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Des albums sourires pour cette rentrée

Au programme deux albums assez différents mais qui ont des valeurs communes : l’imagination et des illustrations malicieuses et enfantines !

Le livre des arbres & plantes qui restent à découvrir

Connaissez-vous le célèbre palmier à moustaches ? Le chaussettier appelé aussi le saule pleureur à chaussettes ? Non ? Et le malpolinier, cet arbre qui ne peut pas s’empêcher de vous tirer la langue dès que vous avez le dos tourné ? Si ces plantes ne vous sont pas familières, peut-être n’avez-vous pas ouvert assez grand les yeux lors de votre dernière balade en forêt…

Le grand, le fort, l’irrésistible Olivier Tallec nous offre pour la rentrée un imagier surréaliste célébrant la nature, mais surtout l’imaginaire, à travers des arbres et des plantes inventés, aux caractéristiques bien singulières : le peuplier-couverture, le pin brosse à dents ou encore l’arbre-glace. Cet album est une invitation pour les enfants à imaginer à leurs tours des arbres extraordinaires. Les dessins sont plein de malice et d’impertinence, c’est ludique et réjouissant à souhait.

Le livre des arbres & plantes qui restent à découvrir, Olivier Tallec (Actes Sud Junior)
disponible depuis le 1 septembre 2021
9782330154585 – 17€
à partir de 3 ans

Kate Moche

Kate subit les moqueries et se fait appeler Kate Moche à l’école. Les andouilles de la cour de récréation disent qu’elle n’est pas très maligne et maladroite. Pourtant elle s’en moque et garde toujours le sourire ! Quand Kate se regarde dans le miroir, elle voit beaucoup des choses incroyables dans son reflet…

Le texte d’Antoine Dole, écrit dans un style poétique, nous montre l’importance de s’aimer. Kate se voit comme une doctoresse dévouée pour ses jouets, une experte en guimauve, une sportive haut niveau… Kate est courageuse, charismatique, visonnaire ! Une belle histoire qui montre que le regard que l’on porte sur soi est beaucoup plus important que tous ce que les autres peuvent dire de nous ! Kate croit en elle. Elle croit en ses pouvoirs magiques et cette confiance laisse les « andouilles » de son école pantois. De nombreux enfants sont un jour confrontés à des remarques déplaisantes et la conclusion de ce livre est la meilleure qui soit : l’ignorance.

Habituée aux dessins humoristiques et colorés de Magali Le Huche, c’est toujours un plaisir que d’observer les détails des pages des métiers : une tasse éléphant, trois brigands cachés, des bonbons à croquer. Les illustrations se savourent à chaque page. La palette de couleur incarne parfaitement Kate, son imagination, sa confiance en soi et sa joie de vivre.

Simple et efficace, cet album pétillant est à recommander en cette rentrée pour rappeler que toutes les Kate de la terre peuvent devenir qui elles veulent !

Kate Moche, Antoine Dole, illustré par Magali Le Huche (Actes Sud Junior)
disponible depuis le 1 septembre 2021
9782330154561 – 14,90€
à partir de 6 ans
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La vie en rose de Wil – Susin Nielsen

Après un malheureux incident lors de son arrivée à Toronto, Wil est devenu la risée de son lycée. Malgré cette déconvenue, il vit une vie plutôt tranquille entre ses mères qui l’adorent (les Mapas), son meilleur ami Sal, d’environ soixante-dix ans son aîné, et son chien borgne et courtaud Templeton. Il partage ses journées entre son job d’Expert en composition de sandwichs, l’aqua-gym avec des mamies, son talent muscial inné pour le triangle, et l’écriture de poèmes. Jusqu’au jour où son monde bascule avec l’arrivée des correspondants français… Car il découvre que son Charlie est en réalité une fille et elle est absolument fabuleuse !

