypso a dix ans, n’a aucun ami à l’école et se réfugie dans les livres de sa bibliothèque, hérités de sa maman décédée quelques années plus tôt. Elle vit seule avec son père, un écrivain qui s’est donné la tâche d’écrire une histoire encyclopédique du citron. Un jour, une nouvelle arrive à l’école. Elle s’appelle Mae et va bousculer les habitudes de la solitaire Calpyso, lui faisant découvrir toute l’étendue du mot « amitié ».

★★★★★

A la mort de sa mère, Calypso n’avait que cinq ans. Très vite, son père lui a appris à barricader ses émotions, à se montrer forte et ne pas pleurer à la moindre contrariété. Lui-même a fait la même chose et s’est abîmé dans son travail, la correction de manuscrits, puis l’écriture de son chef d’œuvre : un livre consacré aux citrons ! (Ne riez pas, c’est très sérieux !) Alors Calypso a grandi seule avec son père, et même seule avec elle-même et ses livres, ceux que sa mère avait quand elle était petite. Des classiques de la littérature anglo-saxonne qu’elle dévore et qui lui permettent de s’évader et d’apprendre tout un tas de choses. Si cette vie semble lui plaire, il y a pourtant des à-côtés pas très chouettes : il y a longtemps qu’on ne lui a pas acheté de nouveaux vêtements, son papa oublie souvent de faire les courses et c’est elle qui cuisine, ou plutôt qui fait griller les tartines avec du fromage fondu ou des restes de fond de placard. Mais tout cela lui semble « normal »…jusqu’au jour où elle fait la rencontre de Mae, qui veut très vite devenir son amie. Malgré ses réticences, Calypso va se laisser entraîner dans cette amitié naissante et découvrir qu’elle a beaucoup de choses en commun avec la nouvelle, à commencer par l’amour des livres et des mots. Au fur et à mesure que leur complicité grandit, Calypso va progressivement se rendre compte que sa vie avec son père n’est pas véritablement « normale » et qu’un papa ne devrait pas autant laisser seul son enfant…

La bibliothèque des citrons est un coup au cœur, une lecture qui ne peut pas vous laisser insensible, Bob en avait d’ailleurs les yeux très très humides (mais comme il lisait dehors, c’était à cause du vent, hein !). Jo Cotterill nous émeut par cette description d’une relation inversée entre un père enfermé dans son chagrin contenu et une petite fille qui a du grandir trop vite et assumer son quotidien et celui de son père toute seule. Il n’y a aucun pathos, aucune volonté de faire pleurer dans les chaumières mais une réflexion sensible et intelligente sur notre façon de gérer le deuil, sur l’importance de s’ouvrir aux autres, de demander et d’accepter de l’aide, et sur la puissance de l’amitié. L’écriture est toute en retenue et pleine de douceur, à l’image de Calypso, et c’est sans doute aussi ce qui la charge émotionnellement. Il y a également l’atmosphère, cette maison un peu perdue au fond d’un jardin où la nature a repris ses droits, où il fait froid, son allure de demeure ancienne, voire hantée, où se trouvent tous les vieux livres de sa mère (des classiques que l’on a d’ailleurs bien envie de découvrir pour ceux qu’on ne connaît pas). La solitude de cette petite fille nous transperce et son amitié avec Mae, salutaire et généreuse, lui ouvre les yeux et le cœur et lui apporte l’espoir de surmonter enfin ce chagrin aux côtés de son père. La bibliothèque des citrons est un roman bouleversant et débordant d’amour, à lire absolument !

La bibliothèque des citrons, Jo Cotterill, traduit par Charlotte Grossetête (Fleurus)
disponible le 14 avril 2017
9782215133315 – 16,90€
à partir de 10 ans
Son
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Je suis ton soleil – Marie Pavlenko

9782081396623,0-4031862

Déborah entre en terminale et son année commence mal. Non seulement son chien miteux lui a dévoré toutes ses godasses et elle doit se rendre au lycée en bottes de pluie, mais il y a aussi sa mère qui découpe des magazines à en garnir tout le salon, et c’est sans compter son père qu’elle découvre au bras d’une belle inconnue… Heureusement, Déborah va pouvoir compter sur l’amitié toute neuve de Jamal et Victor, sans oublier sa meilleure amie Éloïse.

★★★★☆

Tu pensais en te levant ce matin que ta vie c’était un peu la loose ? Genre t’as pas révisé ton contrôle, ton collant est troué ou le chat a fait pipi sur ton tapis ? LOL. Tu n’as aucune chance contre Déborah, reine de la malchance (ou scoumoune, selon son théorème) qui assiste au chamboulement de sa vie, et pas juste à cause de son chien galeux, Isidore, qui pue du bec et lui détruit ses ballerines. Sa mère agit comme une folledingue, découpant des magazines et collant des post-it partout sur le miroir de l’entrée avec un mystérieux numéro de téléphone et que dire de son père, le sale traître qui embrasse une autre femme ? Et puis sa meilleure amie Éloïse qui s’amourache d’un beau neuneu et la laisse doucement tomber, la contraignant à devenir amie avec Jamal, alias mygale-man et ses dents de cheval et…le beau Victor, le nouveau. Bon, ok, tout n’est pas totalement naze…sauf quand Victor a en fait déjà une copine. Échec et mat.