Bob voit la vie en Susin Nielsen

Vous devez savoir si vous nous suivez depuis un moment que Bob est un fan absolu de Susin Nielsen et que chaque parution est attendue comme le cadeau de Noël qu’on désire de tout son cœur ! A chaque fois, Bob sait qu’il va adorer, qu’il va rire et pleurer, qu’il va vouloir aller vite au bout de l’histoire et en même temps la lire petit à petit pour la savourer. ❤ Ce nouveau roman de Susin Nielsen est encore une fois un régal de lecture ! Entre ces dialogues aux petits oignons, cette sensibilité qui touche toujours juste et cette fantaisie parfaitement dosée, on succombe pour ses personnages et ses situations aussi loufoques que sensibles. Comme toujours, on ressent une profonde bienveillance dans l’écriture et la construction des personnages de Susin Nielsen : malgré les imperfections de chacun, les difficultés rencontrées, il y a toujours tout cet espoir et cette tolérance qui caractérisent ses histoires, cette volonté de se découvrir et s’aimer soi-même. Les romans de Susin Nielsen, ce sont des moments de lecture uniques, c’est la chaleur de la couette qui nous réconforte toujours, et la promesse d’une vie en rose.

Lisette veut plus de rose dans sa vie

Si vous avez lu attentivement cette chronique, vous pouvez penser que cette histoire paraît simple mais c’est sans compter sur le merveilleux travail de conteuse de Susin Nielsen. Lisette est toujours très heureuse quand elle tombe sur un roman qui prend les adolescents au sérieux mais avec humour ! Ici, il est question d’amitié, de confiance en soi et d’émois adolescents, de vie de famille… mais également de harcèlement et de difficulté financière. Will n’est pas épargné par les désagréments de la vie, ce qui le rend terriblement attachant. L’autrice valorise la diversité : l’homosexualité, l’amitié avec une personne âgée mais ces sujets ne sont jamais au cœur du roman. La force de l’écriture réside dans sa capacité à transmettre des valeurs humanistes comme l’entraide, le respect, la tolérance avec des situations de vies cocasses ! Petit bonus avec le duo de mères de Will qui lui enseigne une sexualité très positive à base de consentement enthousiaste « Ne suppose jamais a priori qu’une fille désire un contact physique, quel qu’il soit ! Demande Toujours Avant™. » Des recommandations toujours très bien placées !

Ouvrir un livre de cette autrice, c’est se blottir dans l’histoire avec réconfort et sourire. La vie en rose de Wil est une très belle fresque humaine hétéroclite et touchante, un univers dans lequel on s’immerge avec tendresse.

La vie en rose de Wil, Susin Nielsen, traduit par Valérie Le Plouhinec (hélium)
disponible depuis le 25 août 2021
9782330153472 – 14,90€
à partir de 12 ans
Son
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Ceux qui décident – Lisen Adbage

A l’école, il y a ceux qui décident. Et il y a les autres, ceux qui n’ont jamais rien le droit de faire. C’est bien simple, à chaque fois que ceux qui n’ont rien le droit de faire se mettent à s’amuser, ceux qui décident leur donnent des ordres puis s’approprient ce avec quoi ils s’amusaient, leur demandant de dégager. Ceux qui décident, ce sont les enfants dans la cour qui jouent aux plus forts, qui disent qui joue avec quoi ou avec qui, et à qui personne ne dit jamais rien. Jusqu’à ce que…

Quel magnifique et pertinent album pour parler du harcèlement, qui commence parfois dès les plus petites cours d’école. On assiste ici à la loi exercée par un petit groupe d’élèves sur le reste de la cour de récréation. Un microcosme enfantin dans lequel n’apparaît aucun adulte pour intervenir dans le conflit, ni d’ailleurs aucun autre enfant parmi ceux qui assistent depuis les fenêtres de l’école ou des immeubles avoisinant. Si ceux qui décident n’arrêtent pas de déloger ceux qui n’ont rien le droit de faire dès qu’ils s’amusent un peu, ces derniers ne se laissent pas abattre et finissent toujours pas trouver une autre occupation. Jusqu’au moment où tout cela suffit, et où les ordres contradictoires de ceux qui décident finissent par pousser les enfants à s’unir pour dire non et tenir tête à ce petit groupe de tyrans.

Lisen Adbage nous offre un album percutant sur les rapports de force et le droit de dire non, de s’opposer à l’injustice. Un album qui nous montre aussi toute l’importance du collectif, de s’unir pour contrer ceux qui veulent imposer leur loi. Le texte court, incisif, va tout de suite à l’essentiel. La violence subie par ceux qui n’ont rien le droit de faire et induite par le sujet est contrebalancée par des illustrations aux couleurs extrêmement vives et joyeuses et des personnages très divers, parfois même avec des particularités rigolotes ou inattendues qui nous rendent ces enfants aussi attendrissants que réalistes. Un album tout en subtilité.

Ceux qui décident, Lisen Adbage, traduit par Marianne Ségol-Samoy (L’étagère du bas)
disponible depuis le 7 janvier 2021
9782490253302 – 14€
à partir de 5 ans
Son
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Juste un mot – Frédéric Vinclère

Paul a 11 ans et subi un racket au collège. Lorsque son grand frère le découvre, il lui laisse une lettre dans sa tirelire. C’est le début d’une correspondance par mail alors que Lou-Victor, le grand frère, est soudain loin de Paul. Alors que la situation semble s’aggraver, d’autres personnages vont peu à peu faire leur entrée dans la vie de Paul, avec des échanges de mots en classe ou encore des messages sur Facebook.

Comment aider son petit frère lorsque l’on est si éloigné de lui ? Éloigné parce qu’ils n’ont jamais été tellement proches, parce que leurs parents ne leur ont jamais véritablement prêté attention, et parce que Lou-Victor est dans un « internat ». Mais Paul n’est pas dupe, même si on ne lui a rien dit, il sait où est réellement son frère. Cette correspondance inattendue, née d’un acte tout de même répréhensible de Lou-Victor, va pourtant amener les deux frères à se confronter, se confier et se redécouvrir. Malgré la distance, le grand frère va tenter d’aider le plus petit à se sortir du terrible engrenage dans lequel il s’est retrouvé. Et s’il ne peut pas venir lui-même s’en charger, peut-être des camarades de Paul le pourront-ils ? Grâce aux conseils de son frère, Paul rencontre Loubna, une élève de troisième solaire et forte, qui semble faire partie d’une histoire compliquée de Lou-Victor, et qui va se révéler une véritable amie…

Sans vous en dire trop sur les chemins qui mèneront chacun d’entre eux dans cette histoire, sachez simplement que Frédéric Vinclère nous offre là une magnifique correspondance, intimiste et lumineuse. Beaucoup de non-dits, de petits secrets ne seront pas révélés, comme ce fameux mot qui débloquera une certaine situation et termine le roman, mais c’est là aussi toute la réussite de ce texte sur la famille et l’amitié. Si le point de départ se focalise sur le harcèlement que subit Paul, c’est avant tout la relation entre deux frères qui nous touche, cet éloignement forcé de Lou-Victor, ses erreurs et ses tentatives d’être un meilleur frère, une meilleure version de lui-même, d’être tout simplement là pour Paul quand personne d’autre ne l’est. Quant à Paul, il nous bouleverse par son innocence et sa profonde solitude. A travers cette correspondance, les deux frères vont apprendre à se retrouver, à s’aider mutuellement, à grandir et tenter de faire avancer leur famille. Un roman d’une grande justesse, mais également plein d’humour et d’optimisme.

Juste un mot, Frédéric Vinclère (Auzou)
disponible depuis le 27 août 2020
9782733881446 – 12,95€
à partir de 10 ans
Son
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La sans-visage – Louise Mey

Clara part en colonie avec sa meilleure amie Aïssa, espérant renouer alors que les deux filles ne sont plus dans le même collège. Entre les rando VTT et le rafting, les journées sont bien remplies et les ados voient sans vraiment voir toutes les bousculades, les petites cruautés de Lila sur Éléonore, surnommée Babar dès la sortie du train ! Au dixième jour de colonie, Éléonore disparaît et personne n’est étonné. Surtout pas Clara, qui a tout vu, tout entendu, et qui a fini par s’habituer, trouvant ça presque « normal »…

Vous connaissez peut-être Louise Mey pour ses thrillers en littérature adulte : il s’agit ici de son premier roman pour adolescents. Vous l’aurez compris, il sera question de harcèlement. Mais surtout, de la façon dont il est perçu par ceux qui l’observent. Et notamment à travers les yeux de Clara, 13 ans, gamine de 4e dont le souci principal est de savoir si Aïssa et elle sont toujours les meilleures amies du monde, comme elles l’étaient avant que cette dernière ne déménage. Cette colo, c’est l’occasion de se retrouver, de resserrer les liens. Mais clairement, Aïssa comme Clara ont changé pendant cette année de séparation, et Clara le vit très mal, souvent jalouse quand Aïssa montre de l’intérêt aux autres ados de la colo (alors qu’ils vont vachement débiles, tous, entre ceux qui sont accros à leur console, celles qui se croient trop belles, ou ceux qui ricanent comme des nazes en se fouettant les mollets avec des branches…) et pourtant consciente que oui, tout a changé. Alors que cette Éléonore se fasse traiter de grosse, de moche, se fasse frapper « sans faire exprès » et autres brimades du même acabit, Clara s’en fout. Le principal, c’est que c’est pas elle, la victime. Et puis bon, elle a qu’à faire des efforts, aussi, Éléonore, non ?