Mais Déborah a de la chance, c’est Marie Pavlenko qui s’occupe de nous raconter son histoire. Après s’être plutôt illustrée dans les genres de l’imaginaire (Le livre de Saskia, Marjane…), l’auteure nous emmène dans le quotidien ébouriffant de cette ado un peu perdue mais volontaire et pleine d’humour ! Car le roman est aussi lumineux que sa couverture dorée et son titre estival : Déborah est incroyablement drôle et l’écriture enlevée de Marie Pavlenko d’une grande fraîcheur. Le secret des coquillettes sur la couverture vous sera révélé en lisant le roman, tout comme d’autres éléments de l’histoire qui, vous le découvrirez, ne sont pas tous aussi comiques que ce que peut le laisser penser cette chronique, mais la gouaille de cette lycéenne foutraque, son chien-clochard qui schlingue (mais qui est super attachant) et tous les personnages qui gravitent autour d’elle ne pourront que vous ravir le cœur. C’est en tous cas ce qui est arrivé à Bob.

Il y a une vraie justesse dans cette description de l’adolescence, que ce soit dans le ton ou dans les personnages et Marie Pavlenko parvient à nous toucher et à nous bidonner en même temps (ou presque, hein, vous verrez qu’il y a quand même des trucs pas rigolos rigolos). On a dit à Bob que le roman faisait penser aux Petites reines, de Clémentine Beauvais. Au début, il trouvait que non, mais en fait, oui, il est tout aussi jubilatoire, notamment grâce à Déborah, qui n’a en effet rien à envier à la truculente Mireille. Le propos n’est pas le même, mais le plaisir de lecture, assurément ! Bref, laisse tomber les remèdes de grand-mère pour réparer ton collant troué et cours vite te procurer les épatantes aventures de Déborah ! ;D

Je suis ton soleil, Marie Pavlenko (Flammarion jeunesse)
disponible depuis le 8 mars 2017
9782081396623 – 17,50€
à partir de 14 ans
Son
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De nos propres ailes – Kinga Wyrzykowska

9782747067522,0-3754864

L’équipe de volley du lycée Saint-Exupéry gagne son dernier match et, avec lui, une place pour la Coupe Heaven, qui sera disputée sur l’île de La Désirade, dans les Antilles. Aux anges, les filles de l’équipe font éclater leur joie, jusqu’à ce que l’une d’elle, Tina, se casse l’épaule à la sortie du RER. C’est Gladys, la nouvelle, qui la remplacera. Mais les filles ne sont pas prêtes à laisser Tina sur le carreau et à s’envoler sans elle. Elles vont alors organiser une cagnotte pour lui payer son billet d’avion : elles ont trois mois pour rassembler 1000€. Et tout semble aller comme sur des roulettes…jusqu’à ce que l’enveloppe avec l’argent disparaisse…

★★★★☆

Elles sont six filles dans l’équipe de volley, six meilleures amies depuis des années dont le rêve est de participer à la coupe Heaven. Toutes différentes, dans leurs origines, leurs centres d’intérêts ou leurs personnalités, Julie, Morgane, Nejma, Milena, Tina et Andrea n’en sont pas moins hyper soudées. Une véritable équipe. Gladys, c’est la nouvelle à l’air un peu pataud qui se retrouve toujours sur le banc de touche. Une situation qu’elle ne vit pas très bien. Jusqu’au bête accident de Tina, qui va rendre son épaule inutilisable et donc ses chances de participer à la coupe Heaven aux Antilles. Mais pour Gladys, c’est enfin une place au sein de l’équipe… Encore qu’il faudrait qu’elle soit acceptée par les autres filles, peu désireuses de la voir prendre la place de Tina.

Avec De nos propres ailes, Kinga Wyrzykowska explore l’adolescence et l’amitié dans le microcosme d’une équipe sportive. Entre la difficulté à s’intégrer dans un groupe constitué depuis longtemps, la jalousie, les rêves ou l’agacement, et les situations familiales de chacune, ce sont toutes les préoccupations adolescentes que l’on retrouve dans ce « roman de copines » (ou de filles), bien loin pourtant des poncifs du genre. Exit les histoires d’amour mièvres ou les mesquineries futiles, l’auteure insiste ici sur la psychologie de ses personnages, sur les désirs et les failles de chacune. Cela rend le roman passionnant, bien qu’un chouïa difficile au début car c’est aussi un roman choral, où chacune prend la parole à tour de rôle, parfois en même temps, et que Kinga Wyrzykowska ne nous a pas facilité la tâche pour s’y retrouver. Mais après un petit temps où on se demande « mais c’est laquelle déjà qui a les parents polonais sympas ? » (qui ont l’air aussi de faire des trucs à manger trop bons, dixit le ventre de Jean-Michel) ou bien « la fille placée en famille d’accueil, c’est bien Tina ? », on finit par s’attacher à chacune des filles et à se demander comment leurs relations vont évoluer et comment leur collecte d’argent va aboutir. Car bientôt arrive la partie suspense du roman, et le vol de la cagnotte va attiser considérablement les tensions au sein du groupe fragilisé, risquant à tout moment de tout faire exploser…

De nos propres ailes est un très bon roman, qui fait la part belle à ses personnages de jeunes filles finement campées, et à un ton juste au plus proche de ces adolescentes qui n’ont pas peur de dire ce qu’elles pensent et qui risquent bien de laisser la situation leur échapper… A découvrir !

De nos propres ailes, Kinga Wyrzykowska (Bayard Jeunesse)
disponible depuis le 4 janvier 2017
9782747067522 – 14,90€
à partir de 13 ans