Un roman très fort, donc, construit comme un thriller, oscillant entre le jour J, celui où Éléonore disparaît, et des flashbacks sur les dix jours qui ont précédé, pour comprendre comment on en est arrivé là. Le plus fort est sans doute cette réflexion sur ce que c’est qu’être témoin de ce harcèlement, sur la façon dont, à 13 ans, on est capable de fermer les yeux, d’être heureux que ça ne soit pas tombé sur nous, d’avoir envie de réagir mais d’avoir peur de l’effet de groupe, jusqu’à une sorte d’indifférence, jusqu’à trouver ça « normal »… Louise Mey le rend ici avec beaucoup de justesse et de réalisme, grâce aussi à un style très oral qui nous fait entrer véritablement dans la tête de Clara. La mécanique insidieuse de ce harcèlement est analysée dans son ensemble et, si ce harcèlement est principalement vu par Clara, on le découvre aussi indirectement à travers les autres personnages, depuis les autres ados de la colo jusqu’aux deux moniteurs. Une excellente lecture, jamais donneuse de leçon, mais toujours pertinente et interpellante, qui rejoint les indispensables sur le sujet. A lire absolument !

La sans-visage, Louise Mey (L’école des loisirs)
collection Médium
disponible depuis le 10 juin 2020
9782211307031 – 15€
à partir de 12 ans
Son
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Des grands-mères en danger

Ils ne sont peut-être pas pour le même public, mais nos deux romans du jour abordent la relation d’enfants et adolescents avec leurs grands-mères, surtout quand celles-ci sont en danger… Frissons garantis !

Peur dans la neige

Fleur et son frère jumeau Julius vivent temporairement chez leur grand-mère. Une nuit, Fleur remarque de la lumière dans la forêt et, poussée par la curiosité, décide d’aller voir ce qui se trame. Qu’elle n’est pas sa surprise quand elle découvre un trésor ! Persuadée que cela pourra venir en aide à ses parents, elle s’empare du butin…provoquant une terrible réaction en chaîne…

★★★★☆

Sandrine Beau nous avait déjà bien fait flipper avec Toute seule dans la nuit ou encore Traquées ! Elle réussit encore une fois à nous embarquer avec efficacité et grelottements dans un polar bien ficelé, à destination des jeunes lecteurs. Un huis-clos aussi glaçant que la saison durant laquelle l’histoire se déroule, qui fait la part belle à des jeunes adolescents débrouillards et courageux et à une grand-mère peut-être en fauteuil roulant mais certainement pas « diminuée » ! Une mamie à la fois drôle et bravache qui fera tout aussi pour protéger ses petits-enfants. Décidément, Sandrine Beau est vraiment très forte quand il s’agit d’associer le suspense haletant du roman policier à la sensibilité des relations familiales. Idéal pour frissonner par temps de canicule ! On en redemande… 😀

Peur dans la neige, Sandrine Beau (Mijade)
collection Zone J
disponible depuis le 21 mars 2019
9782874231094 – 6€
à partir de 10 ans

 

La maison des oiseaux

Pour Zoé, harcelée par sa cousine, ses camarades et incomprise par ses parents, sa grand-mère est sa seule amie et elle se réfugie dès que possible chez elle, à la maison des Oiseaux. Mais mamie perd la tête, et les parents de Zoé décident de la placer dans une maison de retraite. Inimaginable pour Zoé comme pour sa grand-mère, qui souhaite mourir chez elle. Alors Zoé décide de fuguer, et d’emmener sa grand-mère avec elle pour retrouver un oncle qu’elle croyait disparu…

★★★★☆

Les secrets de famille sont au programme du nouveau roman d’Allan Stratton ! Mais c’est surtout la relation fusionnelle entre une adolescente et sa grand-mère atteinte de démence qui nous touche, et la difficulté pour Zoé de faire entendre sa voix tant elle est écrasée par une cousine horrible et des parents que la précarité obnubile au point de ne pas voir le mal-être de leur propre fille. La solitude de l’adolescence et la solitude de la vieillesse se mêlent alors, ne trouvant aucune échappatoire et aucun soutien familial, à moins de retrouver cet oncle dont personne ne parle jamais et qui, selon les paroles de la grand-mère de Zoé, se serait occupé d’elle, lui… Le roman devient passe alors par la case road-trip, et montre toute les difficultés rencontrées – et le courage ! – d’une jeune fille qui ferait tout pour donner à sa grand-mère la fin qu’elle mérite. Un roman bouleversant, aux thématiques fortes et rugueuses, comme sait si bien les faire Allan Stratton.

La maison des oiseaux, Allan Stratton, traduit par Sidonie Van den Dries (Milan)
disponible depuis le 29 mai 2019
9782745995872 – 15,90€
à partir de 13 ans
Son
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Rattrapage – Vincent Mondiot

Elle, c’est la fille populaire du lycée, « la blonde au cul bandant ». Lui, c’est le mec moche, plein d’acné jusque sur la raie des fesses, dont elle et ses copains se sont foutus de la gueule pendant toute l’année scolaire. Jusqu’à ce qu’il tente de se suicider et fasse le reste de sa scolarité ailleurs. Alors on a plus parlé de lui, jusqu’à ce qu’elle le voit, le jour du rattrapage du bac.

★★★★☆

Monologue puissant et nécessaire, c’est la voix de celle qui a harcelé que l’on découvre. Cette fille qui était la reine du lycée et qui s’est bien amusée avec ses amis populaires à prendre des photos, faire des vidéos ou simplement dire des méchancetés sur ceux qui n’étaient pas de leur bande, tous ceux qui sont moches, bizarres, geek, ont des baskets troués, des yeux de poisson, etc. Jusqu’à s’acharner sur ce garçon aux cheveux gras, aux noms de groupes débiles tipp-exés sur son sac à dos, à l’acné galopante qui le leur a jamais rien fait et qui, un jour, s’est ouvert les veines en plein cours de philo. Ce jour de rattrapage où elle le croise, c’est celui de sa dernière chance : de se tirer de ce lycée dont elle ne veut plus entendre parler, et de laisser ce souvenir terrible derrière elle. Mais pas facile de tirer un trait pour celle qui croyait que ce n’était qu’un jeu, que c’était pas bien méchant. Pour celle qui s’en veut, qui se demande s’il la hait, qui voudrait dire pardon, qui cherche à se « rattraper ».

Un texte très fort, du point de vue du harceleur, qui s’intéresse aussi à l’effet de groupe, à cette idée que tout ça, c’est juste pour rire, et qu’ils n’ont qu’à pas être moches, les autres, en fait. Que tout ça c’est leur faute ! Toute cette difficulté à comprendre que non, rien de tout ça n’est normal, que personne n’est moche, gros ou trop bonne. Et que personne n’a à souffrir de cela. Une réflexion sur la culpabilité, bien sûr, mais aussi sur la recherche d’absolution. Et comme toujours dans ces textes courts de la collection « D’une seule voix », c’est non seulement percutant, mais aussi tout en nuances. Un indispensable !

Rattrapage, Vincent Mondiot (Actes Sud Junior)
collection D’une seule voix
disponible depuis le 3 avril 2019
9782330121006 – 9,80€
à partir de 13 ans
Son
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Dix – Marine Carteron

Dix. C’est le nombre de participants à une émission de télé-réalité novatrice qui se déroulera dans un manoir perdu sur une île. Sept adolescents, entourés de trois adultes, vont participer à une sorte d’escape game littéraire où le but du jeu n’est pas seulement de résoudre l’énigme…mais de s’en sortir vivant !

★★★★☆

Quand ils nous promettent un « clin d’œil sanglant » aux Dix petits nègres d’Agatha Christie, les éditions du Rouergue ne mentent pas sur la marchandise ! Marine Carteron reprend la trame de ce célèbre roman pour nous proposer une histoire de vengeance moderne. Certains ne seront donc peut-être pas surpris par le déroulé du récit, les autres auront le plaisir de découvrir et assister à un huis-clos macabre et malsain dans lequel tous les personnages ont des choses à se reprocher. Mais tout le monde s’accordera sur l’efficacité du récit et le rythme – des chapitres courts et des changements de personnages qui s’enchaînent – qui ne nous fait pas lâcher le roman !

Amateurs d’hémoglobines, vous serez servis ! Marine Carteron rivalise d’imagination – tout en s’inspirant de contes et de mythes, éléments importants de cette histoire – pour décrire les tourments de ces dix coupables. Des descriptions sans fard, qui risquent de vous donner quelques renvois, soyez-en avertis ! En tous cas, et sans vous révéler la teneur des raisons du supplice de ces dix personnages aux types très marqués, il est captivant de découvrir peu à peu ce dont ils sont tous coupables, la façon dont chacun essaye de se dédouaner de ses crimes ou de vivre avec cette culpabilité. Marine Carteron est vraiment très forte pour nous tenir en haleine et nous inciter à tourner les pages jusqu’à connaître le fin mot de son histoire (même si c’est l’heure de dodo depuis longtemps !).

Dix est un roman sans complaisance, pour les tortionnaires, bien sûr, mais aussi pour ceux qui ont laissé faire. Cru et cruel, le roman aborde des thématiques actuelles très fortes et, en ce sens, la libre adaptation fonctionne très bien. On prend un certain plaisir – un peu coupable, ok – à se délecter du châtiment réservé à tous ces personnages retors que vous allez vite trouver détestables. Alors, vous vous laissez tenter ?

Dix, Marine Carteron (Le Rouergue)
collection DoAdo Noir
disponible depuis le 20 mars 2019
9782812617324 – 14,80€
à partir de 14 ans
Son
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♫ Tout au bout de mes rêves… ♫

Les deux romans que Bob vous présente aujourd’hui n’ont absolument rien à voir et pourtant… Deux romans portés par des narrateurs garçons, deux romans où les rêves (et les cauchemars !) sont le moteur de leurs histoires, deux romans aux ambiances à la limite de l’étrange… Allez au bout de vos rêves avec Jean-Jacques Goldman et Bob & Jean-Michel, c’est cadeau ! ♫

Même pas en rêve

Timéo entre en seconde et à l’internat en même temps. Surpris une nuit à rêver un peu trop intensément de la jolie Aliénor, il devient le souffre-douleur de ses compagnons de chambrée. Heureusement, il peut compter sur Louis, ténébreux et mystérieux, sur qui toutes les émotions semblent couler alors que Tim est complètement aux prises des siennes. Une amitié forte et étonnante, bientôt renforcée par des événements qui vont interroger Tim sur son nouvel ami…

★★★★☆

Difficile de survivre dans le milieu hostile du lycée quand on est un garçon craintif de nature, et particulièrement pessimiste. Timéo est la tête de turc parfaite et les autres l’ont bien compris. Il va pourtant trouver une aide inattendue mais ô combien précieuse avec Louis, dont toutes les filles sont amoureuses et à qui personne ne cherche des noises. Un passé mystérieux, renforcé par une présence paternelle qui fait rêver – le père de Louis est un brillant chercheur à l’origine de la spectrine, une sorte de drogue capable de faire oublier tous les mauvais souvenirs – et une absence totale de peur, Louis est un véritable héros pour Tim qu’un rien angoisse. Et puis le harcèlement continue et les événements s’enchaînent… Un premier roman de Vivien Bessières très prometteur sur la force de l’amitié et le harcèlement, bien sûr, mais avec aussi une ambiance proche du thriller qui nous interroge sur les traumatismes et l’acceptation d’une réalité qu’on voudrait oublier ou supprimer de son esprit. Un roman juste, parfois cruel mais surtout sensible sur l’adolescence. A découvrir !

Même pas en rêve, Vivien Bessières (Le Rouergue)
collection DoAdo
disponible depuis le 6 février 2019
9782812617546 – 12,80€
à partir de 14 ans

 

Tant que durent les rêves

Nathan a dix-huit ans et se prépare pour les championnats de France de natation. Il est pressenti pour intégrer l’équipe de France aux prochains JO et ne rêvent d’ailleurs que de ça… Mais depuis quelques temps, une petite voix instille le doute en lui et la peur de ne pas réussir. Cette voix, cette « Bête » comme il la surnomme, prend tellement de place qu’un jour, Nathan assiste impuissant à un phénomène plus qu’étrange…

★★★☆☆

Après avoir déjà fait du sport le thème (entre autres) de son précédent roman, Vivant (dont certains remarqueront peut-être les clins d’œil dans ce nouveau texte), Roland Fuentès continue à explorer la relation de ses personnages à une discipline sportive, à la façon dont elle les forge, aussi bien dans les qualités positives que dans les doutes, les moments de faiblesse ou de découragement. Ici, ce doute prend une forme totalement inattendue pour chavirer dans une ambiance très proche des nouvelles fantastiques du 19e siècle, où le héros assiste avec stupéfaction à un basculement de la plus grande étrangeté. Une expérience étonnante que Nathan va partager avec d’autres personnages du roman, qui vont tous être confrontés à la possible destruction de leur rêve… Petite mention pour Alicia, autrice en herbe, qui permet à Roland Fuentès de faire un parallèle intéressant entre l’écriture et le sport, où le degré de travail, de pratique et de persévérance ne sont peut-être pas si différents ? Un roman dans lequel on se laisse flotter et emporter doucement par le courant, dont les personnages nous invitent à croire en nos rêves et à nous dépasser pour les réaliser.

Tant que durent les rêves, Roland Fuentès (Syros)
disponible depuis le 7 février 2019
9782748526189 – 16,95€
à partir de 12 ans
Son
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Lectures d’été #2

Deuxième et dernière partie des lectures d’été de Bob…eh oui, ça sent déjà la rentrée littéraire ! Mais vous verrez, il est encore question de pas mal de voyages et ceux qui aiment se faire du mal y trouveront aussi leur compte. 😛

Catégorie #vacances de la loose

Un mois à l’ouest

A l’époque où Internet, les SMS et Google Maps n’existaient pas encore (quand vos ados n’étaient même pas nés), Fred tombe amoureux d’une canadienne et décide d’aller la rejoindre. Sauf qu’en fait, la miss partageait pas franchement les sentiments, et notre pauvre garçon se retrouve tout seul à errer sur un continent bien loin de chez lui. Commence alors un road-trip entre Canada et États-Unis, où les quelques dollars en poche fondent comme neige au soleil et où gros ratages et belles rencontres se succèdent. Comme toujours, le style de Claudine Desmarteau est vif, incisif, rythmé et nous offre ici de belles tranches d’oralité québécoise. On se régale des tribulations de ce frenchie un poil loser, qui cache malgré tout une véritable profondeur. Des photos en noir et blanc, comme des petites respirations apaisantes dans la galère, parsèment ce road-trip qui sent le vécu !

Un mois à l’ouest, Claudine Desmarteau (Thierry Magnier)
disponible depuis le 18 avril 2018
9791035201470 – 14,50€
à partir de 15 ans
Y aller

On continue avec un autre loser du voyage : Solal, complètement accro aux jeux vidéo, et notamment à Zelda, qui décide un jour de tout arrêter, de se débrancher, et se lance dans un périple un peu fou : rejoindre le centre de la France, à Bruère-Allichamp. Équipé d’un sac à dos plus lourd que lui et de toute sa motivation, le garçon se lance, il y va ! Hervé Giraud nous offre un road-trip totalement décalé qui fonctionne à merveille : on rit de ce retour à la nature de ce geek un peu halluciné qui n’a que le monde de Zelda pour repère (et qui obtient d’ailleurs des « objets magiques » au fur et à mesure des rencontres de son périple) et on s’attendrit de sa naïveté et de son exaltation en toute situation. Une aventure initiatique jubilatoire !

Y aller, Hervé Giraud (Thierry Magnier)
disponible depuis le 16 mai 2018
9791035201777 – 12,90€
à partir de 13 ans

Catégorie #ouille, ça pique !

Les collisions

Quand deux lycéens de terminale L s’ennuient et décident de jouer les Merteuil et Valmont de leur classe, attendez-vous à un remake des Liaisons dangereuses où les lettres deviennent textos mais où la manipulation et la perversité sont exactement les mêmes ! Gabriel et Laëtitia n’ont absolument rien à envier à leurs aînés de fiction, et Joanne Richoux nous brosse un portrait à l’acide de cette jeunesse qui s’ennuie et qui n’a – presque – que faire des conséquences, nous montrant par là-même à quel point la transposition de la cour du XVIIIe siècle à cette classe de lycée est d’une étonnante modernité. Un roman terriblement dérangeant, mais tellement juste, porté par un style acéré, intransigeant, qui nous place dans la position non moins honteuse d’un voyeur impuissant qui se délecte des drames à venir. Une vraie claque !

Les collisions, Joanne Richoux (Sarbacane)
collection Exprim’
disponible depuis le 4 avril 2018
9782377310739 – 15,50€
à partir de 14 ans